Madagascar présidentielle 2013, 2è tour : lettre à Jean Louis Robinson

Jeudi, 26 Décembre 2013 08:56 Analyse
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Jean Louis Robinson

Après vous être acquitté de votre devoir de voter, le 20 décembre, vous avez déclaré, lors d’une interview : « J’accepterai le résultat de cette élection qui devrait être transparente et donc ... fiable. Je félicite les Malgaches qui se sont empressés de voter tôt dans la matinée. C’est un signe de volonté de sortir la Nation de cette longue crise et surtout de tourner la page pour une réelle réconciliation », aviez-vous martelé.

Par ailleurs, vous aviez pensé aussi qu’avec la communauté internationale, qui est présente en masse, notamment dans les bureaux de vote, il serait difficile, tant pour vous que pour le camp adverse, de procéder à des falsifications de résultats. (Source : orange)

Dans une déclaration,  dimanche dernier (Ndrl : 22 décembre), vous avez demandé l'arrêt de la publication des résultats : "Nous demandons l'arrêt de la publication des résultats de l'élection et voulons revoir toutes les urnes pour vérifier les bulletins pré-cochés dans les urnes". (Source : orange)

Moi personnellement, j’ai beaucoup d’estime pour vous. Un médecin qui a suivi au moins dix années d’études universitaires, ça mérite beaucoup de respect. En plus, vous êtes dans le dernier carré à la course à la magistrature suprême, vous êtes un grand homme.
Mais votre déclaration est complètement contradictoire Monsieur Robinson.

A partir du moment où vous commencez à perturber ce processus électoral, ceci changera l’image et l’estime que j’ai pour vous.

Il n'y a jamais eu une élection parfaite dans le monde. L'objectif est que le scrutin doit avoir une tendance vers la perfection.

Je ne dis pas que c'est meilleur dans le monde, mais je pense que cette élection présidentielle du 20 décembre 2013 à Madagascar est le scrutin le plus sûr, le plus observé dans l'histoire de Madagascar...

En plus, il faut savoir qu'il y a plusieurs balises contre les fraudeurs sur cette élection.

Primo, avec l'urne transparente, il n'y aura plus des bourrages des bulletins en avance comme avant.

Secundo, avec l'utilisation des bulletins unique, nous sommes sûrs que le bulletin de chaque candidat arrive dans tous les bureaux de vote de l'île, pas comme avant.

Tertio, tous les bulletins de vote sont codés avec des numéros infalsifiables, inscrits avec hologramme, comme les billets de banque. Il est impensable de reproduire en plusieurs quantités de bulletins pour les fraudeurs.

Quarto, c'est pour la première fois que présenter sa carte d'identité nationale, avec sa carte d'électeur est nécessaire pour pouvoir voter. Je trouve que tricher est très difficile.

Quinto, c'est pour la première fois que les résultats de l'élection sont informatisés à partir des bureaux de vote, il est vrai que nous ne sommes pas comme en France ou aux États Unis où le résultat est connu le soir même de l'élection, mais c'est vraiment une avancée spectaculaire que nous avons chez nous. Les attentes de 15 jours pour le résultat définitif, c’est juste pour les ramassages des urnes puis quelques vérifications.

Sexto, c'est pendant cette élection que nous avons chez nous autant d'observateurs d'élections nationale et internationale.

C’est le moment, Monsieur Robinson, de montrer aux yeux du monde que vous êtes un sportif de haut niveau. Vous connaissez très bien ce qu’on appelle " Règles du jeu " et " Respect de l’arbitre ". Donc je pense que cet esprit est aussi applicable dans d’autres domaines de la vie. Comme vous aviez déclaré dans une interview : " qu’avec la communauté internationale qui est présente en masse, notamment dans les bureaux de vote, il serait difficile, tant pour lui que pour le camp adverse, de procéder à des falsifications de résultats." Vous avez des représentants au niveau de la  CENI-T.

Je ne sais pas si vous êtes au courant que le peuple Malagasy n’en peut plus avec cette crise Monsieur : la majorité veut un président élu, le plus rapidement possible, pour pouvoir commencer le développement du pays. Vous-même, vous aviez dit que ce gouvernement d’union nationale de transition a apporté beaucoup de dégâts tant qu’en matière économique qu’au niveau social à Madagascar.

Je ne sais pas mais attendre 15 jours pour que la CENI-T finisse le dépouillement des résultats est déjà trop long pour nous. Et maintenant vous allez encore rajouter quelques jours, une semaine, voire un mois pour la confrontation des résultats. Pourquoi demander d'arrêter le processus alors que vous avez des représentants au niveau de la CENI-T ? Il suffit de mobiliser votre représentant pour vérifier la véracité des résultats provisoire promulgués par la CENI-T. Il faut rappeler que la CENI-T et la CNE ou la CES n'appartiennent pas à Ravalomanana ni à Rajoelina, ni à Hery Rajaonarimampianina et encore moins à Jean Louis Robinson. Ils ne sont même pas sous l'ordre de l'Etat et du gouvernement Malagasy. Vous avez votre représentant au sein de ces deux entités.

Sur ce, Monsieur Robinson, il y a un jeu dangereux pour le pays. Je vous rappelle que le contexte ne ressemble pas à celui de 2001. Cette fois-ci, l’Etat Malagasy n’est pas organisateur de l’élection. C’est la CENI-T et la CNE, organes sous l’égide de la communauté internationale qui est responsable.

C’est un jeu très dangereux Monsieur Robinson, je ne pense pas qu’un médecin, sportif de haut niveau ait été à l’origine de cette déclaration, ça ne peut être que les " mpitaty rà-kena ". Ils veulent refaire la crise 2002 mais ils se trompent, et je pense que vous n’allez pas entrer dans leur mauvais jeu ;

En 2001, Marc Ravalomanana était très puissant au niveau popularité et au niveau financier. Au premier tour de l’élection du 16 Décembre 2001, il avait obtenu entre 46% à 49% des suffrages exprimés alors que vous n’aviez que 22% au premier tour.

Vous êtes médecin Monsieur, vous saviez très bien ce qu’on appelle « non-assistance à personne en danger ». Créer une nouvelle crise pour faire souffrir encore plus, est comme une non-assistance à personne en danger.

Je ne pense pas que c’est vous qui voulez refaire la crise 2002, mais ce sont les " mpitaty rà-kena ", " tsy mataho-tody, tsy matahotra an’Andriamanitra "… qui ont beaucoup d’intérêts quand Madagascar est en crise.

Sur ce, je vous laisse, Monsieur Jean Louis Robinson. Je suis sûr que vous n’allez pas entrer dans ce mauvais jeu.

Veuillez recevoir toute mon estime et tous mes respects pour un grand homme comme vous, Monsieur.

César Marius Rakotonarivo

Antananarivo, le 25 décembre 2013

Mis à jour ( Jeudi, 26 Décembre 2013 09:35 )