En rédigeant ce dossier, ce n’est pas la personne du Ministre de la Sécurité publique (MSP) qui est visée, pour quelle raison que ce soit. Mais il s’agit d’une revue de faits inexpliqués, sinon inexplicables qui ont réellement eu lieu sous sa responsabilité. Ce, depuis qu’il a été nommé en 2020 (décret 2020-070 du 29 janvier 2020). En deux ans, les faits suivants se sont produits. Mais de qui parle-t-on donc ? Mais du Contrôleur général de Police Randrianarison Fanomezantsoa Rodellys, évidemment, qui avait pris ses fonctions effectives en février 2020.
Premier fait inexplicablement inexpliqué : la fuite de Raoul Arizaka Rabekoto, frappé d’une IST (Interdiction de sortie du territoire) relaté par notre confrère Davis R. de Midi Madagasikara, le 27 février 2020. « (…) C’est confirmé. L’ancien Directeur général de la Caisse nationale de prévoyance sociale (CNaPS), a réussi à quitter en catimini la Grande île alors qu’il fait l’objet d’une Interdiction de sortie du territoire (IST) suite à plusieurs dossiers de Justice le concernant, en cours de traitement au niveau du Pôle anti-corruption (Pac) et du Bureau indépendant anti-corruption (Bianco). Il se trouverait aujourd’hui à Zurich en Suisse. D’après les informations, il a pris un avion à Nosy-Be et est passé par La Réunion, puis Nairobi avant de rejoindre la Suisse. La question est donc de savoir comment se fait-il que quelqu’un faisant l’objet d’une IST puisse passer nos frontières ? D’autant plus que pour quitter le sol malgache, le président de la FMF a pris un avion où la présentation des documents de voyage (passeport…) était nécessaire avant l’embarquement. Comment se fait-il que les responsables aient pu laisser passer cela ? (…). L’ex-Directeur général de la CNaPS et non moins président de la Fédération malagasy de football a écopé de 10 ans de travaux forcés et d’une amende de 500 millions d’ariary, ainsi que 10 ans d’incapacité à exercer dans la fonction publique ». Raoul s’est évaporé.
Il faut savoir qu’à Madagascar, il existe une Direction de la Police de l’Air et des Frontières (PAF), au sein du ministère de la Sécurité publique. Certes, elle travaille conjointement avec des éléments de la gendarmerie et de l’Aviation civile de Madagascar (ACM), et aussi avec les douaniers, mais ce sont les policiers de la PAF qui ont la primauté sur le terrain (Air-Mer-Terre).
Seconde fuite hors de Madagascar, prévisible : celle de Jean Ravelonarivo, ancien Premier ministre du Président Hery Rajaonarimampianina, également frappé d’une IST (décidément), en octobre 2021. Selon nos confrères de « la1èrefrancetvinfo.fr », le 23 octobre 2021 : « (…) Arrivé à Mayotte, le samedi 16 octobre 2021 par Kwassa (petite embarcation motorisée) de l’île de Nosy-Be (à  340 km), l’ancien premier ministre malgache était depuis logé à l’hôtel le Maharaja à Mamoudzou, il s’est fait discret pour ne pas éveiller de soupçons. Jean Ravelonarivo, 62 ans, était le premier ministre de Madagascar de 2015 à 2016. Jugé le 27 septembre 2021 par contumace dans une affaire de détournements de deniers publics (plusieurs millions d’euros) de la CNAPS (la Caisse nationale de retraite de Madagascar) entre 2010 et 2018, Il a été condamné à cinq ans de prison ferme. Selon nos informations, le fugitif était en possession d’un visa de séjour de 3 ans, document établi à Madagascar par les autorités françaises. Il a pris l’avion vendredi soir, le 22 octobre en direction de Paris. Il pourrait ensuite s'exiler en Suisse ». Ravelonarivo s’est évaporé.
Or, vous avez dit Or ?
Le 31 décembre 2020, trois Malagasy sont interpellés à Johannesburg. Les douaniers sud-africains ont découvert qu'ils transportaient, des dizaines de lingots d’or pesant 73,5 kg dans leurs affaires. L’avion privé dans lequel se trouvaient ces individus, provenait de Madagascar, plus précisément de l’aéroport d’Ivato puis de celui de Toliara. Où se trouvaient les éléments de la PAF ?... Il faut aussi se rappeler que les frontières de la Grande île étaient fermées à cause de la pandémie du Covid-19.
Le 28 décembre 2021, trois hommes, dont deux Malagasy, sont arrêtés à l’aéroport international de Moroni aux Comores. Ils étaient, en possession 49 kilos d’or en lingots d’or.
Le comble, dans ces deux affaires, à une année d’intervalle –il y en a certainement qui n’ont fait aucun écho…-est que depuis le mois d’octobre 2020, toutes les exportations d’or légales ont été suspendues par Fidiniavo Ravokatra, ancien ministre des Mines, qui vient de rempiler en tant que ministre de… l’Eau.
Toujours dans ce volet aurifère, il existe une autre affaire très intrigante car plus personne n’en parle. Celle des 23,5 kg d’or interceptés le 12 octobre 2021. Le texte suivant a été rédigé par le service des Douanes Malagasy :
« Le 12 Octobre 2021, un navire en partance de Nosy Be à destination des Seychelles a fait l’objet d’un contrôle mixte au port de Nosy Be. Ce contrôle mixte est effectué conjointement par le représentant de l’APMF, les éléments de la PAF, ceux de la Gendarmerie Nationale ainsi que de la Douane Malagasy, suivant les textes en vigueur. Aucune anomalie n’a été constatée. Néanmoins, étant donné le profil des passagers en matière de trafic illicite, connaissant le mode opératoire des contrebandiers aux abords de nos côtes, lequel se fait par transbordement en pleine mer, alors que confrontée au manque de moyens pour y effectuer des interventions, la douane malgache a sollicité les autorités seychelloises aux fins de contre-visite du navire. Suite à cela, 23,5 kg d’or non déclarés à Nosy-Be ont été découverts et saisis et, 4 passagers non répertoriés au contrôle depuis Nosy-Be se trouvait également à bord dudit navire. L’exportation d’or étant formellement interdite, il s’agit d’un cas de contrebande et de faux et usage de faux ». C’est formidable mais, en ce 24 mars 2022, personne ne sait ce qu’il est advenu de ces 23,5 kg d’or. Evaporés.
Qu’importe, dans ma démarche, la suite et la finalité de ces affaires. Ce qui est important, sûr et certain, c’est que dans ces affaires de fuite et d’or, le responsable (« Tomponandraikitra ») de la Sécurité publique demeure le Contrôleur général de Police Randrianarison Fanomezantsoa Rodellys qui reste à son poste depuis le remaniement du 16 mars 2022.
Durant tout le mandat du Président Hery Rajaonarimampianina, les services de police avaient littéralement été dans l’ombre de l’Emmoreg (Etat-Major Mixte Opérationnel régional) ou de l’Emmonat Etat-Major Mixte Opérationnel National) et le corporatisme faisait fureur…
Actuellement, la Police devient de plus en plus visible. Mais quid de son efficacité ? L’irruption de membres armés et cagoulés de la Brigade criminelle, avec des écussons de la Police, laisse dubitatif. Dans mon article à ce sujet (ICI), j’avais écrit : « (…) des individus armés sont venus dans le but d’emmener avec eux Lionel Lelièvre (…) ». Mais les avocats de celui-ci, lors d’un point de presse le 21 mars 2021, ont bel et bien confirmé qu’il s’agissait d’éléments de la police : « Nous voulons attirer l’attention sur les agissements des éléments de la police qui ont littéralement pris d’assaut le Palais de Justice. Ce fut bel et bien une attaque, toutes les audiences n’ayant même pas été conduites à leur terme ».
Certes, le MSP travaille en étroite collaboration avec Interpol (Organisation internationale de police criminelle), mais cette façon peu cavalière de vouloir soustraire Lionel Lelièvre (de qui, de quoi et pour l’emmener où ?), n’honore ni la Police malagasy ni Interpol. L’absence de la famille de Danil Radjan lors de ce second procès, dans lequel Lionel Lelièvre et ses trois employés ont été acquittés au bénéfice du doute, laisse planer un autre… doute. Il y a des « liaisons dangereuses » entre le MSP et la famille Radjan. Il sait bien cacher son jeu, c’est clair et net. Ils ont intérêt à être fortement gardés à leur sortie de Tsiafahy, les 4 acquittés… Sinon, une évaporation d’une autre dimension aura lieu. Peut-être définitive. Nous voilà … prévenus
Rappels
En 2017, Moustafa Radjan avait échappé de peu à la mort. En pleine rue, à Ambatobe, deux motards avaient ouvert le feu avec un fusil à pompe de calibre 12 mm en le visant dans sa voiture (Lequotidien.re)
Le 3 novembre 2021, la Cour criminelle du tribunal d’Anosy Antananarivo, dans le cadre du kidnapping d'Anil Karim (Pharmacie Sophasu) par la bande à Lama, a tranché, sur le sort de Moustafa Radjan : condamnation à 20 ans de travaux forcés. J’avais dévoilé le mandat d’arrêt qui le concerne ainsi que son parcours peu glorieux de mafieux dans des précédents articles (ICI et ICI). Cela a fait suite aux révélations de Lama précédant son agonie. Inutile de revenir sur les détails mais, Moustafa Radjan n’était pas venu au tribunal pour entendre sa condamnation. Il était inculpé pour les motifs suivants : association de malfaiteurs; détention illégale d’arme de guerre qu’est l’AK-47 OU kalachnikov; séquestration de personnes. Pour ce dernier motif, il a été prouvé que lui et son frère Danil, auront été les commanditaires de la série de kidnapping dont Madagascar a été le théâtre depuis plus d’une décennie.
Etant déjà frappé d’une IST et maintenant officiellement condamné, le MST peut-il expliquer comment se fait-il qu’une semaine après, il se trouve à l’île de la Réunion ? Il est facilement reconnaissable avec sa balafre au visage due à une attaque sur lui du côté d’Ambatobe. Et c’est quelques jours après que des textes, signés en mon nom, ont été envoyés à la communauté indo-pakistanaise via whatsapp (ICI).
Aussi, lorsque je parle de « liaisons dangereuses » en ce qui concerne le MSP, ce ne sont pas des paroles en l’air. L’occasion fait le larron dit-on. Je rappelle que de 2007 à 2009, il a été Chef du Service des Investigations et des Renseignements auprès de la Direction de la Sécurité Présidentielle au Palais d’Ambohitsorohitra après avoir été Adjoint du Chef du service central de la surveillance du territoire au sein de la Direction des renseignements et de la surveillance du territoire, de 2006 à 2007. C’est-à -dire sous l’entière présidence de Marc Ravalomanana.
Le Président Andry Rajoelina est-il vraiment naïf ou simplement inconscient car un peu trop sûr d’un entourage qui a démontré ses limites ? Sait-il qu’il est de plus en plus entouré de chevaux de Troie l’entrainant loin de l’IEM initial, qu’il est de plus en plus endormi par des messieurs-dames aux jolis diplômes qui ne feront jamais que l’imiter et attendre ses ordres, tout en faisant leurs petites affaires ?
Je n’ai rien à prouver, moi, même si j’écris que 800 millions ariary sont liés au MSP... Je ne m’appelle ny Fanirisoa Ernaivo (qui ne perd rien pour attendre ce qu’elle va mériter) ni Fleury Rakotomalala qui me fait pitié.
Et puis, une bonne fois pour toutes : c’est lui seul, N°13, qui a été choisi par la majorité des électeurs en décembre 2018 et non pas ces parachutistes propulsés au pouvoir pour on-ne-sait plus quelles motivations ni au nom de qui ou de quoi ? Enfin, covid c’est déjà du passé mais « rivo-doza » c’est éternel et gouverner c’est prévoir. Toujours prévoir, même l’imprévisible…
Dans un prochain dossier, je vous parlerai des « ministres spoutnik » et ma façon de développement très rapidement le secteur agricole si j’étais ministre. Je ne le serais et ne voudrais jamais l’être mais mon plan reste le seul et l’unique qui colle avec les réalités et permet à la fois de donner du travail aux jeunes, d’avoir des débouchés sur l’Afrique proche et, par synergie, de rehausser le niveau de vie et le pouvoir d’achat des Malagasy dans toutes les régions.
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Jeannot Ramambazafy
Antananarivo, 24 mars 2022