INSTITUT PASTEUR DE MADAGASCAR
Précisions sur les cas de peste dans la Commune Urbaine d’Antananarivo
- 06 février 2015 -
Au cours de la semaine du 2 février, de nombreux articles au sujet de la peste ont été publiés dans la presse nationale. En tant qu’acteur de la Santé Publique à Madagascar, l’Institut Pasteur de Madagascar (IPM) tient à apporter des précisions sur les données avancées.
Situation actuelle de la peste dans la commune urbaine d’Antananarivo
Contrairement à ce qui a été annoncé dans la presse et diffusé à grande échelle, durant la période du 4 août au 29 décembre 2014, il n’y a pas eu treize (13) cas suspects de peste identifiés dans la commune urbaine d’Antananarivo.
En effet, au cours de cette période du 4 août au 29 décembre 2014, sur les neuf (9) cas de pestes déclarés un (1) seul cas a été confirmé, un (1) cas était probable, et les tests effectués sur les sept (7) autres ont montré qu’ils n’étaient pas atteints de peste.
L’IPM tient à ajouter que depuis le début de l’année 2015 et jusqu’au 5 février, aucun cas de peste n’a été confirmé dans la commune urbaine d’Antananarivo.
Le nombre total de cas de peste pour toute l’année 2014 à Madagascar reste sensiblement le même que les années précédentes.
A propos de la peste
La peste est habituellement transmise à l’homme par des piqûres de puces qui se sont infectées sur des rats porteurs de la bactérie Yersinia pestis. Elle se manifeste alors sous sa forme bubonique, avec de la fièvre et des ganglions qui grossissent et sont douloureux. Lorsque la peste bubonique n’est pas traitée à temps, elle peut se transformer, en environ une semaine, en septicémie (infection du sang) puis en peste pulmonaire qui peut alors être transmise directement et beaucoup plus rapidement, d’humain à humain. Dans ce cas, la maladie puis la mort peuvent survenir en deux à trois jours seulement. L’accès au diagnostic et au traitement est un point critique. L’IPM fournit gratuitement un test de diagnostic rapide pour toutes les structures sanitaires du pays qui en ont besoin. Cependant, quand les patients consultent trop tardivement la maladie atteint un stade où le traitement antibiotique n’est plus toujours complètement efficace.
Il existe des variations naturelles de la circulation de la peste qui dépendent de facteurs climatiques, environnementaux, mais aussi des pratiques humaines. “La peste conserve les positions où les conditions biologiques permettaient son implantation définitive et se retire d’une bataille en apparence perdue avec un bilan de victoire. Solidement implantée désormais en de nombreux points du monde, elle y attend à partir de bases multipliées, la prochaine erreur de l’homme.” Marcel Baltazard – 1960. L’élimination de la peste n’est pas possible à Madagascar car son réservoir dans le sol et chez les rongeurs ne peut être détruit, mais il est possible de diminuer sa transmission à l’homme, de contrôler son extension et d’éviter la grande majorité des décès. L’accès rapide à un diagnostic et à un traitement efficace de la peste devrait permettre d’éviter la plus grande partie, si ce n’est la totalité, des décès par la peste. Le renforcement des mesures de santé publique ont réduit très fortement la morbidité et la mortalité dues à cette maladie. Plus la lutte contre les rats et les puces est intense et efficace, plus le risque de peste est réduit.
La stratégie de Madagascar contre la peste est souvent donnée en exemple mais sa mise en œuvre se heurte à des problèmes d’organisation et de logistique que les crises économiques et sociales que notre pays connait depuis de nombreuses années peuvent aisément expliquer. Le problème récurrent de la gestion des ordures et de l’insalubrité de l’habitat contribue aussi à augmenter le contact entre les rats, leurs puces et les humains… multipliant les occasions de transmission de la peste à l’Homme. C’est ce qui pourrait expliquer la ré-emergence de la peste il y a quelques mois dans des quartiers d’Antananarivo après 7 ans de silence.
Les rites funéraires traditionnels qui impliquent un contact avec le corps du défunt sont alors à très haut risque de transmission. C’est pour cette raison que les corps doivent être désinfectés et enterrés à part dans des conditions assurant la sécurité des vivants… mais qui sont parfois mal acceptées par les familles.
Pour limiter le nombre de cas et de décès par peste, il est bien sûr nécessaire d’améliorer l’hygiène et la lutte contre les rats et les puces avec des insecticides adaptés, mais aussi l’accès aux traitements en formant le personnel médical, ce qui a été fait par le Ministère de la santé et l’IPM, et en sensibilisant la population sur les manifestations cliniques de la peste, sur le recours rapide à des soins appropriés et sur l’adoption de pratiques funéraires sûres qui n’exposent pas les vivants à une contamination. Notons que le traitement antibiotique et les tests de diagnostic rapide pour la peste sont gratuits dans toute l’île.
À propos de l’Institut Pasteur de Madagascar
L’Institut Pasteur de Madagascar (IPM) est l’établissement scientifique privé malgache sans but lucratif et reconnu d’utilité publique du réseau international des Instituts Pasteur, placé sous le Haut patronage du Ministère de la santé de Madagascar. Créé en 1898 et régit par la convention de 1961 qui lie l’Institut Pasteur à Paris et le Ministère de la santé de Madagascar, il remplit les missions suivantes :
1) la santé publique au travers de ses centres de référence OMS ou nationaux, d’expertises, d’investigations d’épidémies et d’interventions,
2) la recherche directement appliquée aux priorités de santé nationales, essentiellement en microbiologie et en épidémiologie des maladies infectieuses,
3) la formation et l’enseignement, et
4) le diagnostic et la lutte au bénéfice direct de la population (Centres de traitement antirabique gratuit pour l’ensemble de la population de Madagascar, Centre International de Vaccination, Centre de Biologie Clinique, Laboratoire d’Hygiène des Aliments et de l’Environnement).
Ses activités s’étendent à Madagascar et aux pays de l’Océan Indien. Ses experts et ses chercheurs sont aussi appelés à intervenir sur le continent Africain, en Europe ou en Amérique.
L’ensemble des activités est soumise à une politique d’assurance qualité et plusieurs laboratoires ou activités sont accrédités (COFRAC, OMS/WHO…).