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Madagascar : La quadrature malgache par François Guicharaz

FRANCOIS GUICHARDAZ

Madagascar est décidément une terre pleine de surprises!

Un président de la transition qui renonce à courir ses chances au sprint final du dernier marathon électoral... mais promet de revenir, un amiral dont on ne sait toujours pas s'il brûle ses vaisseaux ou tente un coup de Trafalgar, un nabab de l'industrie agro-alimentaire qui louvoie par avatars interposés (contagion marine?), jamais la politique malgache n'a autant cultivé l'art de la complication.

L'heure ne se prête pourtant pas aux intrigues machiavéliques à la sauce malagasy, mais devrait au contraire inciter les protagonistes majeurs des prochains scrutins – ayons garde de ne pas oublier les législatives – à se détourner résolument de la politique du pire pour ne pas accabler davantage un pays hélas déjà à genoux.

Comment une terre riche d'une civilisation à la fois ancienne et sophistiquée, bien antérieure à la colonisation, ayant instauré un pouvoir unitaire et centralisé, ayant créé une identité nationale forte à partir d'une langue vernaculaire commune, ce qu'aucun autre pays de la zone n'a jamais réussi à faire en dehors de l'adoption de la langue du colonisateur, comment ce pays si prometteur a-t-il pu se retrouver en queue de peloton des pays les plus pauvres?

Les méandres de l'actuelle élection présidentielle en illustrent à merveille la triste logique. La sémantique offre en la circonstance de bien étonnants rapprochements entre deux Quatrièmes Républiques, l'une encore en gestation à Madagascar, l'autre défunte depuis plus d'un demi-siècle, la française. Un point commun essentiel à ces deux édifices institutionnels: une irrésistible attraction pour un fonctionnement chaotique, impulsé par une incapacité chronique à créer les conditions d'un consensus national. Guerre froide en Europe dans les années 50, opposition frontale de deux conceptions de la gouvernance, régime autoritaire contre démocratie parlementaire sur la Grande Île au cours des trois dernières décennies: les analogies sont frappantes. Le mal malgache ressemble étonnamment au mal français.

Fabriquer du consensus est pourtant l'élixir de longévité des démocraties les plus avancées et accessoirement les plus prospères. Europe du Nord contre Europe du Sud, l'opposition est en encore aujourd'hui pertinente. Sait-on que la Suède, la Norvège et le Danemark faisaient figure de parents pauvres du Vieux Continent à l'aube du vingtième siècle ? Nous sommes - géographiquement - bien loin du canal du Mozambique, mais la leçon vaut au delà des distances: des réformes de fond, la refondation d'un état de droit sur des bases saines, c'est-à-dire conçues comme pérennes et acceptées formellement et sans arrière-pensées manipulatrices par les grands camps politiques, sont les constituants incontournables du passage à une démocratie adulte respectueuse de la séparation des pouvoirs, seule forme de gouvernance apte à conduire à un développement harmonieux au service des citoyens et non plus des seuls dépositaires de la puissance régalienne.

Les prochains scrutins devraient être l'occasion rêvée d'ouvrir cette page et d'écrire enfin le chapitre du décollage de Madagascar. Quel que soit le prochain président, il devra gouverner avec l'assemblée sortie des urnes en même temps que lui. La simultanéité entre le deuxième tour de l'élection présidentielle et le scrutin législatif n'a rien d'anodin.

Les électeurs exprimeront ce jour là sans ambiguïté l'orientation qu'ils souhaitent imprimer à la politique économique et sociale du pays: l'assemblée pourra être de la couleur du président, sa composition pourra tout aussi bien contrebalancer le choix présidentiel. Le morcellement de la scène politique malgache pourrait paradoxalement permettre la constitution d'une large majorité d'idées se retrouvant sur un programme de redressement national susceptible de convaincre entrepreneurs domestiques, investisseurs internationaux et bailleurs de fonds.

Madagascar a aujourd'hui besoin de restaurer un statut international cruellement mis à mal non pas par la seule transition, mais d'abord par les manœuvres inconséquentes – pour rester modéré dans les termes – de la plupart des hommes forts des trente dernières années. Sans contrat de gouvernement entre les dirigeants apparents ou réels des principaux partis – n'hésitons pas à rêver – il y a fort à parier que la Grande Île retombera dans l'ornière des combinaisons politiciennes de circonstance qui l'ont menée à la sortie de route. Les malgaches méritent infiniment mieux qu'une ènième mouture de «Règlement de comptes à Zébu Corral».

Là se situe le nœud de la quadrature malgache. Une conférence des Quatre (par ordre alphabétique Andry Rajoelina, Didier Ratsiraka, Marc Ravalomanana, Albert Zafy), parfois évoquée, pourrait ramener un semblant d'ordre dans la cour de récréation.

Quoi que l'on pense des mérites et performances respectifs de ces quatre animaux politiques, force est de reconnaître qu'ils ont su parfois faire preuve d'un talent certain. Rien ne pourra se faire à Madagascar sans leur concours.

Si la satisfaction de Lady Ashton et de «Comrade Bob», le plus vieux despote du continent africain, orfèvre incontesté du naufrage économique et du pillage en règle de son propre pays, ne sont qu'un maigre viatique, les approbations du processus de sortie de crise par l'Union Européenne comme par la SADC peuvent avoir leur utilité.

Moyennant un accord entre les quatre grandes mouvances du paysage politique malgache, même a minima, sur la conduite de réformes structurelles de la gouvernance économique, il serait logique que l'UE débloque les fonds qu'elle a promis à une future Quatrième République stabilisée et ouvre ainsi la voie à d'autres "financeurs".

Quant à la gouvernance stricto sensu, c'est-à-dire la conduite des affaires de l'État, un accord des partis – évitons le terme bien vague de mouvance – regroupant une très large majorité des électeurs malgaches est un impératif absolu pour éviter qu'une future majorité d'alternance ou de circonstance jette à bas ce qui aura été laborieusement construit sur le front des institutions comme sur celui de l'appareil économique. Le retrait des candidats contestés ne signifie pas pour autant la mise hors-jeu de leurs mouvements. Ce serait même une formidable occasion d'inventer la pratique d'un pouvoir partagé entre exécutif et législatif pendant la phase, qui risque d'être longue, de la reconstruction du pays.

La minceur de leurs corps de doctrine – encore un point commun avec la France dont les partis qui ont depuis longtemps remisé les idées au magasin des accessoires – devrait permettre à leurs chefs de passer outre leurs susceptibilités pour mettre Madagascar sur les rails d'une croissance endogène durable.

Madagascar dispose d'élites relativement nombreuses, sur place et dans la diaspora, bien formées et ouvertes sur le monde. C'est loin d'être le cas de la quasi totalité des pays de la zone et c'est un atout bien réel pour sortir du cycle infernal crises politiques-crises économiques-bouleversements institutionnels qui l'ont ruinée. Madagascar la démocrate peut parfaitement réussir le pari si la «Bande des Quatre», qui espérons-le connaîtra un destin moins funeste que son homonyme chinois, y prête la main, par exemple en avalisant la constitution des listes électorales et en en confortant la légitimité.

33 aspirants-président, 893 aspirants-députés: Madagascar ne vit pas franchement sous le régime du parti unique. La disqualification de quelques candidats réputés «trublions» ne transformera pas la Grande Ȋle en dictature tropicale. Bonnes ou mauvaises, les raisons de leur éviction ne relèvent pas de l'arbitraire, mais de positions juridiques peut-être contestables, mais dans tous les cas étayées. La seule vraie question est celle de l'opportunité de ces mises hors-jeu.

Le défi des prochaines autorités malgaches sera d'intégrer sans réticences les courants représentant les «trublions» dans le jeu politique et de les associer aux processus de décision. La recherche de consensus pour mettre en œuvre l'indispensable redressement national n'est ni une vue de l'esprit ni une obscénité. C'est au contraire la condition indispensable à la fondation d'un socle de bonne gouvernance amené à perdurer au delà des alternances, au dessus des particularismes régionaux.

À Madagascar comme dans toutes les démocraties, la gauche n'est pas la droite, la droite n'est pas la gauche; mais à moins de vouloir renverser la table à chaque changement de majorité, un accord général des grandes forces politiques sur le mode de fonctionnement et l'étendue des pouvoirs de l'état peut seul garantir stabilité institutionnelle et développement économique et social. Candidats ou non, les chefs des grands partis seraient bien inspirés de méditer cette leçon: c'est par leur volonté, sans arrière-pensée boutiquière, de légitimer enfin la Quatrième République que Madagascar sortira de l'ornière et redeviendra une voix écoutée – et appuyée - dans les enceintes internationales.

Vendredi 21 août 2013, François Guichardaz, analyste

Mis à jour ( Samedi, 31 Août 2013 00:46 )  
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