Le Professeur Siméon Rajaona est décédé juin 2013. Trois ans après, les éditions Ambozontany, dirigées par le père Giustino Béthaz, viennent de publier un ouvrage spirituel intitulé: « Mon corps soupire après toi ». Compte-rendu en communiqué et photos.
Jeannot Ramambazafy
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Le même homme à des décennies de distance
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Siméon-Régis RAJAONA
(1926-2013)
RAJAONA (Siméon-Régis): Ñé le 18 février 1926 à Tananarive. Après de brillantes études à l’Ecole des Frères à Andohalo puis au Lycée Gallieni, commencées par le baccalauréat 2ème partie (Philo-lettres) en 1948, il alla -s’étant destiné à l’enseignement- aux études en France où il obtint successivement les divers certificats de licence-es-lettres (1948-1950), le Diplôme d’Etudes Supérieures de langues classiques (1951) et l’Agrégation de Grammaire (1955). Le cycle de ses études terminé, Siméon Rajaona fut nommé Professeur de lettres au lycée Fresh-Ajaccio (Corse) en 1955, puis Professeur de Première au Lycée Gallieni de Tananarive en 1957, pour être, l’année d’après, affecté à un nouveau poste, celui de Directeur du Centre d’Etudes et d’Information sur la Langue et la Civilisation Malgaches, fonction à laquelle ses études antérieures semblent ne l’avoir guère préparé, mais qui lui permit, vu sa vaste culture, jointe à une étonnante puissance de travail, d’approfondir ses connaissances en matière de linguistique et civilisation malgaches. Nommé en décembre 1960 Maître de Conférences à l’Ecole Nationale des Lettres et Sciences Humaines où il occupait la chaire de malgache, il assure aujourd’hui conjointement les deux hautes fonctions de Directeur du C.E.I.L.C.M. et de Directeur du Département de Langue et Littérature Malgache à la Faculté des Lettres. S. Rajaona a publié jusqu’ici une anthologie de quelques auterus malgaches à l’usage des élèves de 2de, de 1ère et des classes terminales intitulée « Takelaka notsongaina » dont le 1er tome, consacré à la poésie, a paru en 1962, et le second, consacré à la prose, en 1963 ; on peut lire dans ce dernier –introduisant quelques extraits de « kabary » d’Andrianampoinimerina- une étude sagace et approfondie sur le « sori-pitondrana » ou théorie de la politique du grand monarque merina. M. Siméon Rajaona était Professeur Agrégé, Membre titulaire de l’Académie Malgache. Il a écrit de nombreux ouvrages.
M. Siméon Rajaona est décédé le 23 juin 2013.
Son souvenir restera impérissable!
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Le père Giustino Béthaz
Mesdames et Messieurs,
Bonjour et bienvenue à toutes et à tous !
Je vous prie d’abord de m’excuser si mes propos sont ceux d’un débutant dans ce genre de rencontres car c’est la première fois que je tiens une conférence de presse et ma langue maternelle n’est ni le malagsy ny le français, mais l’italien.
D’autres parmi vous pourraient faire mieux que moi : je vois ici présent le P. François de Paul de Torquat qui a bien connu Siméon Rajoana et a écrit la préface de ce livre.
J’aimerais d’abord vous présenter quelques aspects de la personnalité du Professeur Siméon Rajaona, le feu auteur de ce livre « Mon corps soupire après toi ». Pendant plus de vingt cinq ans j’ai eu l’occasion de le rencontrer soit dans sa maison, soit à la Maison des Editions Ambozontany à Analamahitsy, soit à l’église d’Ankadivato.
La raison de ces rencontres concernait le plus souvent le projet d’un de ses livres à réaliser ou l’appréciation qu’il donnait d’un manuscrit qu’on lui présentait. Son accueil était toujours empreint de sérénité et de joie. Il ne commençait jamais par des critiques négatives, mais par des suggestions positives et parfois par un souhait pour améliorer le contenu du manuscrit.
Son domaine préféré était, bien sûr, la structure et la beauté de la langue malgache dont il analysait les nuances et proposait des recherches linguistiques remarquables.
Le plus souvent, les manuscrits qu’on lui proposait de lire étaient des livres ayant un contenu religieux et spirituel. Parmi les quelques breves suggestions il proposait une place plus importante à donner à l’Esprit Saint dans la vie intérieure, surtout dans la contemplation et la prière.
C’est cette conviction personnelle, cette instance, dirais-je, sur l’action du Saint Esprit dans le domaine spirituel qu’il manifestait en particulier dans le groupe de prière charismatique.
Concernant son activité littéraire, ses livres en particulier, bien d’autres personnes pourraient témoigner davantage que moi, qui étais plutôt occupé à la présentation, la mise en page, l’impression et à la diffusion des certains de ses livres. Un des points les plus remarquables a été son entente intense avec le Père Nicolas Giambrone à Fianarantsoa, pendant de nombreuses années pour l’édition des ses livres.
Voilà quelques notes personnelles concernant mes relations avec le feu Professeur Siméon Rajaona.
Venons-en maintenant à la présentation de ce dernier livre: « Mon corps soupire après toi ». J’ai dit « dernier livre » et même posthume. Il est important de préciser qu’il fut parmi un des premiers livres écrits par le Professeur, mais qui attendit des années avant d’être publié.
Je me souviens bien, il y a quatre ans, Siméon Rajaoana était venu à Analamahitsy me présenter le manuscrit de ce livre, en me priant de le publier assez rapidement. J’étais très honoré de sa confiance et j’avais commençé l’analyse du texte, mais hélas, ma promesse n’a été qu’à paroles, sans effet, jusqu’ à maintenant.
Je peux affirmer que j’ai lu et relu, au moins quatre fois avec admiration et enrichissement spirituel ces neuf chapitres de « Mon corps soupire après toi ».
Le thème fondamental est la « prière », comme le dit bien le sous-titre : « Prière et vie chrétienne ». Je noterais tout de suite qu’un lecteur, habitué à des livres un peu traditionnels, pourrait être surpris par certaines nouveautés qui sortent de l’ordinaire.
Mais avant d’entrer dans les détails, je vous dirais que j’ai été bien aidé dans la lecture et la compréhension de l’ensemble de ce livre par le fil conducteur, progressif et bien harmonisé, proposé par le Pasteur Christian Raseta aux pages de 5 à 9, intitulé : « Apprendre à prier pour dialoguer avec Dieu ». Etant donné que ces neuf chapitres ont un contenu très riche mais varié, il est important d’en saisir l’unité par le biais de ce fil conducteur qui dégage bien la ligne de fond qui unit les différents chapitres avec des titres parfois surprenants.
Il est bien que chaque lecteur soit lui-même à découvrir les aspects qui le touchent individuellement. Quant à moi, je me bornerai à souligner certaines surprises qui ont attiré mon attention.
Corps-âme-esprit. J’étais habitué, par tradition, au binôme : « corps et âme » ou « ara-panahy sy ara-batana ». Or, au chapitre 1 sur « La sobriété » l’auteur met bien en évidence, selon la Bible, les trois éléments constitutifss de la personne humaine : « l’esprit, l’âme et le corps ». « Que votre être entier, l’esprit, l’âme et le corps, soit gardé sans reproche à l’avènement de notre Seigneur Jésus-Christ » (1 Th 5,23). Par cette distinction des trois éléments « l’esprit, l’âme et le corps » Siméon Rajaona donne une très grande importance à chaque élémént. « L’esprit » nous fait entrer dans la vraie prière : « prier en esprit ». « L’âme » est liée au corps, en tant que siège de l’intelligence et de l’affectivité. Le « corps » est l’élément par lequel nous sommes présents au monde. Pour que la prière, le dialogue avec Dieu, soit parfaite, le corps doit s’associer à l’esprit. Voilà pourquoi l’auteur a bien choisi le titre « Mon corps soupire après toi ».
Une autre richesse, qui peut nous introduire dans la continuité de l’expérience religieuse qu’est la prière, c’est la référence à la tradition des priants (hommes et femmes) dans l’Eglise. L’auteur se réfère souvent aux Pères de l’Eglise, aux Saints et Saintes dont il souligne et admire la foi: St Paul, bien sûr, St Augustin : « Ton désir, c'est ta prière, si le désir est continuel, la prière est continuelle », et aussi en particulier St Irénée, St Colomban, St Anselme et tant d’autres !!!
« L’Esprit Saint » ! Comme je l’ai déjà souligné au début, Siméon Rajaona donne un place très importante à l’Esprit Saint dans la prière : il n’y a de vraie prière chrétienne que dans l’Esprit (neuvième chapitre) et cette prière spirituelle doit être un état permanent. Ainsi le chrétien ne peut être chrétien de temps en temps, quand il prie explicitement. Dieu nous appelle constamment à Le recevoir, et nous-mêmes en retour sommes appelés à être constamment en communion avec lui. Une conclusion de cet essai pourrait être celle-ci : être Chrétien, c’est prier dans l’Esprit.
Je pourrais continuer pour mettre en exergue d’autres aspects concernant la prière isolée ou en Eglise (liturgique), la prière en union avec Jésus-Christ le grand priant, la prière adressée au Père et donc la prière à la Sainte Trinité… Mais je préfère laisser à chacun de vous la joie de découvrir le « goût » de la prière dont parle avec insistance Siméon Rajaona.
Une dernière petite remarque: j’ai cru opportun d’ajouter à la fin du livre un bref « glossaire » pour aider le lecteur à mieux comprendre le sens, parfois un peu difficile de certains mots philosophiques ou anciens.
Bien sûr, je vous invite à acquérir ce bijou spirituel, sans oublier les autres trésors littéraires que le Professeur Siméon Rajaoa nous a laissé en héritage. Trouvez aussi notre avant-dernière parution: le Dictionnaire VITASOA, ainsi que notre catalogue.
Merci de votre attention !
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Thierry Rajaona présentant l'ouvrage de son père
Reportage: Jeannot Ramambazafy - Harilala Randrianarison