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Washington District of Columbia, 19 avril 2022. La rencontre, ce jour, du Président de la République de Madagascar, Andry Rajoelina, et du 19è administrateur de l’USAID (United States Agency for International Development - Agence des Etats-Unis pour le développement international), Samantha Power, a abouti à L’ANNONCE par celle-ci, sur son compte twitter officiel, d’un financement supplémentaire pour la Grande île de l’océan Indien.

Pour madagate, c’est cette annonce que nous retiendrons car il est dit : dans le doute, il faut s’abstenir. En effet, sur aucun site officiel de l’USAID, il n’est question de cette rencontre Rajoelina/Power. Sans les photos et les textes trouvés ici et là, après quelques recherches, le doute aurait été permis. Mais nous en saurons certainement plus au moment où ce «financement supplémentaire de 14 millions de dollars» sera effectivement débloqué, pour ce qui seront des détails de son utilisation.

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Du coup, les « Unes » de certains journaux malagasy en date de ce 21 avril 2022, sont trompeurs… Comme s’il s’agissait d’espèces sonnantes et trébuchantes. Loin de là sont les aides de l’USAID.

FROM THE AMERICAN PEOPLE

La majorité des fonds de l'USAID provient, comme le logo l’indique bien, du peuple américain (« American people »). C’est-à-dire que l’USAID est financée par tous les contribuables, les personnes en âge de payer des impôts, sur plus de 334 millions d’Américains (contre 28. 963.604 Malagasy), en cette année 2022. Sans entrer dans les détails, cela fait beaucoup de contribuables et beaucoup d’argent pour le gouvernement américain, seuls 10,5% des Américains là-bas sont considérés comme « pauvres ». Pour un journaliste comme moi, deux mois passés aux Etats-Unis (21 septembre au 08 novembre 2021) m’ont permis d’en savoir un plus que vous sur le mécanisme d’un état de droit réel... Ainsi, déjà, là-bas, le statut de contribuable repose sur la nationalité et non sur le lieu de résidence. Etre contribuable américain, signifie être dans l'obligation de déclarer chaque année ses revenus au fisc (Internal Revenue Service, l'IRS), quel que soit l'endroit où il habite et où il travaille.

A partir de là, chaque contribuable américain doit s’acquitter de trois impôts différents, pas forcément les trois en même temps. Un impôt fédéral (sans exception), un impôt d'État, un impôt local (dans certaines villes, comme New-York par exemple). Sachez que les United States of America, ce sont 50 États, plus le District of Columbia et cinq territoires dépendants, répartis sur 9,834 millions km². Que l’USAID soit, un jour, à court d’argent, relèverait de l’utopie. Non ?

Qu’est-ce que l’USAID ?

C’est une entité américaine chargée du développement économique et de l’assistance humanitaire à travers le monde. Elle a été créée, le 3 novembre 1961, par le Président John Fitzgerald Kennedy. L’idée de la création de l’USAID émanait du plan Marshall d’aide à l’Europe après la seconde guerre mondiale. A présent, l'USAID travaille dans plus de 100 pays pour :

- Promouvoir une prospérité économique largement partagée;
- Renforcer la démocratie et la bonne gouvernance;
- Protéger les droits de l'homme;
- Améliorer la santé mondiale,
- Promouvoir la sécurité alimentaire et l'agriculture;
- Améliorer la durabilité environnementale;
- Formation continue;
- Aider les sociétés à prévenir les conflits et à s'en remettre; et
- Fournir une assistance humanitaire à la suite de catastrophes naturelles et d'origine humaine.

Pelouse de la Maison-Blanche, le 8 juin 1962. Le Président Kennedy, s'adresse aux directeurs de l'USAID

« Il n'y a pas d'échappatoire à nos obligations : nos obligations morales en tant que leader avisé et bon voisin dans la communauté interdépendante des nations libres - nos obligations économiques en tant que peuple le plus riche dans un monde largement pauvre, en tant que nation qui ne dépend plus des prêts de l'étranger qui nous ont, autrefois, aidés à développer notre propre économie - et nos obligations politiques en tant que principal contre-pouvoir face aux adversaires de la liberté ».(John Fitzgerald KENNEDY)

A Madagascar, Le bureau de l’USAID a ouvert officiellement ses portes en septembre 1984. Ce, pour aider le peuple malagasy à réaliser ses objectifs de développement en dépit d’une conjoncture difficile. Depuis, le peuple des États-Unis d’Amérique apporte un soutien sous des formes très diversifiées au développement de la Grande île de l’océan Indien, dans les domaines de la Santé, de la Sécurité alimentaire, de l’aide en cas de catastrophe naturelle et de l’Environnement, à travers des Organisations non-gouvernementales, des Associations communautaires et d’autres groupements privés.

Et là perds mon latin et j’ai la mauvaise impression que l’entourage BCBG du Président de Madagascar ne maîtrise pas du tout les tâches qui lui sont attribuées. Et surtout pas le mécanisme de l’USAID. Ainsi, le 16 février 2021, l’agence américaine a organisé une réunion d’information au ministère des Affaires étrangères à Anosy. Ce, afin de présenter les grandes lignes de la nouvelle stratégie quinquennale de coopération au développement (CDCS) de l’USAID.

Ainsi, dans le cadre de ce nouveau plan stratégique, le gouvernement américain reste le premier partenaire au développement de Madagascar en allouant plus de 490 millions USD, au titre de l’aide au développement, s’étalant sur les cinq prochaines années -c’est-à-dire jusqu’en 2026-, dans l’optique d’aider la population malagasy à améliorer son bien-être et sa résilience et à mener Madagascar sur le chemin de l’autonomie.

Cette réunion a permis de connaître les trois objectifs qui seront le moteur des interventions de développement de l’USAID dans le cadre du CDCS, à savoir : Primo, une amélioration des capacités humaines ; Secundo, une amélioration de la redevabilité du gouvernement et, Tertio, un renforcement des opportunités économiques durables.

L’entourage du Président, et donc lui-même forcément, -il n’a pas le don d’ubiquité et ne peut être au four et au moulin, sinon à quoi sert la hiérarchie administrative publique ?- ne sont donc pas au courant du fait que la majorité des fonds de l'USAID est attribuée de manière compétitive grâce à des subventions, des accords de coopération, ou des contrats.  L'USAID n’accepte pas les propositions et les candidatures spontanées, en raison de ressources limitées, même pour les meilleures des propositions et des demandes. A moins que l’exception ne devienne la règle…

Aussi, l’annonce fait par Samantha Power, parlant de « financement supplémentaire » est plus que réaliste. Par ailleurs, et je me suis renseigné sur place, aux États-Unis, au niveau du gouvernement fédéral, on parle d’année fiscal pour tout ce qui touche l’argent. Ainsi, concernant l’année fiscale 2023, elle débutera le 1er octobre 2022. Avant cette date, il ne faut pas s’attendre à un déblocage de quoi que ce soit, surtout que des projets sont en cours qui ne s’achèveront qu’en 2023, si je ne parle que du projet « Hay Tao »…

En 2020, l’aide de l’USAID s’élevait à 133,5 millions USD, dont 74,5 millions dans des projets du secteur de la Santé dans lequel les États-Unis sont le plus grand pays donateur, et 48,5 millions pour la sécurité alimentaire où l'aide alimentaire américaine a aidé plus de 1,5 million de citoyens malagasy à survivre à la série dévastatrice de sécheresses qui a touché le sud de Madagascar. Le 14 décembre 2020, au Palais d'État d'Iavoloha, au nom du gouvernement américain, l'Ambassadeur des États-Unis Michael P. Pelletier a annoncé l'octroi d'un don à hauteur de 100 millions USD pour financer la lutte contre l'insécurité alimentaire dans le Sud et le Sud-Est de Madagascar.

Le 26 avril 2021, voici les déclarations de John Dunlop, Directeur général de l’USAID Madagascar : « Aujourd’hui, nous annonçons 7,5 millions USD supplémentaires qui serviront à nourrir la population, à soigner les enfants et les femmes enceintes qui souffrent de malnutrition et à essayer de remettre sur pied les agriculteurs. Nos projets permettront de fournir des vivres, de l’eau potable et des soins de santé à 46.000 individus. Nous fournirons un traitement à 13.000 enfants qui souffrent de malnutrition. Et 41.000 agriculteurs recevront des semences et d’autres aides, avec l’espoir que la prochaine saison culturale sera meilleure ». L’enveloppe de 7,5 millions USD annoncée, a financé les activités de deux Ong : Adventist Development and Relief Agency (ADRA) dans la région d’Ampanihy et Action Contre la Faim (ACF) dans les régions Atsimo-Andrefana, Androy et Anosy.

Il est grand temps d’arrêter de faire croire (et même de croire) que l’argent de l’USAID, c’est du comptant et en espèces sonnantes et trébuchantes voire en chèque. Facilement « détournable » par les détourneurs qui sévissent encore. C’est ce genre d’interprétation qui pousse les « opposants » à vouloir à tout… prix un « fiaraha-mitantana » afin de prendre part à je-ne-sais-quel festin (« miara-misaosy »). Pour l’instant, et pour longtemps, ils « miara-manonja » chacun de leur côté.

Enfin, aider le Président de la République, ce n’est pas faire semblant de tout savoir sans jamais rien connaître. Soyez honnêtes -et surtout honnêtes intellectuellement également- même si l’on sait que dans nos contrées, la démission n’est pas un réflexe majeur… Sinon, pour qui travaillez-vous réellement ?

LISTE DES ADMINISTRATEURS DE L’USAID ET DES PRÉSIDENTS AMÉRICAINS AU MOMENT DE LEUR MANDAT RESPECTIF

Dossier de Jeannot Ramambazafy

21 avril 2022