Décidément, j’ai la très sale impression que le rôle des conseillers (spéciaux ou non) du président Hery Rajaonarimampianina, constitue en la mise à sac des entreprises nationales grâce à leur position au sommet de l’état. Après Nicole Andrianarivoson et Mbola Rajaonah, voilà que le nom d’Arsène Rakotoarisoa (un cousin du Filoha à ce qu’il semble) apparaît dans la descente aux enfers de la société KRAOMA (Kraomita malagasy). Autopsie d’une faillite à la Rajaonarimampianina.
Historique de la KRAOMA
Il s’agit d’une entreprise qui auparavant se dénommait COMINA pour Compagnie Minière d’Andriamena, région où fut découvert le premier gisement de chromite (minerai de chrome, métal industriel) en 1948, sous la colonisation française. En 1966, les actionnaires de COMINA étaient les compagnies UGINE-KUHLMANN (55%), PECHINEY, COFIMEN, MOKTA, la Société Française de Fonderies et Aciers Electriques (SFAC) et l’Etat malgache (à hauteur de 20% du capital). Le gérant de la Société s’appelait Henri de Brie, d’où Brieville, la commune où a été installée la cité des travailleurs.
C’est en 1968 que l’activité minière proprement dite a débuté par l’exploration. L’exploitation commença en 1973. Depuis cette année, l’exportation se fait à partir du port de Toamasina. A l’époque, ses clients étaient la France (70 à 80% des exportations, représentant 50% de la consommation française et 40% de celle des pays du Marché Commun), le Japon (20 à 30%) et la Norvège.
En 1975, le vent de la nationalisation a soufflé sur Madagascar et COMINA n’y a pas échappé et est donc devenue la KRAOMA dont les mines sont réparties sur plusieurs sites, et dont certaines ont déjà été fermées car épuisées. L’Etat était actionnaire à 100%. Bon an, mal an, la production en moyenne se situe entre 100.000 et 140.000 tonnes métriques annuellement, constituant une ressources de devises non négligeables pour le pays. Notons qu’elle a le monopole sur l’exploitation du chrome malgache qui est exporté principalement vers la Chine depuis.
Le nom du premier Directeur général malgache de la KRAOMA s’est perdu dans l’épaisseur de l’amnésie collective due à la révolution "socialiste". Seul est retenu le nom de Mejamirado Razafimihary, ministre de l'Industrialisation sous Marc Ravalomanana qui l’a nommé, ensuite, Directeur général de KRAOMA. En 2007, celui-ci annonce que KRAOMA devient une société anonyme avec l’entrée en lice de ZARASOA, association des employés; la SONAPAR (Société nationale de Participation) et les assurances NY HAVANA. Depuis, d’autres actionnaires sont venus grossir le rang… Mais l’Etat est resté majoritaire. A l’époque Davidson Raolimalala Jeanne, qui succèdera à M. Razafimihary en 2010, était Présidente du Conseil d’administration (PCA).
En juillet 2014, la Dame Jeanne est limogée et c’est Arsène Rakotoarisoa qui fera office de Directeur général et PCA par intérim de KRAOMA. Qui est cet Arsène semblant sorti de nulle part? En fait, depuis 2009, au côté de Rivo Rakotovao, actuel super ministre des projets présidentiels, il était conseiller technique, spécialiste du budget, du ministre des Finances, Hery Rajaonarimampianina, devenu président de la république et qui a imposé cette nomination. Par la suite, ces deux compères, Rivo et Arsène, se retrouvent au parti Hvm.
BUREAU INITAL DU PARTI HVM
Président national : Rivo Rakotovao
Secrétaire général : Henry Rabary-Njaka
Vice-présidents : Jaobarison Randrianarivony, Rachid Mohamed, Tata Ambroise
Secrétaire général adjoint : Paul Rabary
Administrateur général : Thierry Raveloson
Trésorière : Herisoa Razanadrakoto
Trésorièr adjoint : Ulrich Andriantiana
Conseillers : Nicole Andrianarison, Kolo Roger, Anicet Andriamosarisoa, Hugues Ratsiferana et Arsène Rakotoarisoa
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En ce mois de juillet 2014, il avait été annoncé qu’un audit de gestion courant sur la période 2012, aurait lieu rapidement (un audit avait déjà été effectué sur la période 2009-2012). « Le rapport aura lieu d’ici la fin de l’année (Ndlr: 2014). Le Conseil d’administration et le gouvernement élaborent actuellement les termes de références », avait précisé le nouveau Dg par intérim. Il a aussi été annoncé, en ce concerne le nouveau directeur général, qu’un appel à candidature sera lancé, après la publication du rapport d’audit. Mais comme la sœur Anne, personne n’a rien vu venir, un an après. Puis, Arsène Rakotoarisoa, qu’on soupçonne d’être le cousin de l’actuel président de la république, disparaît de la scène médiatique.
Mais récemment, devenu Dg « plein » sans audit ni tam-tam officiel, le revoilà sous les feux de la rampe lorsque la KRAOMA est accusée de la détérioration de la RN 44 (Moramanga-Ambatondrazaka) par ses gros camions. Pour le Dg, la raison de ce transport terrestre des produits vient du fait que les trains de MADARAIL ne peuvent plus supporter de gros tonnages. Quant à l’utilisation de la route, il a déclaré: « Il y a eu un accord avec la région Alaotra Mangoro et nous payons une taxe de roulage pour l’entretien de la portion de route que nous utilisons ». Pour la région Alaotra Mangoro, le montant de cette taxe est insuffisant pour des travaux d’entretien convenables et d'envergure.
Et, profitant de l’occasion, il a révélé que la KRAOMA est en train « de relever la tête car sa production a augmenté. Des commandes prévues courir sur deux ans ont été honorées en seulement trois mois ». Heu, parfois, il y a des choses trop belles pour être vraies… Et, à cause de cette dernière déclaration, les langues se sont déliées, les correspondants se sont mis en action. Ainsi, des faits, que ce Dg croyait à l’abri de l’opinion publique, me sont parvenus.
En réalité, donc, Arsène Rakotoarisoa est toujours conseiller spécial du président Hery. Dès son arrivée à la KRAOMA, il a effectué un grand balayage: exit l’ensemble des cadres supérieurs, permettant ainsi de monopoliser toutes les décisions. Comme Jean Eric Rakotoarisoa, l'Arsène Lupin du chrome est devenu ainsi juge et partie. Et même partie prenante. Ainsi, grâce à sa position de seul maître à bord, il a montré un appétit plus que gargantuesque et les chiffres que je vous donne ne sont pas fantaisistes. En un temps record, il a pu délivrer et signer des contrats de vente annuels portant sur 500.000 tonnes métriques. Or, la capacité de production, comme déjà dit plus haut, se situe entre 100.000 et 140.000 par an en moyenne. Il y a quelque chose d’illogique dans cela.
Pour brouiller les pistes, il a fait appel à plusieurs transporteurs à qui il a attribué des contrats de compensations vraiment énormes afin de leur garantir l’attribution des cargaisons. Du coup, selon des témoins sur place, il est arrivé, deux fois plus qu’une, que deux bateaux sont chargés simultanément au port de Toamasina. Ce qui a entrainé des pénalités de mobilisation de navires, supérieures à 200.000 dollars US. Se croyant tout permis, comme son seigneur et maître, il s’est octroyé le luxe de passer un contrat d’exclusivité avec AVRA Commodities PTE Ltd, société négociant dans le… charbon, basée à Singapour. Cela, sans passer par une consultation restreinte d’usage.
Vous ne trouverez aucune information valable sur le site du ministère de tutelle
Avec ce « deal », la KRAOMA a cassé les prix en vendant sa production avec un « discount » de plus de 50 dollars US par tonne métrique. Résultat? Les clients chinois ont déserté le marché et le prix du chrome malgache est en train de baisser encore plus vite que celui du cours sur le marché international déjà malmené. Philippe Leclerc (Président de Orizon Finance Sas, société liquidée judiciairement en 2012), un nom qui ne vous sera pas inconnu, pourra vous en dire plus sur ce « deal » … inédit. Et les spécialistes ainsi que certains actionnaires, surtout les employés de ZARASOA, se posent des questions: qui va combler le manque à gagner (50 dollars US par tonne) de la KRAOMA? Mais, et surtout, quelle est la vraie destination des montants payés en avance sur chaque livraison? C’est un sacré secret… de Polichinelle.
A ce rythme effréné, considéré, sans doute, comme un excellent travail, à première vue, les réserves de la KRAOMA sont en train de s’épuiser aussi vite que les puits d'eau du Royaume du Kere et le montant de son endettement (il y en a toujours, demandez à l’expert comptable) s’élève à plus de 6 millions de dollars US auprès de ses fournisseurs. Des détails pour prouver que je ne blague pas? La KRAOMA doit 4 milliards ariary à JOVENNA; 800 millions ariary au TCR et 2 milliards ariary à SMCP. Quel impact croyez-vous que cela a au niveau de la balance de paiement? Un impact totalement déficitaire.
Attendez, ne croyez pas qu’il s’est arrêté en si bon chemin: Arsène Rakotoarisoa, spécialiste du budget, a investi 2 millions de dollars US afin d’augmenter encore plus la production de la KRAOMA. Est-ce logique au moment où, au contraire, la majorité des exploitants miniers sont en train de faire des coupes dans l’industrie d’extraction? Ainsi, alors qu’on croyait que le pillage de Madagascar était le fait exclusif de compagnies étrangères, voilà que ce sont des Malgaches proches du régime Hvm/Rajaonarimampianina qui sabordent leurs compatriotes au niveau social et économique! Ce, grâce à un pouvoir prêté et limité. Il n’y a vraiment personne dans la salle pour stopper net cette hémorragie? Quid dans d’autres domaines, comme les préparatifs du XVIème Sommet de la Francophonie décalé (çà finira par un décalé-coupé)? Pour en revenir à la KRAOMA, attendons-nous à une énième grève du personnel et à la désignation d'un Dg made in ailleurs qui va épurer les postes "inutiles" ainsi qu'à la montée sur scène d'un troisième larron au nom des 3P. La faillite d'Air Madagascar, vous connaissez, après le rapide passage de Me Henri Rabary-Najaka, Nicole Andrianarivoson et consorts au CA?
Don Quichotte se battant contre un moulin à vent. "L’Ingénieux Hidalgo Don Quichotte de la Manche" est un roman de l'Espagnol Cervantès. Il s'agit d'une parodie des mœurs médiévales et de l'idéal chevaleresque, et une critique des structures sociales d'une société espagnole rigide et vécue comme absurde. Don Quichotte est un jalon important de l'histoire littéraire et les interprétations qu'on en donne sont multiples, pur comique, satire sociale, analyse politique (Wikipédia)
Amis de Madagascar, merci d’avance pour votre inertie. Mais tant que j’aurai un souffle de vie, je préfère jouer à Don Quichotte de la Manche plutôt que de rester les bras croisés et vivre comme un lâche. Mais, à la différence de Don Quichotte de la Manche qui lutte contre des moulins à vent, moi Don Papizano de Mada, je lutte contre des moulins à paroles. On finira bien par attraper tous ces saligauds (contraction de sales égoïstes aussi, sans doute?), un jour ou l’autre… Au moment où ils s’y attendront le moins. Avec ou sans moi ici-bas. Enfin, sachez que KRAOMA "fait" aussi dans l’Or. Avec le même schéma et la « libéralisation » de ce métal précieux adoptée par Hery Rajaonarimampianina (impact négatif ICI), les générations de Malgaches à venir, ceux qui nous remplaceront, n’auront vraiment plus que leurs yeux pour pleurer. Ah mes pauvres aïeux.
A présent, passons aux preuves matérielles:
DEMMURAGE (Taxe de stationnement portuaire)
Le navire MV Hanjin Marugame "chartérisé" par Avra Shipping PTE LTD, battant pavillon panaméen
Si ma mémoire ne me joue pas des tours, depuis que la KRAOMA existe, il n'a jamais été question de taxes de demmurage. Avec l'Arsène Lupin du chrome, c'est donc chose faite...
NOTA: Concernant les factures, vous êtes assez nombreux à m'avoir informé pour me dire que vous n'y comprenez rien à rien. Je les ai donc enlevé, pour le moment, en attendant l'avis d'un spécialiste à qui j'ai soumis la question. Un peu de patience donc et d'ici quelques jours vous serez aussi éclairés très cultivés en matière de jeu d'écriture comptable.
Un dossier de Jeannot Ramambazafy – 13 février 2016