Madagascar. Claudine Razaimamonjy intouchable car loin des yeux, loin des contrôles

Jeudi, 07 Avril 2016 08:56 Dossier
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Les gars, au train où vont les choses à Madagascar, il faut se faire une raison: tant que l’homme d’Antsofinondry sera au pouvoir, toutes les institutions mises en place dans cette IVème république ne serviront strictement à rien, étant donné que c’est lui qui a nommé tous les présidents et tous les directeurs généraux, de la HCC au Sénat, en passant par le Bianco, le Conseil supérieur de la magistrature et le Samifin et les chefs de région. Bientôt, c’est son parti Hvm qui nommera les chefs de quartier (« sefo fokontany »), tuant durablement la démocratie basée sur le suffrage universel.


Le mot « indépendant » s’associe, ici, à « indépendant de la volonté populaire ». Cependant, l’Histoire sera plus que têtue, sachant que LE TEMPS N’EFFACERA JAMAIS LES CRIMES COMMIS. D’autant plus qu’il s’agit de crimes commis envers le peuple qui forme la nation. Pensez à Pinochet, à Radovan Karadzic rattrapés par leur passé des décennies après. Si Philibert Tsiranana est déjà décédé, que Didier Ratsiraka et Marc Ravalomanana ne se croient pas totalement "sauvés" par une impunité "à la Malgache"... Pour l’heure, ce sont donc des faits (d’hiver ou d’été, on s’en balance) qui constitueront des preuves irréfutables dans un avenir immédiat. Car il n’y a plus de hasard lorsque ce sont les mêmes noms qui reviennent dans toutes affaires louches qui ont ponctué ces deux années au pouvoir du président Hery Rajaonarimampianina (larges rappels ICI).

Jeannot Ramambazafy – 07 avril de l’an des vaches maigres 2016

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Affaire Razaimamonjy Claudine: 10 marchés de 2.365 millions Ar

Non, Razaimamonjy Claudine n’a pas été arrêtée (lire notre édition du lundi 4 avril 2016: «Razaimamonjy Claudine: à rechercher et à arrêter»). Elle circule librement en ville contrairement à la demande de l’Inspection Générale de l’Etat (IGE) qui ne tolère pas que la co-propriétaire de l’hôtel A&C et bras droit du chef de l’Etat refuse de répondre à la convocation de ses agents pour s’expliquer sur des marchés publics à lui attribués.

D’après les documents en notre possession, il s’agit principalement des marchés réalisés dans la région de Fianarantsoa. Financés par des subventions exceptionnelles en date du 12 décembre 2014, il y a, par exemple, la construction du Tranompokonolona de la commune rurale d’Iavinomby Vohibola et du marché d’Alakamisy Ambohimaha pour respectivement 100 et 159 millions Ar. Trois mois auparavant, le 9 octobre 2014, le ministère de l’Intérieur a déjà débloqué des subventions exceptionnelles à 18 communes dont 8 aux alentours de la capitale du Betsileo.

La plupart des travaux sont des réhabilitations et équipements des bureaux des communes (Ialanindro, Fianarantsoa I, Mahasoabe, Ambalavao...) et la construction de marché à Kirano et la réhabilitation du bureau de la BMH à Vohimasina.

Au total, ces 10 subventions exceptionnelles se chiffrent à 2.356 millions Ar. Et d’après ce qu’on nous a laissés entendre, les 10 marchés publics financés par ces subventions auraient été toutes attribuées à Claudine Razaimamonjy et ses prête-noms. Le milieu des affaires de Fianarantsoa explique que l’entrepreneure a l’habitude de travailler à la tête d’un pool de sous-traitants ou de prête-noms, c’est selon, depuis qu’elle a commencé dans les affaires au début des années 2000.

La raison de la convocation de l’IGE ne pourrait être que la réalisation des travaux. Les commentaires entendus dans les milieux politiques interprètent cette « affaire » comme « un juste retour des choses de la part du président Rajaonarimampianina». « Ce n’est rien par rapport à ce qu’elle a fait pour l’élection du chef de l’Etat », ajoute-t-on. En clair, ces marchés seraient un moyen comme un autre de rembourser les fonds déboursés par Claudine Razaimamonjy pendant les campagnes présidentielles mais aussi municipales dans cette agglomération de Fianarantsoa. Dans ce schéma, il est normal que les marchés ne soient pas réalisés correctement et que les agents de l’IGE fassent leur boulot.

Au-delà des marchés attribués à Mme Claudine et consorts, nous encourageons d’ailleurs l’IGE à ne pas se contenter des sondages, mais de faire un contrôle systématique sur ces projets financés par des subventions exceptionnelles. Car outre les questionnements sur l’origine du financement exceptionnel, on remarque que les engagements sont à des… exceptions près, destinés en faveur des communes rurales éloignées. Loin des yeux, loin du contrôle?

Toujours est-il qu’il n’est pas exclu que les marchés attribués à Vohimasy Farafangana, Tsarahasina Port-Bergé ou encore Ankirihiry Mampikony ne soient pas attribués à des entrepreneurs locaux qui ont soutenu Hery Rajaonarimampianina pendant la campagne présidentielle. Au total, l’Etat a débloqué, au titre des subventions exceptionnelles pour les communes quelques 5.874 millions Ar dont 2.365 supposés attribués aux marchés de Claudine Razaimamonjy.

La récompense politique est, certes, la règle de par le monde et c’est un moyen comme un autre d’encourager sinon soutenir des initiatives. Mais qu’on le fasse dans les règles de l’art. Le sponsor et le bénéficiaire ont tous les deux intérêt à le faire. Dans la lignée de « Wikileaks » et de « Panama papers », l’opinion est friande de révélations.

Salomon Ravelontsalama

La Gazette de la Grande île, 06 février 2016

Mis à jour ( Jeudi, 07 Avril 2016 09:32 )