Lors de l’ouverture du Colloque national foncier, le Président Andry Rajoelina a ordonné que « le démantèlement des réseaux d'accaparement de terres d’autrui, doit être une priorité sur l'Ile » (ICI). En parallèle, il faudrait aussi que cela soit appliqué au secteur de la protection de l’environnement. Car il y a eu mort d’homme très récemment, en matière d’exploitation illicite de ce qu’il reste de la forêt de l’Est de Madagascar.
Dans un jadis et naguère pas si éloigné que çà de notre époque actuelle, on disait à Madagascar : « rahoviana no ho lany ny ala atsinanana ? ». En clair, les Malagasy croyaient dur comme fer que la forêt de l’Est, s’étendant sur tout le littoral oriental de la Grande île de l’océan Indien, demeurerait inépuisable. Grave erreur avec la bêtise humaine…
Face à ce suicide environnemental volontaire, de la part d’insensés, Henri Rakotoarisoa, un sexagénaire bon pied bon œil, s’est levé. Depuis quelques années, à travers l’association villageoise VOI (« Vondron’Olona Ifotony » - littéralement : groupement de personnes à la base) Mialo (porter un message en malagasy), Pappy Henri luttait pour la protection de cette forêt et de sa biodiversité unique au monde. Avec VOI Mialo, Henri avait réussi tant bien que mal, a révélé et empêché plusieurs méfaits contre cette forêt, SA forêt. Du coup, les réseaux mafieux se sont mis en branle.
Ce qui suit, est la traduction en « style journalistique » d’un texte rédigé en malagasy, publié sur la page facebook « Fokonolona Ankazondandy Beparasy ». Le texte original a disparu, ainsi que toutes les photos allant avec, et l’appellation de la page est devenue « Fokonolona Ankazondandy,  organisme communautaire ». Heureusement que notre jeune confrère, Maminirina Rado, de Midi Madagasikara, était vigilant.
« Selon une publication de « Fokonolona Ankazondandy Beparasy », le septuagénaire a été placé en détention en attendant son procès du 27 septembre 2021 : « Le 13 septembre, il a été convoqué par téléphone par la gendarmerie… pour discuter d’un sujet spécifique, il (Henri Rakotoarisoa) a répondu ne pas pouvoir y aller à cause d’un problème de santé. Les gendarmes l’ont rappelé en prétextant qu’ils allaient l’épingler s’il n’obtempérait pas. Il a dû y aller le 16 septembre malgré ses problèmes de santé. Il a tout de suite été présenté au tribunal d’Ambatolampy et a été placé sous MD (mandat de dépôt). Il a été accusé, selon toujours cette page, d’avoir troublé l’ordre public en amenant de manière répétée des gendarmes chez les habitants de Vohitsarahasina Andramasina, les empêchant de vaquer à leurs activités professionnelles (…) ».
Par la suite, il a été libéré de manière provisoire (LP) sous la pression de nombreuses entités de protection de l’environnement, associations et personnes physiques. Ici, je pointe du doigt le système judiciaire que l’actuel président du Syndicat des Magistrats de Madagascar (SMM) défend bec et ongles malgré le rendu de jugements qui a tendance à défendre plus les malfaiteurs que la veuve et l’orphelin. Car, dans cet énième combat du pot de terre contre le pot de fer, il apparaît donc que les photos apportées dans le dossier, n’ont pas été considérées et a plutôt été le déclencheur de cet assassinat pur et simple commis le 1er juin 2022.
Le ministère concerné a déclaré que des émissaires vont descendre sur le terrain comme tout médecin après la mort qui se respecte… En passant, le changement au poste de ministre n’est une excuse en rien… Ces « iraka » vont-ils allés jusqu’au bout des choses, à commencer par savoir qui est le propriétaire du camion immatriculé 0793 TBH, pris en photo peu de temps avant l’arrestation d’Henri Rakotoarisoa ? Vont-ils réellement et effectivement remonter une filière, que dis-je ! Un réseau mafieux qui inclut, sans qu’un doute ne soit permis, des élus, des nommés et des membres des forces de l’ordre ? Le doute est plus que permis, et loin des grandes villes, l’argent n’a pas d’odeur…
Aussi, je m’adresse, ici au Président de la République, Andry Rajoelina. Il ne faut pas s’arrêter en si bon chemin, il faut foncer comme dans le foncier. Car il y a, dans l’assassinat de ce notable de deux ans mon aîné, un réseau mafieux à démanteler d’urgence ! Un Henri Rakotoarisoa qui avait prédit que si ce manège et ces manigances continuaient, en moins d’une décennie, c’en sera fini de la forêt de l’Est de Madagascar. Et que dire dans les autres régions, pillées à outrance sans songer aux générations futures qui hériteront de déserts arides incultivables, entrainant la mort d’une faune et d’une flore uniques au monde. Pour le moment.
Je ne sais plus quelle balle est dans quel camp. Mais si bon ordre et logique ne priment pas, les assassins d’Henri Rakotoarisoa risquent d’être libres comme l’air, bientôt, et leurs commanditaires jamais connus ni punis. Qui recommenceront, liasses de billets de 20.000 ariary comme « motivation »… Et c’est là le plus grand drame, car le scénario va se répéter jusqu’à ce que l’île rouge devienne l’île ocre, couleur du sable ravageur.
Mais le plus terrible encore, c’est le « soatoavina malagasy » incluant le respect des « ray aman-dreny » (parents, dirigeants, notables, sages, personnes âgées) qui en prend un très sale coup.
Valeurs malagasy (Soatoavina malagasy)
Ce ne sont pas des idées en l’air ni des notions fantasmagoriques ! Les valeurs malgaches ne s’apprennent pas seulement à l'école ; elles ne doivent pas être un vague prétexte lors de l'exécution de rituels malagasy tels que la visite de la famille d’une personne décédée (« famangiana manjo »), la présentation de vœux aux parents de fiancés (« fanateram-bodiondry »), le « famadihana » (changement de linceul et non retournement des morts).. . Rien de tout cela. Les Valeurs malagasy sont faites pour être vécues au quotidien et appliquées dans n'importe quel domaine de la vie dans lequel vous évoluez. Et cela commence par le respect des « ray man-dreny » cités plus haut.
Jeannot Ramambazafy – 10 juin 2022