Madagascar. On a peut-être du fuel lourd, mais on n’a vraiment aucune suite dans les idées… politiques

Lundi, 23 Octobre 2017 04:39 Madagate affiche
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Au début des années 1970, j’étais jeune étudiant en France. A l’époque, la crise pétrolière mondiale était à son paroxysme. Disons surtout qu’en 1973 (premier «choc pétrolier»), les pays de l’OPEP (Organisation des pays producteurs et exportateurs de pétrole) faisaient la pluie et le beau temps sur le prix du baril du pétrole. A ce moment-là, Valéry Giscard d’Estaing -né le 2 février 1926- était ministre des Finances. Sachant que cette crise du pétrole allait durer, il annonça que s’il était élu président de la république, il mettrait en pratique le changement d'heure pour limiter la consommation d'énergie.

Le 27 mai 1974, Valéry Giscard d'Estaing devient le troisième président de la Vème République française, à travers une élection anticipée due au décès du président Georges Pompidou (atteint de la rare maladie de Waldenström). Pour votre culture, sachez que M. d’Estaing a été secrétaire d'État aux Finances de 1959 à 1962 et ministre des Finances et des Affaires économiques de 1962 à 1966. Puis, ministre de l'Économie et des Finances de 1969 à 1974. Et le tout nouveau président n’oublia pas son idée de changement d’horaire pour la raison cité plus haut.

C’est lors du Conseil des ministres du 25 septembre 1974 qu’est décidée alors la création de l’Agence pour les économies d’énergie (AEE). La puissance de l'AEE reposait surtout sur sa politique de communication active en faisant appel à tous les médias sans exclusive. Certains slogans de l’AEE sont restés dans les mémoires, et particulièrement: «En France, on n'a pas de pétrole, mais on a des idées». Après maintes études ayant permis de prouver que le changement d’horaire annuel peut permettre des économies d'énergie considérables et après une grande campagne de sensibilisation populaire sur le sujet, l’heure d’été est adopté le 28 mars 1976.

Depuis, en France, l’heure est changée deux fois par an. Au printemps, en mars, pour passer de l'heure d'hiver à l'heure d'été, l'horloge est avancée d'une heure. A l’automne, en octobre, pour passer de l'heure d'été à l'heure d'hiver, l'horloge est retardée d'une heure. Voilà ce qui s’appelle bien une anticipation sur l’avenir et une mise en pratique d’une excellente idée en moins de la moitié d’un mandat présidentiel (septennat à l’époque).

A Madagascar, c’est également un ministre des Finances au très long cours (de 2009 à 2013) qui a été élu premier président de la IVème république de Madagascar. Dans le domaine de l'énergie aussi, lui il a annoncé que s’il était élu président de la république, il n’y aurait plus de « délestages » en 3 à 6 mois à Madagascar. C’était en 2013. Actuellement, nous sommes au mois d’octobre 2017, cela persiste mais la Jirama (société nationale pour l’énergie et l’eau) parle de «coupures» et non plus de «délestages». Oui, mais le résultat est exactement le même: il n’y a plus de courant électrique durant un laps de temps qui peut bousiller tout matériel chèrement acheté mais qui ne sera jamais remboursé (frigos, télés, appareils de coiffure, de sonorisation…).

Le comble dans cette histoire est ceci: certes, Madagascar a peut-être du fuel lourd mais cela ne mène pas loin étant donné que c’est la Jirama qui doit fournir ce carburant à la société Symbion Power qui n’a fait que réparer des groupes électrogènes finlandais Wärtsilä datant de plus d’un quart de siècle et qui ont été adaptés pour marcher au fuel lourd donc. Mais le président Hery Rajaonarimampianina les a présentés comme «des Rolls Royce de la production d’énergie». Ah bon? C’est certainement pour cela que les factures augmentent sans que personne ne sache pourquoi alors? Ainsi, dans cette démarche volontaire de paupériser durablement la population malgache, cela s’appelle « avoir de la suite dans les idées ». On verra bien aussi lorsque la Jirama n’aura plus de sous pour payer ce carburant déjà taxé de toxique…

Dans ce même ordre… d’idée, penchons-nous dans le domaine de la politique et du mode de gouvernance que pratique l’actuel régime malgache en place. C’est à la fois la notion du Monopoly et de la monopolisation. Rappelez-vous: le Monopoly est un jeu de société dont le but est de ruiner vos adversaires grâce à des achats immobiliers. Vous devez connaître le groupe Filatex déjà et, à présent, ces incroyables mais vraies histoires d’expulsion manu militari, pour cause de projets présidentiels, de pauvres Malgaches vivant sur des terrains depuis des lustres. Cela, à travers pratiquement tout Madagascar. Quant au verbe monopoliser, il signifie: « Réduire une production, un secteur d'activité à un monopole de fait ou de droit par suppression de toute concurrence. Se réserver, s'attribuer exclusivement l'usage, le profit, l'avantage, la possession de quelque chose: monopoliser la conversation, monopoliser toutes les fonctions ».


Sur 25 millions de Malgaches vivant à Madagascar, le président promu docteur honoris causa de l’université de Milan es sciences politiques, n’a trouvé qu’un certain Rivo Rakotovao pour remplacer au Sénat, Ahmad Ahmad élu président de la CAF (Confédération africaine de football). J’aurai applaudi des mains et même des pieds si ce n’était le parcours stérile de ce Rivo, en moins de quatre ans, pour le développement de Madagascar. Cet ami rotarien du président Rajaonarimampianina a été propulsé président du parti présidentiel Hvm (Hery Vaovao ho an’i Madagasikara), et parallèlement nommé seul ministre d’État en charge de l'Equipement, des Projets Présidentiels et de l'Aménagement du Territoire. Faits d’armes principaux: avoir emprisonné deux journalistes qui n’avaient fait que publier une lettre de lecteur et avoir été à l’origine du limogeage du Dg du Trésor, Orlando Robimanana, qui avait dénoncé une tentative d’extorsion de fonds au dit Trésor. C’est-à-dire sans suivre les démarches légales, la hiérarchie et l’orthodoxie financière.

Puis, il a été soudainement dégradé au rang de simple ministre, même «auprès de la Présidence», chargé de l'Agriculture et de l’Elevage. Faits d’armes ici? De très beaux discours prometteurs qui n’ont pas empêché l’Etat malgache de doubler l’importation de riz, pourtant aliment de base des Malgaches (où diable est le grenier à riz de l’océan Indien tant clamé?), et qui n’ont pas fait cesser les vols de zébus, entrainant mort d’hommes. Jamais deux sans trois, dit-on. Alors qu’il accompagnait à Rome son copain rotarien devenu «filoha», Rivo Rakotovao vient de cesser d’être membre du gouvernement, sous trois Premiers ministres, pour devenir «Loholona» (Sénateur). Dites-moi un peu où est le mérite dans ce parcours du con battu (à défaut de combattant)?

La suite est évidente, claire comme de l’eau de roche: faire en sorte que ce Rivo remplace Honoré Rakotomanana, actuel président du Sénat, taxé pro-Ratsiraka, qui était déjà tombé dans les pommes le 14 juillet 2017 à la Résidence de France à Ivandry. D’accord ou pas, l’Honoré sera déshonoré (sans jeu de mots). Ainsi le veut la HVM (Haute volonté manipulatrice) avec le concours du grand Considérateur Jean Eric Rakotoarisoa de HCC (Hou là là! C’est du Cinéma). Aucun esprit d’ouverture, ils ont inventé l’autarcie politique, ma parole !

Aussi, si le projet de référendum constitutionnel est abandonné ou tombe à l’eau, Rivo Rakotovao deviendra chef d’État durant trois mois. Mais à condition encore que le président Hery se présente à la prochaine élection présidentielle. Tout cela, en fait, pue l’amateurisme et le mauvais calcul, ce qui est un comble pour un expert comptable qui agit vraiment sans réfléchir et en vase clos. Ci-après, un extrait de l’article «Madagascar: le Président, seul (ou presque), dans sa tour d’ivoire») de LOI (La lettre de l’océan Indien) en date du 20 octobre 2017: «Alors que le scrutin présidentiel doit se tenir l’an prochain, bien qu’aucune date n’ait encore été déterminée, le pouvoir du président Hery Rajaonarimampianina est gagné par une fébrilité tous azimuts. L’épidémie de peste qui touche la Grande île depuis fin août déstabilise un peu plus un régime déjà fragilisé par un bilan économique en berne et entaché de scandales politiques qui atteignent l’entourage direct du Chef de L’État. Attaqué sur tous les fronts, ce dernier multiplie maladresses et inconséquences (…)».

Jeannot Ramambazafy – Publié dans la Gazette de la Grande île du 21 Octobre 2017


Mis à jour ( Lundi, 23 Octobre 2017 04:55 )