A l’approche de l’élection présidentielle, il semble bien que certaines personnes, sinon personnalités, veulent faire flèche de tout bois et s’engagent dans des batailles «politigocentriques» (mot que j’ai inventé et à vous d’interpréter ce qu’il peut bien signifier) via journalistes interposés avec des évidences un peu trop apparentes pour être véridiques.
Dans son numéro n°1465 du 12 janvier 2018, la Lettre de l'Océan Indien (LOI), à propos de la gestion des visas touristiques, a jeté en pâture deux noms: celui du Malgache Mbola Joseph Rajaonah -dit aussi Mbola Tafaray-, 37 ans, et celui du Français Gilbert Dailly, 74 ans, installé à Madagascar depuis la fin des années 1980. Le seul lien entre eux: le titre de conseillers spéciaux du filoha Rajaonarimampianina. Si celui-ci et le jeune Mbola Rajaonah se sont connus durant la période de transition 2009-2013, par contre, le vieux Gilbert Dailly, lui, connaît l’actuel président de Madagascar depuis 2007. Et entre ces deux derniers c’est tellement le grand amour, qu’il paraît qu’ils ne peuvent plus se passer l’un de l’autre selon toujours LOI. «Le Français Gilbert Dailly, conseiller spécial du président Hery Rajaonarimampianina, est devenu incontournable dans l'entourage du chef de l’État» (in LOI n° 1463 du 01/12/2017).
Cependant, dans des quotidiens nationaux, depuis le 15 janvier et jusqu’à hier encore, le journalisme d’investigation a fait place à un acharnement vraiment suspect sur une seule personne. Cela sans preuve concrète. Les éléments concernant l’affaire des visas touristiques tiennent la route, comme on dit, mais le nom de Mbola Rajaonah, au milieu de tout cela, s’apparente à un cheveu dans la soupe. Bien sûr, il n’est pas un angelot mais cela cache d’autres personnages qui tirent vraiment les ficelles. Dites-vous bien que je n’ai aucun intérêt à défendre ou attaquer X, Y, Z mais, depuis 34 ans maintenant, je fais un point d’honneur à apporter des preuves dans tous mes écrits, diffusant ainsi de la lumière sous un angle tout autre sur une affaire. Ceux qui me lisent le savent. Dans cette affaire de visas touristiques électroniques et de société AMETIS, un autre nom a été cité par LOI, oublié sinon escamoté par les journaux malgaches en question. Il s’agit de Gilbert Dailly.
Certes, Mbola Rajaonah et l’actuel président de la république se connaissent. Mais pas mieux ni plus longtemps que celui-ci connait ce Gilbert-là , qui n’est pas un enfant de chœur. Entre mai et août 2007 (il y a donc 11 ans de cela), il a été au centre d’une affaire qui a entrainé l’emprisonnement de Natacha Barday et l’expulsion de son mari Riaz. C’était sous la présidence de Marc Ravalomanana. Une affaire qui «possède tous les ingrédients d'un mauvais film: des apprentis tueurs, des associés qui se déchirent, un sérieux contentieux commercial, des soupçons de corruption... Le tout sur fond de palace de rêve planté au milieu de l'océan Indien», comme l’a écrit le confrère . Le palace de rêve en question est implanté sur Nosy Iranja. Cette île avait été aménagée à la fin des années 1990 par la société Island Green dont les actionnaires restent Jean Pierre Condet, Frederic Faure et… Riaz Barday. Devinez qui étaient le gérant et le commissaire au compte d’Island Green. Eh ben, respectivement: Gilbert Dailly et Hery Rajaonarimampianina. Oui! Le premier avait accusé le couple Barday de tentative d’assassinat sur sa personne. Mais une accusation avec un dossier vide ne mène nulle part.
Sept ans plus tard, Gilbert Dailly devient un conseiller privilégié du tout nouveau président Hery. Il est Français comme la société Hologram Industries, devenue Surys en 2015, est française. LOI indique que la société AMETIS (Agence Malgache d’Édition de Titres et Timbres Sécurisées), de droit malgache, qui a son siège social à la tour Sahavola à Antsahavola Antananarivo, est une filiale de Hologram Industries. Pourquoi les journalistes malgaches n’ont pas creusé sur le fait qu’AMETIS, en avril 2015 a conclu un marché 3P avec le ministère de la Santé? Les signataires du contrat de partenariat, concernant l’utilisation du système dénommé MEDITRACE, étaient Andriamanarivo Lalatiana, ministre de la Santé publique et Laurent Mandridake, P-dg d’AMETIS. En mai 2016, la même société signe un autre accord de partenariat 3P mais avec la Commune urbaine d’Antananarivo, à propos de cartes professionnelles électroniques «non falsifiables» pour plus de 2000 commerçants du marché d'Anosibe. A ces moments-là personne n’a dit ou écrit que Mbola Rajaonah est derrière tout çà , derrière cette société. Alors?
Il existe des faits répétitifs immuables. A chaque fois qu’un personnage de l’entourage du couple présidentiel est limogé, le nom de Mbola Rajaonah apparaît dans des journaux (et pas LES journaux) malgaches pour telle ou telle «affaire». Celle de son parc automobile, abondamment reprise par les mêmes journaux, suit le limogeage de Rivo Rakotovao de son poste de ministre de l’Agriculture. Et cette histoire de visas touristiques est précédée du limogeage de dame Herisoa Razanadrakoto du poste de directeur de cabinet, même par intérim et non nommée officiellement. Mais elle reste encore PCA du port de Toamasina et de la société Fanalamanga jusqu’à preuve du contraire. Vérifiez, vous verrez que tout est exact. Lien unissant Rivo et Herisoa: ils sont tous membres du parti présidentiel Hvm («Hery vaovao ho an’i Madagasikara»), le premier en étant le président national (il sera ensuite nommé Sénateur et deviendra «magiquement» président de cette institution, face à un Honoré Rakotomanana plus combatif du tout devant ce fait accompli). Dans tout cela, tout le monde oublie que Mbola Rajaonah n’est pas membre du parti Hvm. Comme Solofo Rasoarahona, un ami de longue date de Hery l’expert-comptable.
En tout cas, toutes ces vérités facilement vérifiables indiquent que les mauvais coups, les lâchetés, sont le sport favori des membres de ce parti inexistant avant l’élection présidentielle de 2013. Et une autre affaire leur est revenue, récemment, comme un coup de boomerang en pleine gueule. Les révélations d’Hourcine Arfa, l’évadé de Tsiafahy, recueillies par notre confrère «Le Parisien» encore. Mais ce qui nous intéresse, ici, c’est un tout petit détail et non les milliers d’euros «offerts» à la ministre de la Justice (70.000 euros) et au procureur, ex-ministre de la justice (30.000 euros). Non, ce détail répond à la question incontournable: qui a présenté Hourcine Arfa au président Hery Rajaonarimampianina pour qu’il soit son conseiller chargé de la sécurité, en 2015? C’est Arfa lui-même qui lève le voile dans l’interview révélatrice: «Ancien sportif et boxeur, j'ai travaillé dans l'aéronautique à Toussus-le-Noble». Il n’y a jamais de hasard ici-bas. Je rappelle alors, ici, que Me Henry Rabary-Njaka, avocat au barreau de Paris, de nationalité française donc, a été le Secrétaire général de l'Aéroclub d'Air France, sis sur l'aérodrome de… Toussus-Le-Noble (situé entre Versailles, Saint Quentin, en Yvelines, et Saclay). Henry Rabary-Njaka, actuellement inutile ministre malgache des Étranges affaires, était tour à tour directeur de Cabinet de la Présidence, PCA d'Air Madagascar. Il a été limogé de ces deux postes-clés mais a conservé celui de Secrétaire général du parti Hvm.
Jamais deux sans trois, ce limogeage a été suivi de l’affaire de trafic de bois de rose à Singapour, dans laquelle le nom de Mbola Rajaonah a été jeté en pâture sans preuve concrète non plus, à partir du très suspicieux «de source sûre» incompatible au vrai journalisme d’investigation. Jeannot, tu défends Mbola Tafaray! Non, je défends la vérité (pas le journal mais la définition du mot que je préfère, qui est: (du latin veritas, «vérité», dérivé de verus, «vrai») la correspondance entre une proposition et la réalité à laquelle cette proposition réfère). Je le répète: Mbola Joseph Rajaonah n‘est pas un angelot. Je lui ai moi-même tapé dessus à propos d’histoire de douanes et de journalistes vendus. Mais avec cet énième acharnement, je me demande franchement qui est vendu a qui, par qui et pour combien?
En ce même mois d’octobre 2017, le questionnement de l’ami Elman du site actutana.com est très pertinent: « Depuis quelques semaines, certains médias se livrent une véritable guerre entre eux. Pour être plus précis, ce combat oppose ceux qui gravitent autour de Hery Rajaonarimampianina... et ceux proches de Andry Rajoelina et de Mamy Ravatomanga Avec les médias afférents aux deux hommes: journaux, radio, télé… Collection de voitures de luxe dans le garage, harcèlement voire intimidations armées, dépôts de plaintes et menaces d’ampamoaka, convocation à la gendarmerie, dénigrement, insultes, tout y passe» (Elman, 25/10/2017).
Jamais trois sans quatre aussi. Sur facebook, cette fois-ci. En novembre 2017, au lendemain du limogeage de Nicole Andrianarivoson, conseillère spéciale du président Hery, voilà que Mbola Rajaonah est jeté en pâture, photos à l’appui (mais de quoi?), comme quoi il aurait eu une liaison avec la Première Dame et même avec sa… fille. Trop gros. Cela n’a pas fait long feu non plus.
Le mieux à faire, vient de la propre bouche de l’évadé de Tsiafahy, Hourcine Arfa: «si je suis coupable, prouvez-le. Autrement, laissez-moi tranquille». Dans cette histoire, si j’étais à la place de Mbola Tafaray, pour me… dédouaner (ah le vocabulaire français…), je choisirai la même phrase et demanderai moi-même au BIANCO (Bureau national indépendant anti-corruption) de mener une enquête sur cette affaire de visas touristiques. Elle risque fort d’apporter son lot de surprises. Bonnes pour les uns, mauvaises pour d’autres. Mais à force de tirer le diable par la queue, il faut s’attendre au «tody» bien malagasy. Et quoi qu’on puisse dire, le Directeur général du BIANCO, Jean Louis Andriamifidy, a prouvé qu’il est un homme intègre, si l’on se réfère à l’affaire Claudine Razaimamonjy. Et devinez quoi!? L’arrestation de Claudine Razaimamonjy, en avril 2017, a été suivie de près par une autre «campagne». Lu dans les mêmes journaux, à l’époque: «Des noms de conseillers du couple présidentiel sont également cités dans d'autres affaires similaires. La suite des dossiers concernant Mbola Rajaonah, qui aurait déjà été convoqué par le Bianco pour certaines affaires douteuses au niveau des douanes, est attendue par bon nombre d'observateurs». Même le journal «Tia Tanindrazana » en malgache, pro-TIM (parti de Marc Ravalomanana) a profité de cette arrestation pour annoncer: «Mamy Ravatomanga sy Mbola Rajaonah ho samborina koa?» (Arrestation de Mamy Ravatomanga et de Mbola Rajaonah aussi?). Ainsi, le nom de Mbola Tafaray est lancé à la moindre occasion venue. Cela semble faire bien vendre…
Vraiment, il est temps que les journalistes d’investigation malgaches de tous bords pratiquent le dicton: «Dans le doute abstiens-toi». Laissons donc le conditionnel et laissons aussi le BIANCO faire. L’heure n’est pas à cette guerre totalement stérile pour les électeurs. Il y a mieux à faire. Enfin, il ne faut pas perdre de vue que tout ce monde, se connait depuis, au moins, la période transitoire 2009-2013. Alors pourquoi s’entretuer par journalistes interposés et se réconcilier après (en politique, comme en affaires d’ailleurs, il n’y a jamais d’inimitié durable, il n’y a que des intérêts)? Qui, à l’heure actuelle, y a intérêt et qui y gagne quoi? Combattez à la loyale, les gars. Car en vérité, je vous l’assure, ce n’est pas le pays ni le peuple malagasy qui en ressortira grandi. Et, pour l’heure, c’est l’ensemble du journalisme à Madagascar qui continue sa descente aux enfers de l’offre et de la demande. Amies lectrices, amis lecteurs, je ne mangerai jamais de ce pain-là . Qu’on se le dise une fois pour toutes!
Enfin une autre suggestion, et non des moindres: quelle est la position de la société AMETIS, dirigée, je le rappelle, par le P-dg Laurent Mandridake, vis-à -vis de Mbola Tafaray? Qu’au moins, un des membres, qui se sont réunis, le 7 et le 21 décembre 2017, se prononce pour révéler si, de près ou de loin, Mbola Tafaray est lié à leur société. Attention au faux témoignage car les murs ont des oreilles.
Voilà . A vous de voir si cette démonstration est une démonstration par l’absurde ou une démonstration pas absurde du tout. A samedi!
Jeannot Ramambazafy – Article publié aussi dans « La Gazette de la Grande île » du mercredi 17 janvier 2018
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