Madagascar : vers une diplomatie nouvelle ou encore vers une valse-hésitation diplomatique pleine d’incertitudes ?

Dimanche, 28 Février 2010 18:09 Analyse
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Razafisambatra Louis De Mon Désir a navigué dans la diplomatie (ancien Directeur administratif et financier du MAE et Conseiller à la Chancellerie de Madagascar à Paris). Il est actuellement professeur de Droit et de Sciences Politiques et Président du Collectif de quelques associations malgaches en France. Il est un fervent lecteur de madagate.com. mais ce n’est pas pour çà qu’il a le privilège de nos pages. Non, sa pertinence permet à tout un chacun de garder une lucidité qui manque de part et d’autre. En effet, et je ne me lasserai jamais de le répéter : comme l’a déclaré le Président Barack Obama, l’Afrique a besoin d’institutions fortes et non d’hommes forts ». Aujourd’hui, M. Razafisambatra nous parle de diplomatie.

Jeannot RAMAMBAZAFY - Rédacteur en Chef de www.madagate.com

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« En dépit de la chute du dictateur Marc Ravalomanana, des questions politiques cruciales suscitent de l’inquiétude au peuple malgache, en l’occurrence une conférence nationale non définie démocratiquement par toutes les forces socio-politiques, les décisions dites unilatérales de la Haute Autorité de la Transition, la suspension des accords de Maputo et d’Addis-Abeba, l’éventuelle tenue des élections législatives au mois de mai etc... Et quand la misère de la population aggrave l’aspect multiforme de ce souci, personne n’a le droit d’oublier que la plus probable évolution historique est celle que l’on n’avait pas prévue.

Surtout, ne laissons pas dans les oubliettes le rôle croissant de la diplomatie économique, la confusion grandissante de l’économie mondiale, le drame de l’endettement, le drame des taux d’intérêt et des changes ; d’où l’importance des négociations économiques et financières ; mais la conciliation des conflits d’intérêts économiques est évidemment le test de l’art en politique étrangère ; mais force est de constater aussi qu’il n’y a toujours pas de transparence concernant les enjeux économiques qui ont précédé les accords de Maputo. J’espère bien que le monde diplomatique malgache ne minimisera pas la déclaration de l’ex-chancelier allemand Schmidt : « la politique extérieure n’est pas pour nous une discipline spéciale de diplomates secrets à la barbe blanche. Elle est en même temps politique économique, politique mondiale des matières première, politique monétaire mondiale, politique mondiale de développement, politique mondiale de sécurité ».

« Il faut donc trouver une « véritable diplomatie nouvelle » et non faire sombrer le pays dans des incertitudes et de simples gesticulations diplomatiques. Particulièrement, la diplomatie malgache ne doit plus hésiter à rappeler les limites morales et politiques du droit d’ingérence, les deux principes que les Nations Unies font reposer son interdiction : la souveraineté des Etats et la non-immixtion dans les affaires intérieures d’un autre Etat ; et surtout que l’Etat malgache n’ayant pas été perturbateur, dangereux, impuissant ou incapable ; il y avait certainement une assistance à un peuple en danger et non du désordre bien délibéré. Personne ne peut par conséquent se prévaloir ni du droit d’ingérence ni du devoir d’ingérence dans notre pays ; et ce, d’autant plus que la prévention des crises n’a jamais été honnête parce que par exemple on nous a toujours empêché d’adopter une politique d’anticipation des crises de change et une politique de supervision prudentielle pour pouvoir supporter les chocs exogènes ; tout ceci pour obliger notre pays à se conformer, sans le vouloir bien sûr, au fameux soit disant système financier international.

Toutefois, accordons à l’opinion publique malgache un minimum de prérogative pour douter si le Vice-Amiral nouvellement nommé à la fonction de vice-Premier ministre chargé des Affaires étrangères ne va pas confondre la diplomatie avec une certaine discipline militaire unilatéraliste (alors que c’est le moment du multilatéralisme) ; d’ailleurs, la nomination d’un plus haut gradé de l’armée au poste de vice-Premier ministre et le maintien d’un officier supérieur en disponibilité moins gradé que lui à celui de premier ministre ravivent certainement un climat de frictions et de malaise entre les deux hommes ; ipso facto, le jeune audacieux Andry Rajoelina, Président de la Haute Autorité de Transition, a intérêt à réviser et à combler les lacunes de son expérience pour ne pas risquer de s’auto-destituer ; qu’il n’oublie pas que quand on est au pouvoir, on est plutôt plus entouré de courtisans politiques que de vrais amis ; et que le « déterminisme historique » a subi de très graves coups.

« Dans tous les cas de figure, la diplomatie malgache a besoin de stratégies innovantes tout en rappelant à la communauté internationale l’article premier, paragraphe 3 de la charte des Nations Unies qui stipule : « l’un des objectifs fondamentaux de la Charte des Nations Unies est la réalisation de la coopération internationale en résolvant les problèmes internationaux d’ordre économique, social, intellectuel ou humanitaire…. ». Pour éviter les crises politiques chroniques dans les pays pauvres, la coopération internationale du 21ème siècle doit aller dans la logique d’une revendication d’un conseil de sécurité économique reflétant la restructuration et le renforcement des institutions actuellement chargées de gérer l’économie mondiale ».

Le Président RAZAFISAMBATRA Louis De Mon Désir

Paris, le 27 février 2010

Mis à jour ( Lundi, 01 Mars 2010 12:01 )