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Home Vie politique Chronique Gilbert Harisoa Raharizatovo. Un personnage ne laissant jamais indifférent s’en est allé

Gilbert Harisoa Raharizatovo. Un personnage ne laissant jamais indifférent s’en est allé

La nouvelle est tombée sur toutes les chaines audiovisuelles malagasy, ce 25 mars 2021, à partir de 13 h : le journaliste Gilbert Raharizatovo est décédé ! Et les souvenirs remontent dans ma mémoire, en ce qui concerne ce personnage à la voix grave sans pareille, qui n’a jamais laissé personne indifférent par sa stature physique et un bagout bien maîtrisé... Il en jetait, c’est indéniable.

CITE Ambatonakanga: Jeannot Ramambazafy (en bleu) et Rémi Rahajarizafy (auteur d’un ouvrage sur le 13 mai 1972), accueillant le ministre Gilbert Raharizatovo, ancien de la TVM, pour la célébration de la Journée internationale de la Liberté de la Presse, le 3 mai 2009

Mais qui fut l’ami Gilbert Harisoa Raharizatovo ?

Historien de formation, issu d'une famille protestante et ayant effectué fait ses études secondaires à l'école protestante d'Ambatomanga (dans le Vakiniadiana), Gilbert Raharizatovo a été un cadre enseignant de l'église réformée FJKM puis Directeur du lycée protestant de Diego Suarez. En 1993, il a fait partie de l’aventure du projet de télévision avorté dénommé « Maeva 7 », initié par le journaliste Maurice Grimaud qui enverra Gilbert faire un stage spécifique à La Réunion.

Puis il entre dans la fonction publique et accède au rang de journaliste politique au sein des deux chaînes publiques Rnm pour la radio et Tvm pour la télévision -dont il fut le Directeur un moment-. Sur la première, il a créé les émissions « sava-ravina » et « Avara-patana » et sur la seconde « Imaso ». Son face-à-face avec l’amiral Didier Ratsiraka, de retour de son exil parisien, en 1996, est bien resté dans la mémoire collective.

Son aventure dans l’administration publique (« Fanjakana ») durera près de 6 années et il deviendra un politique tout court ayant été très connu par et pour ses analyses politiques. «Ratsirakiste» et très francophile, il a côtoyé les grands hommes politiques comme Manandafy Rakotonirina, Germain Rakotonirainy, Rakotovao Razakaboana, Me Francisque Ravony… qui sont devenus ses maîtres comme il l’a lui-même dit, un jour.

En 1998, avec «Vivre», une entité pseudo-politique vraiment inventée de toutes pièces, Gilbert Raharizatovo a réussi à vaincre le pasteur Andriamanjato dans son fief d’Ambohimanarina, lors des législatives du 17 mai de cette année. En fait, ce fut un vote sanction pour le Pasteur car le Député Raharizatovo ne fit pas long feu à l’Assemblée nationale de Tsimbazaza…


Lors des évènements de 2002, la postérité se souviendra de Gilbert Raharizatovo à travers son ouvrage de 356 pages, intitulé : « Madagascar 2002 : Genèse et silences d’une crise ». Présentation de son auteur à travers quatre questions précises :

Pourquoi un ouvrage sur 2002 ? Ne serait-il mieux de parler du temps présent en tant que journaliste ?

Gilbert Raharizatovo :« C’est une question qui revient bien souvent. Il faut tout de même faire très attention car la crise de 2002 est quelque chose de très spécifique dans notre histoire nationale. C’est un grand tournant, voire une véritable cassure. Les phases préparatoires de cet événement ont commencé depuis la mise en application de la politique de libéralisation en plein milieu des années 80. Le mouvement populaire de 91 aurait dû avoir les spécificités de 2002 mais les conditions n’étaient pas encore réunies à l’époque. L’église a pu faire émerger les sociétés civiles mais elles étaient à l’époque encore trop faibles pour se constituer en force anti-parti, étant obligées de puiser ses personnes ressources dans le monde politique. Le renouvellement de la classe politique ne pouvait pas se réaliser. L’échec est inévitable avec l’amalgame église et parti politique dans la fameuse « Herivelona ». En 2002, c’est différent. Le représentant des sociétés civiles qui va être épaulé par l’Eglise pour prendre le pouvoir est à l’intérieur de l’Eglise même et de surcroît un homme idéal sur une plate-forme d’empire. Le mouvement de translation de l’empire vers le pouvoir se faisait dans une aisance extraordinaire. Les partis politiques ne sont que des accessoires mais non des partenaires incontournables. Ils étaient remplacés par l’église et l’entité empire. 2002 est donc une cassure et cela explique tout ce qui se passe autour de nous actuellement. Premier résultat palpable : la mort de tous les partis politiques. Deuxième résultat : système ultra libéral et le rêve du gigantisme. Donc 2002 explique tout. C’est nécessaire d’écrire d’une manière objective ce qui s’était passé réellement et c’est l’importance de ce travail. D’ailleurs dans ce livre j’arrive jusqu’en 2008 ».

Qu’est-ce que vous entendez par silences d’une crise ? :

Gilbert Raharizatovo : « Trop de tabous, de controverses et des non-dits dans 2002. Ils sont tus pour la plupart exprès pour préserver des intérêts quelconques ».

Citez- nous quelques chapitres...

Gilbert Raharizatovo : « Cet ouvrage est un document. J’ai quitté la division classique de trois chapitres pour créer un livre de douze chapitres. Voici quelques-uns : -Un homme, un empire et le pouvoir ; -Jeux de Fanorona dangereux ; -Trop de religion tue la politique ; -Suicide collectif des partis ; -La forteresse de Ravalomanana sur les ruines de l’AREMA ; -Les barrages de 2002 ; -Les ouvriers politiques, le zélés et les profiteurs de situation.

Tous les acteurs de 2002 sont-ils cités dans leurs rôles respectifs ?

Gilbert Raharizatovo : « Pourquoi les occulter ? J’ai cité quelques 250 noms d’importantes personnalités nationales ou étrangères. Elles sont des chefs d’Etat, des hommes politiques, des opérateurs économiques, des militaires, des journalistes, des hommes d’église, des magistrats. Bref des hommes et des femmes qui ont joué des rôles principaux ou secondaires dans cette crise. J’ai listé leurs noms dans mes dernières pages »./.

Durant la transition Gilbert Raharizatovo a été ministre de la Communication et du Patrimoine et aussi ministre du Tourisme. C’est durant cette période qu’il créé son parti RPM (Rassemblement Pour Madagascar). En 2011, Gilbert Raharizatovo a co-présidé l’éphémère «Plateforme pour la stabilité et la reconnaissance internationale» (PSRI), avec Patrick Ratsarazafy et Patrice Tsihoaiza. Evincé de son poste de ministre, il devient alors CST (Conseiller supérieur de la Transition) qui a supplanté le Sénat supprimé par le Président de la Transition.


Depuis, il est apparu dans des émissions télévisées pour pousser ses coups de gueule sur des sujets très divers. L'une des toutes dernières remonte à juin 2020, à propos de l’arène « Tanamasoandro » dans l’enceinte (« Rova ») du Palais de la Reine à Manjakamiadana. Évidemment que l’on se connaissait. De son vivant, sa forte personnalité et son franc-parler ont toujours été confondus avec un caractère hautain («Fiavonavonana»). Quoi qu’il en soit, l’aventure terrestre de ce personnage n’ayant jamais laissé indifférent, s’est arrêtée aujourd’hui 25 mars 2021.

3 mai 2009, au CITE Ambatonakanga, de gauche à droite : Gabriel Ramananjato (+), Paul Abraham (+), "Big" Max Ratsimandisa (+), Georges Rakotondrasoava (+), Augustin Andriamananoro, Gilbert Raharizatovo (+), Rémi Rahajarizafy, Moks Razafindramiandra (+)

De quoi est-il mort, se sont demandé et se demandent encore de très nombreuses personnes ? Gilbert Raharizatovo, 72 ans, a succombé d’une bronchite chronique, vers 9h, ce matin du 25 mars 2021. Non, ce n’était pas directement ce fichu covdid-19. La preuve en est qu’il sera enseveli le samedi 27 mars 2021 dans le tombeau familial du côté d’Ambatomanga Manjakandriana.


A présent, ils sont tous réunis au Paradis des journalistes

Voici mon hommage :

« Le livre de la vie est le livre suprême qu'on ne peut ni fermer ni rouvrir à son choix.

On voudrait revenir à la page où l'on aime, et la page où l'on meurt est déjà sous nos doigts »

(Alphonse Marie Louis de Prat de Lamartine dit Alphonse de La Martine, (Poète français, 21 octobre 1790-28 février 1869).

Au nom de toute l’équipe de madagate, je présente ses sincères condoléances à toute la famille, sans exception, de Gilbert Harisoa Raharizatovo.

Jeannot Ramambazafy

Mis à jour ( Vendredi, 26 Mars 2021 04:35 )  
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