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Journalisme. L’importance de s’opposer de directement à la diffusion croissante des «fake news»

Comme promis mercredi dernier (ICI), voici la suite d’extraits du manuel publié, en 2018, par l'UNESCO (Organisation des Nations-Unies pour l’Éducation, la Science et la Culture). Intitulé originellement : « Journalism, Fake News & Disinformation » (Journalisme, fausses informations & désinformation), il comprend 142 pages et est destiné à l’enseignement et la formation en matière de journalisme. Ne partez pas, restez une dernière fois ! Car, c'est encore plus intéressant que la première partie (lire : Journalisme. Un guide pour les vrais professionnels, loin des « fake news »). Et cela vous concerne aussi, en tant que lectrices et lecteurs. Allons-y, une seconde et dernière fois pour des extraits de ce manuel-leçon de choses, qui enrichiront certainement votre culture.

Comprendre les différences

La désinformation et la mésinformation diffèrent du « bon » journalisme, qui se conforme à toute une série de normes et de principes d’éthique professionnelle. Elles diffèrent aussi, en même temps, du journalisme de piètre qualité, qui ne remplit pas son rôle. Un certain type de journalisme pose problème, par exemple, à cause d’erreurs fréquentes, non corrigées, résultant de recherches ou de vérifications insuffisantes. Le « mauvais » journalisme inclut également le journalisme à sensation, qui tend à exagérer les faits et à les sélectionner selon une logique partisane, au détriment de l’objectivité de l’information.

Il ne s’agit pas de prôner, par-là, une sorte de journalisme idéal, qui devrait se hisser au-dessus de la mêlée, tandis que le journalisme de mauvaise qualité serait entaché d’idéologie. Il s’agit, en revanche, de montrer que tout type de journalisme contient une narration et que le problème, dans le cas du journalisme de mauvaise qualité, n’est pas l’existence de la narration, mais plutôt le manque de professionnalisme. C’est la raison pour laquelle le journalisme de mauvaise qualité ne doit pas être assimilé à la désinformation ou à la mésinformation. Néanmoins, un journalisme de mauvaise qualité permet, parfois, à la désinformation ou à la mésinformation de naître ou de s’insinuer dans le système des « real news ». Les causes et les remèdes du mauvais journalisme diffèrent, toutefois, de ceux de la désinformation et de la mésinformation. En même temps, il est évident qu’un journalisme de bonne qualité, éthique, est nécessaire en tant qu’alternative et antidote à la contamination de l’environnement de l’information et à l’effet « tâche d’huile » d’un plus vaste ternissement de l’information. Aujourd’hui, les journalistes ne sont pas de simples spectateurs de l’avalanche de désinformation et de mésinformation qui nous envahit. Cela les concerne en premier lieu, ce qui veut dire que :

· le journalisme est confronté au risque d’être noyé dans la cacophonie ambiante ;

· les journalistes risquent d’être manipulés par des acteurs qui violent l’éthique des relations publiques en tentant de tromper ou de corrompre les journalistes dans la diffusion de la désinformation ;

· les journalistes, en tant qu’acteurs de la communication qui travaillent au service de la vérité, même quand elle est «dérangeante» peuvent devenir la cible de mensonges, rumeurs et canulars conçus pour les intimider et les discréditer en tant que personnes et en tant que professionnels du journalisme, en particulier lorsque leur travail représente une menace pour les commanditaires ou les acteurs de la désinformation.

De plus, les journalistes doivent reconnaître que, alors que le théâtre principal de la désinformation est représenté par les réseaux sociaux, des acteurs puissants instrumentalisent, aujourd’hui, la peur des «fake news» pour nuire aux médias qui diffusent des informations authentiques. Des nouvelles lois de plus en plus contraignantes font des médias d’information des boucs-émissaires, comme si c’était eux les auteurs des fausses nouvelles, ou les soumettent, de manière indiscriminée, à de nouvelles normes qui restreignent la liberté de toutes les plateformes et les activités de communication.

Par ailleurs, parfois, ces normes sont insuffisamment alignées sur les principes internationaux qui exigent que le caractère nécessaire de l’entrave à la libre expression soit justifié et démontrable et que la restriction soit proportionnelle au but poursuivi. Leur effet, bien que ce ne soit pas toujours leur intention, est de soumettre les médias qui diffusent des informations authentiques à une sorte de «ministère de la vérité» doté du pouvoir de supprimer l’information pour des motifs purement politiques. Dans le contexte actuel de mésinformation et désinformation, le véritable péril n’est pas tant que le journalisme soit soumis à une régulation injustifiable, mais plutôt que le public soit amené à se méfier de tous les contenus, y compris les contenus journalistiques de bonne qualité. Dans ce contexte, les gens ont tendance à croire ce que les réseaux sociaux leur présentent comme vrai et qui correspond à leur sentiment, au lieu de chercher à réfléchir de manière indépendante. Nous pouvons déjà voir l’impact négatif de cette tendance sur les croyances du public en matière de santé, de sciences, de relations interculturelles et d’expertises diverses.

Cet impact sur le public est particulièrement préoccupant en période électorale, mais aussi en ce qui concerne l’idée même de démocratie en tant que droit humain. Le but de la désinformation, en particulier en période électorale, n’est pas nécessairement de convaincre le public que son contenu est vrai, mais d’avoir un impact sur la définition des programmes (sur ce que les gens croient important) et semer la confusion dans l’information, afin de réduire le rôle que joue le facteur de rationalité dans les choix des électeurs. De même, l’incertitude résultant de la désinformation et de la mésinformation peut avoir un impact significatif sur des questions telles que les migrations, le changement climatique et d’autres questions d’actualité. Ces périls expliquent pourquoi il est si important – pour le journalisme et pour l’enseignement du journalisme - de s’opposer de manière directe à la diffusion croissante des « fake news ». En même temps, ces menaces constituent également une opportunité de souligner encore davantage la valeur des médias d’information. Elles nous offrent la possibilité d’insister sur l’importance, dans la pratique professionnelle, de la divulgation d’informations vérifiables et de commentaires éclairés, dans l’intérêt du public.

Ce que le journalisme doit faire

Dans ce contexte, il est temps, pour les médias d’information, d’appliquer de manière encore plus stricte les normes et l’éthique professionnelles, d’éviter la publication d’informations non vérifiées et de prendre leurs distances d’informations qui pourraient être intéressantes pour un certain public, mais qui ne sont pas d’intérêt public. Par conséquent, cette publication a également pour but de rappeler à tous les médias et aux journalistes, quels que soient leurs penchants politiques, qu’ils doivent éviter à tout prix de divulguer, par inadvertance ou sans réfléchir, des nouvelles qui relèvent de la désinformation et de la mésinformation. Dans de nombreux médias, aujourd’hui, du fait de la suppression de certains postes jadis dédiés à la vérification des faits, cette fonction du « cinquième pouvoir » a été reléguée dans une certaine mesure aux bloggeurs et autres acteurs externes qui signalent les erreurs commises par les journalistes, mais forcément après que ces erreurs aient déjà été publiées ou diffusées.

L’émergence de ce phénomène peut être accueillie avec satisfaction par les médias, car elle renforce l’intérêt de la société pour les informations vérifiables. Les journalistes devraient mettre à la disposition d’un plus vaste public le travail effectué par des équipes de vérification des faits indépendantes. Mais, ils devraient savoir, aussi, que, lorsque des acteurs externes pointent du doigt une faille systémique dans une source d’information, cela amène à s’interroger, au moins, sur la qualité du média en question en tant que source professionnelle d’information. Les médias doivent faire attention à ce que les corrections postérieures à la publication apportées par des entités externes ne remplacent pas les processus internes de contrôle de la qualité. Les journalistes doivent mieux faire, et apporter les corrections nécessaires, en premier lieu, ou bien renoncer à offrir à la société des médias crédibles.

Enfin, il ne suffit pas d’avoir une meute de chiens de garde externes qui effectuent des corrections de rattrapage : cela ne donne pas une belle image du journalisme. Les journalistes ne peuvent pas se dédouaner sur des entités spécialisées dans la vérification des faits en leur confiant le travail journalistique qui consiste à vérifier des affirmations douteuses présentées par certaines sources (que lesdites affirmations soient reprises dans les médias ou qu’elles contournent les médias pour paraître directement sur les réseaux sociaux). La capacité des nouveaux praticiens de dépasser un journalisme basé sur le «ouï dire» pour enquêter sur la véracité des affirmations délivrées par les personnes concernées doit être nettement améliorée.

Le journalisme doit également savoir détecter de manière proactive et dévoiler les nouveaux exemples et les nouvelles formes de désinformation. Ceci est absolument essentiel pour les nouveaux médias et cela représente une alternative aux approches de nature réglementaire employées en matière de « fake news ». En tant que réponse immédiate à une question d’actualité grave et brûlante, cela complète et renforce certaines stratégies à moyen terme, comme la maîtrise des médias et de l’information, qui aident le public à distinguer les vraies nouvelles de la désinformation et de la mésinformation. La désinformation est un sujet délicat : le journalisme rendra un service encore plus important à la société en consacrant une couverture intensive à cette question.

Ce manuel est donc un appel à agir. C’est également un encouragement adressé aux journalistes pour qu’ils s’engagent dans un dialogue avec la société concernant la manière dont les gens, au sens large, décident de la crédibilité de l’information et les raisons pour lesquelles certains d’entre eux partagent des informations non vérifiées. Tout comme pour les nouveaux médias, il s’agit d’une grande opportunité pour les écoles de journalisme et leurs étudiants, pour les formateurs et les personnes qui participent aux formations en matière de médias de concrétiser leur engagement civique vis-à-vis du public. Par exemple, le « crowd-sourcing » (pratique qui correspond à faire appel au grand public ou aux consommateurs pour proposer et créer des éléments de la politique marketing (choix de marque, création de slogan, création de vidéo, idéation/co-création produit...) ou même pour réaliser des prestations marketing) est essentiel si les médias souhaitent dévoiler des informations et communiquer au sujet de la désinformation « qui échappe aux radars » diffusée par e-mail ou sur les réseaux sociaux.

Pourquoi ce manuel ?

Déclaration conjointe sur la liberté d’expression et les fausses nouvelles (« fake news »), la désinformation et la propagande

Ce manuel a été produit dans un contexte de préoccupation croissante, à l’échelle internationale, concernant la « guerre de la désinformation » dont le journalisme et les journalistes sont les principales cibles. Début 2017, quand ce projet a été commandé par l’UNESCO, le Rapporteur spécial des Nations Unies sur la promotion et la protection du droit à la liberté d’opinion et d’expression, le Représentant de l’Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe (OSCE) pour la liberté des médias, le Rapporteur spécial de l’Organisation des États américains (OEA) pour la liberté d’expression, le Rapporteur spécial sur la liberté d’expression et l’accès à l’information de la Commission africaine des droits de l’homme et des peuples (CADHP) ont émis une déclaration conjointe à ce sujet.

Dans cette Déclaration, les représentants de ces organisations exprimaient leur inquiétude concernant la divulgation accrue de la désinformation et de la propagande et les attaques de plus en plus fréquentes dont faisaient l’objet les médias sous la forme de « fake news ». Les Rapporteurs et les Représentants identifiaient plus précisément l’impact pour le journalisme et les journalistes: « (Nous sommes) alarmés par les cas dans lesquels les autorités publiques dénigrent, intimident et menacent les médias, notamment en affirmant que ces derniers sont « l’opposition » ou qu’ils « profèrent des mensonges » et ont un agenda politique caché, ce qui accroît le risque de menaces et de violences contre les journalistes, sape la confiance du public dans le journalisme dans son rôle de « chien de garde public » et peut induire le public en erreur en brouillant les lignes entre la désinformation et les contenus médiatiques qui contiennent des informations pouvant faire l’objet de vérifications indépendantes ».


Dans un précédent dossier, j’avais parlé de l’Histoire des « fake news » (« Fake news. Depuis la nuit des temps, comme la prostitution »). Nous allons maintenant faire un bond en avant, en 2018, pour assister à la prolifération de nouveaux outils technologiques puissants. Ces outils ainsi que les critères extrêmement limités, en matière de contrôle de la qualité, en vigueur sur les réseaux sociaux et les plateformes de messagerie en vue de la détermination des caractéristiques requises pour l’information, facilitent la contrefaçon et permettent d’imiter des médias d’information crédibles pour faire passer pour vraies des informations frauduleuses. Il est également possible de plus en plus souvent, de manipuler le son et l’image, au-delà des techniques de montage autorisées, pour faire croire que quelqu’un a dit ou fait quelque chose à un certain endroit, et faire passer pour vraie une fausse information41, en la rendant virale sur les réseaux sociaux.

Aujourd’hui, les réseaux sociaux sont alimentés par différents types de contenus, de nature personnelle et politique. Il y a de nombreux exemples, produits ouvertement ou de manière cachée par des gouvernements ou par des sociétés du secteur des relations publiques travaillant pour des acteurs du monde politique ou des affaires. Dans ce contexte, d’innombrables blogueurs, influenceurs sur Instagram et Youtubeurs font la promotion de produits ou d’hommes politiques sans déclarer qu’ils sont payés pour le faire. Des paiements occultes ont également été effectués en faveur de commentateurs (souvent sous de fausses identités) qui cherchent à s’imposer, à intimider ou à discréditer des journalistes sur des forums en ligne. Dans ce contexte, le journalisme perd du terrain pour devenir l’objet non seulement de critiques équitables, mais aussi d’attaques contre sa propre existence.

Maintenant, le danger est représenté par la « course à l’armement » de ceux qui répandent la désinformation à travers des médias d’information et des réseaux sociaux partisans, qui polluent l’environnement de l’information par des moyens qui peuvent se retourner contre les auteurs de la désinformation eux-mêmes. Lorsque des campagnes de désinformation ont été dévoilées au grand jour, cela a porté un grave préjudice aux acteurs impliqués dans ces faits, que ce soit les agences ou leurs clients du monde politique (cf. par exemple, les récentes affaires Bell-Pottinger et Cambridge Analytica).

Il s’ensuit que, dans un contexte de polarisation, la désinformation alimentée par les outils numériques risque d’éclipser le rôle du journalisme et, pire encore, le journalisme fondé sur des faits vérifiables divulgués dans l’intérêt général - un accomplissement historique récent qui n’est nullement garanti– risque d’être décrédibilisé si l’on n’adopte pas les précautions nécessaires pour éviter la manipulation de l’information. Lorsque le journalisme se transforme en un véhicule de désinformation, la confiance du public dans les moyens d’information baisse et l’opinion cynique selon laquelle il n’y a pas de différence entre les récits divulgués par les journalistes et ceux diffusés par les acteurs de la désinformation se répand. C’est la raison pour laquelle l’historique relatif à l’emploi controversé des contenus et à ses différentes formes est instructif. En effet, l’analyse de l’évolution multiforme des « désordres de l’information » au XXIe siècle doit aider à mieux comprendre les causes et les effets d’une menace mondiale sans précédents – allant du harcèlement des journalistes par des « armées de trolls » cautionnées par les États à la manipulation des élections, des dommages pour la santé publique à l’ignorance coupable des risques du changement climatique (…).

Dans ce manuel, le journaliste trouvera des techniques pour obtenir des informations utiles et crédibles, tout en luttant contre les fausses nouvelles et la désinformation par l’éducation aux médias et la maîtrise de l’information. Ce, à travers les sept différents modules suivants :

· Vérité, confiance et journalisme : Pourquoi cela a-t-il de l’importance ?

· Réflexion sur les troubles informationnels : Formes de renseignements erronés, de désinformation et mal-information ;

· Transformation de l’industrie des nouvelles : Technologies numériques, plateformes sociales et propagation des renseignements erronés et de la désinformation ;

· Lutte contre la désinformation et les informations erronées par l’éducation aux médias et la maîtrise de l’information ;

· Vérification des faits 101 ;

· Contrôle des médias sociaux : Évaluer les sources et le contenu visuel ;

· Lutte contre les abus en ligne : Quand les journalistes et leurs sources sont ciblées.


Voyez ce qui entoure ce triste imbécile de Fleury Rakotomalala (au volant) : une limousine hors de prix pour les planqués “gasy kely” de l'Hexagone, immatriculée en France, et une épouse charmante qui perd son honneur du fil du temps

Voilà ce que je pouvais vous communiquer. Certes, vous restez sur votre faim. En tout cas, les non-journalistes auront appris beaucoup de choses. Quant aux journalistes qui se veulent être professionnels, c’est simple : procurez-vous ce manuel au plus vite. Et, ensemble, nous pourrons facilement vaincre l’inénarrable Fleury Rakotomalala et sa clique de branquignols planqués en France.

Jeannot Ramambazafy - Également publié dans "La Gazette de la Grande île" du samedi 9 mai 2020

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Mis à jour ( Dimanche, 10 Mai 2020 09:58 )  
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