Dossier préparé et mise en ligne Par Jeannot RAMAMBAZAFY – www.madagate.com
Avec des images en boucle, les mêmes sur Tvm et Mbs -stations incendiées le 26 janvier mais rapidement rétablies par Marc Ravalomanana-, ce dernier évoque l’article 44 de la Constitution malgache pour tenter un ultime sursaut afin de se maintenir au pouvoir. Fers de lance : le respect de la Constitution, la tenue du prochain sommet de l’Union africaine à Ivato et la confiance des bailleurs de fonds. Décidément, il n’y a pas pire aveugle que celui qui ne veut voir et pire sourd que celui qui ne veut entendre et même sentir les bruits et les odeurs de la pauvreté d’un peuple opprimé.
Le samedi 30 janvier 2009, à la question d’un journaliste étranger : « Le dialogue est-il rompu avec le maire d’Antananarivo ? », M. Ravalomanana a répondu : « Ca y est là  ! Il a dépassé la limite ! ». Que dit l’article 44 dont Ravalomanana se prévaut ?
Article 44 - Le Président de la République est le Chef de l'Etat.Â
A ce titre, il veille au respect de la Constitution. Il est le garant de l'indivisibilité de la République. Il est le garant, par son arbitrage, du fonctionnement régulier des pouvoirs publics, de l'indépendance nationale et de l'intégrité territoriale. Il veille à la sauvegarde et au respect de la souveraineté nationale tant à l'intérieur qu'à l'extérieur. Il est le garant de l'Unité nationale. Le Président de la République assureces missions dans le cadre des pouvoirs qui lui sont conférés par la présente Constitution.
Et alors ? Qui lui a prêté ces pouvoirs qu’il bafoue sans état d’âme d’année en année, sinon le peuple qu’il berce d’illusions pseudo religieuses ?
Les Tts vaincus, le gouvernement a utilisé des chars et l’artillerie lourde pour décapiter et interdire le Kung Fu à Madagascar. Il y eut plusieurs morts. Il y eut aussi les jeunes qui avaient érigé un barrage à Brickaville en 2002, rackettant tout le monde au passage. Cette pratique se poursuit actuellement, à travers les chefs fokontany Tim et des personnalités haut placées.
Ils devraient savoir que tout le monde, de nos jours, possède un téléphone portable et que toutes les actions suspectes sont transmises à qui de droit. Aussi, ils doivent éviter de se salir encore plus « satria ny mpamosavy mandeha alina aza misy mahita » (même les sorcières sortant la nuit sont vues par des témoins oculaires – proverbe bien malgache).
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La Constitution de 1992 n’est plus, vive la Constitution Ravalomanana !
Déjà triomphalement réélu dès le 1er tour, le 3 décembre 2006, avec 54,79% des voix, le Président Marc Ravalomanana a ainsi demandé et obtenu du peuple malgache le pouvoir de façonner la Constitution. La nouvelle donne n’est pas sans rappeler celle que le Général Charles de Gaulle avait réussie à imposer en 1962 à la classe politique française. Comme le fondateur de la Vème République française, Marc Ravalomanana a fait plébisciter sa Constitution : D’une part, le texte de la Constitution a fait l’objet d’une révision sur-mesure ; d’autre part, une lecture présidentialiste de la Constitution a prévalu dans la foulée de la révision.
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Le texte de la Constitution Ravalomanana
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La Constitution Ravalomanana est née formellement de la troisième révision de la Constitution du 18 septembre 1992, initiée par le troisième Président de la IIIème République. Elle couronne un processus de « déconstruction continue » de la Constitution parlementariste de 1992.
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La Constitution Ravalomanana en action Â
Loin d’infléchir le texte de la Constitution Ravalomanana, la pratique récente des institutions à Madagascar le sublime. En témoigne la dissolution de l’Assemblée Nationale, décidée par le Président de la République par décret n°2007-717 du 24 juillet 2007. Selon l’article 95 de la Constitution, « Le Président de la République peut dissoudre l'Assemblée nationale pour des causes déterminantes ». Autrefois, sur le modèle de la IV° République française, la dissolution, décidée en Conseil des ministres, ne pouvait sanctionner que la survenance de deux crises ministérielles au cours d’une période de 18 mois.  La révision de 1998 a fait sauter ce verrou : le droit de dissolution est désormais une prérogative du Président de la République et de lui seul ; toutefois, des « causes déterminantes » conditionnent son exercice régulier. Une telle obligation de motivation est-elle de nature à limiter le pouvoir présidentiel ? Il semble bien que non, à la lecture de l’Avis n°02-HCC/AV du 19 juillet 2007, formulé par la Haute Cour Constitutionnelle, à la demande du Président Ravalomanana :
Considérant, d’une part, que la compétence pour dissoudre l’Assemblée Nationale figure parmi les pouvoirs propres du Président de la République ;
Qu’en ce sens, le Président de la République est seul habilité à procéder à la dissolution de l’Assemblée Nationale ;
Considérant, d’autre part, qu’aussi bien dans l’esprit du constituant que dans la lettre de la Constitution, le Président de la République reste le seul juge de l’opportunité de la mise en œuvre du droit de dissolution et apprécie les causes déterminantes pour y procéder, indépendamment de toute idée de conflit ou de sanction mais, en tout cas, pour des motifs relevant de l’intérêt supérieur de la Nation ;
Considérant que dans la conjoncture actuelle, suite à l’adoption de la révision constitutionnelle, le fonctionnement régulier des pouvoirs publics est conditionné par la conformité des Institutions aux nouvelles dispositions constitutionnelles ;
Que le Parlement doit nécessairement refléter la nouvelle organisation territoriale de l’Etat ;
Qu’ainsi, le renouvellement des membres de l’Assemblée Nationale semble devoir s’imposer pour la mise en œuvre de la politique générale de l’Etat arrêtée en Conseil des Ministres et que, par conséquent, les motifs invoqué relèvent bien de l’intérêt général et ne sont pas contraires aux dispositions constitutionnelles ».
Il ressort clairement de cet avis de la Haute Cour Constitutionnelle qu’à Madagascar le Président de la République est doté d’un droit discrétionnaire de dissolution, que ce droit n’est pas substantiellement différent que celui conféré à son homologue de France, nonobstant la notion de « causes déterminantes ».
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En fait donc, c’est une Constitution pourrie jusqu’à la moelle que Marc Ravalomanana et les grandes puissances financières du monde veulent faire respecter. Moi, je hurle : respectez plutôt le devenir de mon peuple ! Ces bases mêmes de la Nation malgache sont tellement brinquebalantes qu’aucun régime ne pourrait être longtemps à l’abri du genre de situation qui prévaut actuellement. Les enjeux ne sont plus les mêmes. Tout est axé sur l’orgueil d’un homme qui entend devenir le président de l’Union africaine. Ne cherchez pas plus loin. Mais, entre-temps, il a commis l’irréparable : il a trahi le pays tout entier en cédant des terres à des étrangers, se croyant tout permis. Grâce, justement, à Sa Constitution.
Lisez plutôt :
« Partant de la composition actuelle des deux chambres du Parlement où le parti au pouvoir TIM représente la majorité absolue, la mise en place de cette Haute Cour de Justice est loin de constituer un danger pour les hauts dignitaires du régime. Les procédures de saisine rendent impossible le déclenchement des poursuites. En ce qui concerne par exemple le président de la République, il n’est responsable des actes accomplis dans l’exercice ou à l’occasion de l’exercice de ses fonctions qu’en cas de haute trahison ou de violation grave et répétée de la Constitution. D’abord, la question est de savoir quand est-ce qu’il y a haute trahison ou violation grave et répétée de la Constitution. Ensuite, le président de la République ne peut être mis en accusation que par les deux Assemblées parlementaires statuant par un vote séparé, au scrutin public et à la majorité des deux tiers des membres composant chaque Assemblée. Or, que ce soit à l’Assemblée nationale ou au Sénat, plus de deux tiers des membres sont acquis au président de la République. Quant aux autres justiciables de la Haute Cour de Justice, l’initiative de la procédure de poursuite émane du procureur général de la Cour de Cassation. Or, ce procureur général de la Cour de Cassation est une personnalité désignée par le président de la République ». (Madagascar Tribune). Et c’est cette Constitution là qu’il faut respecter ?
Voici ce qu’il faut savoir sur la Terre-des-Ancêtres ou « Tanindrazana ».
TANINDRAZANA
Le prince Rakotoseheno-dRadama (« Printsy Rakoto »), né le 23 septembre 1829, est le fils de la reine Ranavalona I et de son deuxième époux, le général Andriamihaja (premier ministre en 1828). La reine le présenta comme le fils du roi Radama I, bien qu’il soit né quatorze mois après la mort de celui-ci. De ce fait, le 8 octobre 1860, il est déclaré héritier légitime du royaume, sur la place d’Andohalo. Le 23 septembre 1861, à la mort de la reine, il est couronné roi à Mahamasina, sous le nom de RADAMA II. Un traité d’amitié franco-malgache, signé avec Napoléon III, le reconnaît « Roi de Madagascar ». Par la suite, d’autres traités signés avec la Grande-Bretagne et les autres puissances européennes, en font de même.
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« En août 2003, l'État malgache soucieux de booster l'investissement, assouplit la loi foncière. Les investisseurs étrangers, peuvent désormais, sous certaines conditions et dans des secteurs bien définis (tourisme, immobilier, banque ou assurance) acheter des terrains (25.000 m² au maximum à cette époque là ). Ils doivent notamment investir un minimum de 500.000 dollars. Parallèlement, les chefs des 22 régions, nommés directement par le président de la République, Marc Ravalomanana, ont reçu mission de trouver des financements pour leurs circonscriptions respectives. Une loi sur les domaines privés nationaux les autorisant à délimiter des terrains pour les besoins de la région, certains ont réservé des parcelles à louer ou à vendre pour attirer des investisseurs. La colère de la population ne s'est pas fait attendre ». (Syfia Madagascar).
Ainsi, Marc Ravalomanana restera dans l’Histoire de Madagascar comme le président qui a osé promulguer une loi permettant la vente de la Terre-des-Ancêtres aux étrangers et d’initier une vente déguisée en bail emphytéotique d’une superficie de 1.300.000 ha au profit de la compagnie Daewoo Logistics et ce, sans contrepartie financière publiquement connue. Mais le pire est qu’il n’en a pas informé le peuple malgache, censé être souverain selon la Constitution. Le pot-aux-roses a été découvert de l’extérieur du pays par un article du renommé magazine « Financial Time ». Rien que pour çà , Marc Ravalomanana ne mérite plus d’être aux commandes de Madagascar. Ne nous attardons pas sur le Boeing « Air Force One » 737-700 à 60 millions de dollars dont on ignore à qui il appartient réellement et d’où proviennent le pactole de son achat… On ne peut étouffer longtemps la vérité. Les hommes passent et trépassent mais les idéaux sont éternels. Malheur à celui par qui le scandale arrive. C’est dans la Bible, non ?
 Actuellement, qu’on le veuille ou non, Madagascar revit à la fois les évènements de 1991 (« Tsy hiala aho ! », je ne partirai pas ! avait insisté Ratsiraka) et de 1995 (empêchement du président Zafy) avec un zest de 2002 (autoproclamation de Ravalomanana). Dernière question pour toutes les entités toujours soucieuses du respect de la Constitution : il vous faudra combien de morts encore avant d’ouvrir les yeux et fermer les robinets financiers ?Â
Enfin, pour rafraichir les mémoires, voici un condensé de l’avènement de cet énième dictateur qui s’ignore :
L'élection présidentielle de décembre 2001, opposant le chef de l'État sortant, Didier Ratsiraka, à Marc Ravalomanana, homme d'affaires influent et maire d'Antananarivo, fait basculer le pays dans l'anarchie. Plus familier des affaires que de la politique, M. Ravalomanana est un fils de paysans qui a transformé, grâce à un financement de la Banque mondiale, une entreprise artisanale de yaourts en un vaste empire agroalimentaire, le groupe Tiko. Venu des hauts plateaux, protestant pratiquant, il séduit l'électorat populaire dans toute l'île, cultive le mythe du « self-made-man » et entend gérer le pays comme une entreprise.
À la fin de janvier 2002, à l'issue d'un scrutin entaché de fraudes, M. Ravalomanana est finalement, déclaré en ballottage favorable devant Didier Ratsiraka (46,21 % des voix contre 40,89 %), et un second tour est annoncé pour le mois suivant. Mais M. Ravalomanana, qui estime être spolié d'une nette victoire dès le premier tour, récuse ce résultat et, fort d'un important soutien populaire (y compris celui, massif, de toutes les Églises), organise manifestations et grèves qui ne tardent pas à paralyser la capitale et bientôt à asphyxier l'ensemble de la vie économique de l'île.
La situation ne parvenant pas à se débloquer, il décide, le 22 février 2002, sous l’impulsion du peuple qui le soutient, de s'autoproclamer président de la République dans un stade de Mahamasina en délire. Sept ans de malheurs plus tard, l’histoire recommence avec des donnes encore plus financièrement nauséabondes.
Certes, le peuple est versatile. Mais allons-nous nous contenter de ce constat alors que depuis le retour de l’Indépendance, le peuple malgache est à peuple portefaix, celui dont on a uniquement besoin pour asseoir officiellement le genre de diktat qui prévaut en ce début du mois de février 2009 ! Si nul n’est censé ignorer la loi, 75% des Malgaches ignorent le contenu de la Constitution qui fait pourtant d’eux les vrais détenteurs du pouvoir.
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Mais des phrases, en apparence anodines, leur brisent toute illusion d’accéder un mieux-vivre et un mieux-être au détriment d’une minorité ancrée sur des intérêts purement financiers. Monsieur Ravalomanana dirige Madagascar à coup d’ordonnances ! Fermer les yeux sur cet état de fait c’est de l’assassinat par anticipation. « Il faut respectez la Constitution dans cette affaire malgacho-malgache ». Alors laissez-nous nous débrouiller entre nous, mais de grâce, arrêtez de nous saturer de dollars dont on sait la destination immédiate. Sans nerf de guerre, le régime sera sur le même pied d’égalité que le peuple qui a contenu son désespoir depuis deux ans. Il a trouvé son porte-parole actuellement et il s’exprime. Face à lui, le peuple souverain, un pouvoir qui opprime et va réprimer au nom d’une Constitution mille fois bafouée avec la complicité des bailleurs de fonds. Assez de phraséologie et de « bêtises intelligentes ». Le légitime doit primer sur le légal. Sinon, qu’est-ce qu’on va bien rigoler dans nos tombeaux respectifs. Ahahaha !
Enfin, un point primordial que tout le monde doit garder en tête et que je me ferai le devoir de suivre de près : en aucun cas, Andry Rajoelina n’a l’intention d’être Calife à la place du Calife. Il l’a déclaré au micro de Christophe Champeaux (Rfi, 30 janvier 2009). «Je ne serais pas candidat, je suis encore jeune, même si on m’appelle Tgv, j’ai encore plus de 25 ans de carrière politique, donc je ne suis pas du tout pressé ». Sa démarche est de faire en sorte que ce genre de situation ne survienne plus à Madagascar. En faisant quoi ? En rédigeant une Constitution défendant effectivement les intérêts du peuple, durant cette période transitoire.
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Par exemple : « Le président de la république de Madagascar ne peut se présenter que pour deux mandats successifs ». Comme aux U.S.A. Croyez-moi, cela changera énormément de choses. Robert Mugabe, 81 ans, est l’exemple type de cette volonté des dirigeants africains à être président à vie. Or, il a le soutien de l’Afrique du Sud. Si donc l’Union africaine n’est même pas capable de le mettre « out » au nom de la souffrance du peuple zimbabwéen, sur quoi ce club de dictateurs majoritaires ira plancher ici, à Madagascar, en juillet 2009 ?
Que nous réserve l’avenir ? Le lundi 2 février 2009 sera décisif pour la suite de cette tranche de l’Histoire contemporaine de Madagascar. Les fonctionnaires reprendront-ils oui ou non le travail ?
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Jeannot RAMAMBAZAFY – Journaliste - www.madagate.com
Antananarivo, le 1er février 2009
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