Ci-après la transcription du discours du Président Andry Rajoelina, prononcé à Genève le 11 Juin 2019, dans le cadre de la clôture de la célébration du Centenaire de l’Organisation internationale du Travail ou OIT.
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Voilà déjà un siècle que l’Organisation internationale du Travail continue inlassablement de défendre les valeurs de justice et de respect de la dignité pour donner un visage humain à la mondialisation.
Mes premiers mots seront des mots de remerciements.
En cette année de célébration du Centenaire, Madagascar rend hommage aux hommes et femmes de toutes origines qui se sont battus de toute leur force, avec foi et conviction, pour œuvrer et bâtir un monde du travail plus juste, plus décent, valorisant l’Humain et favorable à l’épanouissement et au bien-être de toutes les générations qui se sont succédées depuis 1919. Ainsi, merci à ces milliers d’anonymes et aux grands noms également, tous des bienfaiteurs de l’Humanité.
Excellences, Mesdames et Messieurs,
Depuis 1919, l’OIT contribue grandement à l’instauration d’un monde de travail valorisant d’être humain, les respects de ses droits et attentif au principe de non-discrimination et à l’égalité des traitements. L’OIT a lutté contre les pires traitements du travail ; l’OIT a permis de grands progrès pour l’amélioration des conditions de travail dans le monde entier. Pourtant, en dépit de ce siècle d’activisme, force est de reconnaître que beaucoup reste encore à faire. Les défis sont nombreux, à savoir : mettre fin à la violence et aux harcèlements dans le monde du travail ; éradiquer toutes formes de traite de l’être humain et esclavage moderne ; garantir l’égalité des genres et des origines ; agir pour que les rémunérations et les conditions de travail soient les plus respectueuses de la dignité humaine.
Je déclare, ici solennellement, que Madagascar se tient au côté de l’OIT pour lui prêter main-forte dans cette tâche ardue mais essentielle au développement de notre monde et à l’épanouissement des générations futures. Depuis son adhésion en 1960, Madagascar s’est engagé avec détermination au côté de l’OIT pour mettre en place la justice sociale et instaurer une paix universelle pour la protection des travailleurs et de tous les pays.
Aujourd’hui, nous renouvelons notre engagement de façon concrète et significative pour plus de justice sociale et pour inscrire Madagascar dans un développement et une émergence inclusive. Nous voulons garantir à toute la population malagasy, un salaire digne qui puisse couvrir leurs besoins vitaux et leur offrir une qualité de vie décente. Pour ce faire, le 1er mai dernier, à l’occasion de la fête internationale du Travail, j’ai annoncé l’augmentation du salaire minimum de 19% et ce, à l’issue d’une réunion tripartite en présence des représentants du patronat, des syndicats des employés et l’État malagasy.
Dans la même perspective, nous travaillons sans relâche pour la mise en place d’un système de protection sociale pour les travailleurs indépendants et pour les populations vulnérables. Avec une population jeune, qui est composée à 70% de moins de 25 ans, on ne peut pas envisager un Madagascar de Demain dans sans prendre en compte la jeunesse d’aujourd’hui. Chaque année, nous assistons à l’arrivée de plus de 400.000 jeunes malagasy sur le marché du travail. Faute de perspectives et de débouchés, un grand nombre d’entre eux se trouvent au chômage et deviennent un poids pour la société. Pour pallier à cela, nous avons mis en place le programme national de l’entreprenariat appelé « Fihariana » signifiant prendre en main son destin. Doté d’un budget de (à millions d’euros -facilitant le financement pour les jeunes, les femmes, les agriculteurs, les paysans et même les start-ups- et des financements rapides allant de 300 euros à 50.000 euros, cela est une grande première dans l’histoire de Madagascar.
A travers ce projet, ou ce programme national qui s’appelle « Fihariana », nous voulons encourager la jeunesse malagasy à se former, à oser et prendre en main leur avenir tout en étant acteur du développement du pays. Nous sommes convaincus que la promotion de l’emploi pour tous ne passe pas uniquement par le statut de salarié. En effet, la création de son propre emploi et sa propre entreprise, permettra de résoudre les problèmes du sous-emploi, du chômage et mettre un terme à la violence, l’insécurité et à l’extrême pauvreté.
Excellences, Mesdames et Messieurs,
En 2019, est-il concevable que l’esclavagisme fasse encore des victimes ? Non, cela est inadmissible et, pourtant, ces faits existent encore et cela doit cesser ! Vous savez qu’actuellement, plus de 4.000 femmes sont séquestrées et détenues contre leur volonté au Moyen-Orient, dans des conditions inhumaines ? Il s’agit d’une cause qui me tient particulièrement à cœur car, conformément à nos engagements internationaux, et aussi parce qu’il est du devoir de l’État de protéger ses concitoyens sans exception, j’ai envoyé, en fin mars dernier, une délégation chargée de rapatrier des citoyennes qui avaient lancé un appel de détresse depuis le Koweit. Ces femmes étaient maltraitées physiquement, psychologiquement, battues et même violées. Bon nombre d’entre elles sont rentrées enceintes. Cet esclavagisme moderne fait rage et est irréversible.
Je lance donc un appel à vous tous, ici présents dans cette assemblée, et à vous tous qui entendez ce message : prenons nos responsabilités ; agissons ensemble pour mettre un terme à l’esclavagisme moderne, au trafic d’êtres humains ; mettons un terme au silence et à l’indifférence qui permettent à ce mal de perdurer. Madagascar a pris ses responsabilités et continuera à le faire.
Nous prenons également des actions pour lutter contre les violences basées sur le genre et les diverses violences faites aux femmes et aux enfants ainsi que la lutte contre leur mariage et les mariages forcés de ses mineurs. Sous mon impulsion, nous avons augmenté substantiellement les budgets des ministères responsables des volets sociaux. Pour ce faire, Madagascar s’est fixé comme objectif d’éradiquer le travail forcé, l’esclavage moderne, la traite des personnes d’ici 10 ans, et interdire toutes formes de travail aux enfants. A travers cette volonté d’aller plus loin et plus rapidement dans le respect des principes et des droits fondamentaux au travail, je suis fier que notre pays soit le premier pays pionnier de l’Alliance 8.7 visant à combattre la traite des êtres humains ; abolir le travail forcé et éliminer le travail des enfants sous toutes ses formes.
Excellences, Mesdames et Messieurs,
Madagascar est conscient des défis qu’exige son développement. Pourtant, jamais je ne privilégierais la croissance économique au détriment du bien-être social des Malagasy. Pour ce faire, j’ai désigné l’emploi décent pour tous comme l’une de nos priorités dans notre Politique Générale de l’État et, en particulier, pour les plus vulnérables, les jeunes, les femmes, les artisans et les agriculteurs ainsi que les éleveurs. Nous devons créer un sentiment d’utilité, d’indispensabilité et rendre la dignité à chaque citoyen en restaurant la vraie valeur du travail.
En travaillant de concert avec l’OIT, nous sommes convaincus que nous allons atteindre notre objectif de garantir un emploi décent pour tous, car cela constitue une étape essentielle afin d’avancer vers un avenir meilleur. Aujourd’hui, j’ai remis personnellement au Directeur général, six instruments de ratification pour témoigner de notre engagement continu au sein de l’OIT. Ces six conventions et protocoles concernent : - Les travailleurs migrants ; - Les relations de travail avec la Fonction publique ; - Les négociations collectives ; - Les agences privées d’emploi ; - Les travailleurs domestiques ; - Le travail forcé.
Excellences, Mesdames et Messieurs,
Pour clore mon intervention, au nom du peuple malagasy, je réitère notre foi en l’OIT. Je garde la certitude qu’elle saura, au fil des années, nous orienter et nous assister au nom de l’Humanité. Nous tous, dans nos rôles respectifs, que ce soit l’État, les employeurs ou les travailleurs, nous devons unir nos forces dans le but de construire des sociétés pacifiques, équitables et durables. Nous devons protéger nos populations contre tout abus, toute atteinte aux droits et libertés afin de promouvoir l’inclusion sociale garante d’une communauté prospère et stable.
Longue vie à l’OIT, je vous remercie de votre attention.
Transcription à l'écoute : Jeannot Ramambazafy