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Antsiranana : la mort était au rendez-vous pour Maria et Mourtaza Darougar

Maria et Mourtazar avaient vraiment toute la vie devant eux. Mais la mort n'épargne personne

A la suite d'un cambriolage à mains armés survenu le 20 juillet dernier en début de soirée rue Colbert, en plein centre-ville d'Antsiranana, un jeune couple venu assister la famille dérobée croisait la route des six malfaiteurs sur le départ, lourdement armés et en combinaisons militaires. Cette funeste rencontre se soldera par le double meurtre du jeune couple, criblé de balles à l'intérieur de leur véhicule.

Depuis vendredi 20 juillet, la stupeur, l'abattement et un profond sentiment d'injustice règnent à Antsiranana, capitale et principale ville de la Région de Diana, au Nord de Madagascar. Peu avant 20 heures ce jour-là, au croisement de la rue Colbert et de la rue Sadi Carnot, au cœur de Diego-Suarez, six hommes armés de kalachnikovs menaçaient en pleine rue une famille indienne de retour de la mosquée avant de les prendre en otage et de s'introduire manu militari dans leur domicile. Pendant que deux des malfaiteurs restaient à l'extérieur pour monter la garde, n'hésitant pas selon les voisins à tirer des coups de feu en l'air pour éloigner les passants, les quatre autres malfrats ont dérobé deux millions de FMG et des bijoux avant de quitter le domicile d'une famille traumatisée par une agression qui aura duré près de vingt minutes au total. Au même moment, Maria, Mourtaza Darougar et une troisième personne qui préfère à ce stade de l'enquête policière rester anonyme cherchaient une place de stationnement légèrement plus bas dans la rue Colbert, au niveau de l'Alliance française, pour rejoindre un petit groupe d'amis venu se rassembler dans l'établissement La Gelateria. Prévenus par un chauffeur de taxi de l'agression se déroulant à quelques centaines de mètres de là, les trois redémarrent leur véhicule en trombe pour porter assistance à la famille agressée. Il est à peine 20h05 quand ils tombent nez à nez sur les cambrioleurs sur le départ. Selon la version des victimes du cambriolage et du troisième occupant de la voiture, version confirmée par les policiers chargés de l'enquête, Mourtaza Darougar, au volant du véhicule, percute un des agresseurs qui mitraillent la voiture en approche avant de perdre le contrôle de son automobile. Les cambrioleurs criblent de balles le véhicule immobilisé avant de prendre la fuite. Grièvement blessée au niveau du cœur, Maria Darougar décèdera quelques minutes plus tard tandis que son mari sera pris en charge par sa famille et transporté à l'hôpital principal de la ville, où il décédera à son tour des suites de ses blessures près d'une heure plus tard. Le père de famille cambriolé sera également touché par balle au pied au cours de la fusillade tandis que le troisième occupant de la voiture mitraillée sortira miraculeusement indemne de cette agression.

Police injoignable

Les victimes de cette fusillade, Maria et Mourtaza Darougar venaient de se marier le 7 juillet dernier. Ils étaient respectivement âgés de 21 et 23 ans. D'origine indienne et de confession musulmane, le jeune couple était en pleine célébration de leur mariage quand ils ont croisé la mort. Ce morbide fait divers alimente depuis à Diego-Suarez les rumeurs les plus diverses sur l'identité des agresseurs, opérant en tenues militaires et armés de kalachnikovs, d'autant que toutes les personnes interrogées n'hésitent pas sous couvert d'anonymat à dénoncer l'inaction de la police diégolaise, injoignable par téléphone au moment de l'agression malgré une multitude d'appel du voisinage et de proches de la famille cambriolée. « Pendant la fusillade, on a un moment cru que l'armée était en train d'appréhender un voleur de voiture. Leur efficacité et leur détermination indique qu'il s'agit certainement d'hommes entrainés au maniement des armes, précise un voisin, impuissant témoin de la scène. Reste à déterminer qui est à l'origine de ce drame et qui a pu fournir des armes de guerre aussi facilement. »

Un suspect interrogé

Un suspect est actuellement interrogé dans les locaux de la police diégolaise. Blessé à la hanche et à la jambe, il a été appréhendé à l'hôpital principal de Diego-Suarez dans la nuit du drame. Son gabarit et son signalement correspondrait à ceux d'un des malfrats postés à l'extérieur de la maison cambriolée et percuté par la voiture de Mourtaza Darougar, d'après les principaux témoins de la scène. Le suspect quant à lui réfute en bloc les accusations et attribue ses blessures à un accident de la route. Il aurait été percuté par une voiture en état d'ébriété et ne se souviendrait de rien avant son réveil à l'hôpital. Mais aucun accident de la route n'a été enregistré par la police dans la soirée de vendredi et aucune famille n'aurait pour le moment signalé de disparition. De quoi exaspérer les familles des victimes, qui s'inquiètent à présent du manque d'avancée de l'enquête et craignent que ce double meurtre ne soit classé sans suite, faute de preuve concrète et de témoignage à charge.

« A qui le tour ? »

Ce double homicide alimente le sentiment d'insécurité et d'impuissance des habitants de d'Antsiranana face à une recrudescence des agressions armées ces derniers mois, favorisés par de fréquentes coupures d'électricité dans la plupart des quartiers de la ville. « On se demande à présent qui sera le prochain sur la liste », lance un commerçant de la rue Colbert. « Tout le monde s'accorde à dire qu'il faut faire quelque chose, que ce sentiment d'impunité totale doit cesser, mais que faire concrètement ? Une marche de contestation qui regrouperait l'ensemble des habitants ? Mais la population est-elle prête à se mobiliser en ce sens ? », s'interroge encore un autre voisin du drame, affligé par un tel déferlement de violence désormais récurrente à Diego-Suarez.

Mourtaza Darougar

« Il aurait pu survivre » Un cousin de Mourtaza Darougar l'affirme sans ambages, une aide médicale efficace aurait pu sauver le conducteur du véhicule criblé de balles. Blessé à la poitrine lors de la fusillade, Mourtaza Darougar a été transféré au CHRP d'Antsiranana dans les minutes qui ont suivi l'agression. « Mais aucun chirurgien n'était présent ce soir-là, déplore un cousin de la victime. L'hôpital était en grève et mon cousin n'a été pris en charge et amené au bloc de réanimation que trop tard par des infirmiers de garde. » Mourtaza Darougar ne survivra pas à ses blessures. Il sera déclaré mort par le personnel médical près d'une heure après son agression, à 21h14.

Hadrien Saez

Je connaissais bien Monsieur Darougar père, lorsque j'étais correspondant de Madagascar Tribune à Diego Suarez, dans les années 1980. Ce double meurtre avait déjà fait la Une de certains journaux de Madagascar.

Au nom de toute l'équipe de www.madagate.com et en mon nom personnel, j'adresse mes sincères condoléances aux familles de Maria et Mourtaza

Jeannot Ramambazafy

Mis à jour ( Jeudi, 26 Juillet 2012 07:38 )  
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