C’est à 84 ans et 4 mois que l’ancien président de la république, Didier Ignace Ratsiraka, officier supérieur de la marine, a tiré sa révérence. Né le 4 novembre 1936 à Vatomandry, il est décédé ce 28 mars 2021 à Antananarivo.
Que pourra-t-on retenir de celui qu’on surnomma « Deba » (contraction malagasy de chef de bande, patron, boss) ? D’abord une longévité sans précédent à la tête de Madagascar. En effet, Didier Ratsiraka a été président de la république élu, respectivement du 4 janvier 1976 (après le référendum du 21 décembre 1975) au 27 mars 1993, puis du 9 février 1997 au 6 mai 2002. Mais auparavant, de 1972 à 1975, après avoir été attaché militaire de l’ambassade de Madagascar en France, il aura été un brillant ministre des Affaires étrangères du gouvernement transitoire du Général Gabriel Ramanantsoa.
C’est en 1964 qu’il épouse mademoiselle Céline Velonjara qui lui donnera 4 enfants : Olga, Sophie, Annick et Xavier. Didier Ratsiraka demeurera pour la postérité le fondateur du parti AREMA (Avant-garde de la Révolution Malgache) et l’auteur du « Boky Mena » (petit livre rouge) qui n’est rien d’autre que la « Charte malgache de la Révolution socialiste ». On doit à l’Amiral Ratsiraka, la sortie de l’ariary de la zone Franc et une malgachisation mal comprise car bâclée. Ses idées de « paradis socialiste » et de « république humaniste écologique » ne resteront que des idées, hélas.
Didier Ignace Ratsiraka était-il un génie incompris ou bien un marin au long cours naviguant à vue à partir de plans purement théoriques ? Je ne sais pas. En tout cas, son ultime tentative de reconquête du pouvoir par les urnes, s’est soldé par un échec lors du premier tour de l’élection présidentielle, le 21 août 2018. Il ne recueillera que 0,45% de suffrages exprimés. Depuis, il se montrait parfois sur des chaines audiovisuelles pour donner son avis sur des sujets d’actualité. Sa dernière et ultime apparition a été le 17 mars 2021, à propos des vaccins contre le covid-19. Ci-après la transcription de son intervention.
« Je ne suis ni médecin ni soignant mais le privilège de l’âge et en tant qu’ancien président qu’il me soit permis de donner ici aujourd’hui mon avis sur le problème de vaccins contre le covid-19.
De la même façon qu’on n’a pas obligé les gens à se faire vacciner contre la poliomyélite mais on a utilisé la persuasion, on ne peut non plus, il me semble, obliger les gens à se faire vacciner contre le covid-19.
Mais, Ã contrario, on ne peut pas non plus interdire aux gens de se faire vacciner contre ce dangereux virus. Nul ne peut jouer avec la vie de nos concitoyens.
Personnellement je ne peux pas inciter les gens à utiliser ni le vaccin BioNTech de Pfizer qui demande une réfrigération à moins de 80 degrés (donc difficile à mettre en œuvre) ni l’AstraZeneca de l’université de Oxford qui cause polémique actuellement et émet trop de doutes et interrogations à son sujet.
Il y a pléthores de vaccins entre Moderna, celui de Johnson & Johnson, le vaccin chinois, celui des russes etc... sur le marché.
Pardonnez mon outrecuidance si j’ai pu vexer ou incommoder des gens par cet avis mais je me devais de donner mon opinion.
Votre serviteur »./.
Didier RATSIRAKA
Antananarivo, 17 mars 2021
Enfin, il ne sera pas inutile de répéter que les voies du Seigneurs sont insondables. En effet, Didier Ignace Ratsiraka nous quitte trois jours après le décès de notre confrère Gilbert Harisoa Rajarizatovo, le 25 mars 2021. Celui-ci avait organisé un face-à -face avec l’amiral, en 1996, il y a un quart de siècle, dans l’émission « Imaso » sur la télévision nationale malagasy Tvm. Là où ils sont, à présent, leurs échanges seront éternels.
Au nom de l’équipe de madagate, je présente mes plus profondes condoléances à toute la famille sans exclusive de Didier Ignace Ratsiraka l'érudit patriote à sa manière. « Marina tsy izany vaha !? ». Pour la petite histoire, c’est lui qui a donné l’ordre aux fédéralistes de me libérer lorsque j’ai été pris en otage à Diego Suarez en1991. Oui, la vie d’un journaliste professionnel n’est pas de tout repos. Et comme le dit un proverbe saharaoui : « Nous aurons toute la mort pour dormir ». « Deba » nous a devancés, aujourd’ui, mais son nom se trouve dans tous les dictionnaires et encyclopédies depuis 1976.
Jeannot Ramambazafy