Me Abdoulaye Wade et Youssou N'Dour devenus adversaires politiques par l'entêtement du premier
Eh ben non. Malgré les traditionnels vœux (pieux) de « Bonne année », 2012 démarre sur une fausse note pour l’ensemble du continent africain. Ce, dans le domaine de la politique en général, des élections en particulier.
En effet, malgré ce que stipule la Constitution sénégalaise (deux mandats présidentiels consécutifs uniquement), le président Abdoulaye Wade entend briguer un troisième mandat le 26 février prochain. Certes, un adage dit : « jamais deux sans trois ». Mais tout de même, où se situe l’alternance, surtout lorsqu’on sait que Me Wade va sur ses 86 ans (né le 29 mai 1926) ? Quand, dès lors, l’exemple du Sud-africain Nelson Mandela sera-t-il suivi ?
Au fait, que stipule la Constitution du Sénégal, à propos de son Président de la république ?
TITRE III - DU PRÉSIDENT DE LA RÉPUBLIQUE
Article 26 :
Le président de la République est élu au suffrage universel direct et au scrutin majoritaire à deux tours.
Article 27 :
La durée du mandat du président de la République est de cinq ans. Le mandat est renouvelable une seule fois. Cette disposition ne peut être révisée que par une loi référendaire ou constitutionnelle.
Article 28 :
Tout candidat à la Présidence de la République doit être exclusivement de nationalité sénégalaise, jouir de ses droits civils et politiques, être âgé de 35 ans au moins le jour du scrutin. Il doit savoir écrire, lire et parler couramment la langue officielle.
Me Wade aura ramé 27 ans avant d'accéder au pouvoir suprême, le 1er avril 2000. Il a même été jeté en prison le 15 mai 1993 en tant qu'opposant accusé de l'assassinat du vice-président du Conseil consitutionnel de l'époque, Babacar Sèye. Il sera relâché faute de preuves...
Il n’y a aucune interprétation possible sur ce passage de la loi fondamentale sénégalaise. Mais comment diable Me Wade a-t-il réussi à faire passer sa troisième candidature alors ? Sans doute grâce à un petit toilettage comme tous les anciens présidents malgaches ont le secret… Officiellement, il a été porté candidat par les membres de son parti: le Parti Démocratique Sénégalais ou PDS. "Araka ny fangatahin'ny be sy ny maro", comme on le dit et fait chez les politiciens à Madagascar. C'est-à -dire, à la demande générale. Tsss !!
Qui ne connaît pas l'auteur-compositeur de "7 seconds" ?
Face à la velléité d’un vieillard -qui, de sage est devenu dangereusement hors-la-loi (ne respectant pas le texte fondamental)-, le célèbre chanteur Youssou N’Dour, bientôt 53 ans (né le 1 octobre 1959), a décidé de se porter candidat également. C’est sa manière de protester contre cette troisième candidature, racine de tous les problèmes socio-politiques sénégalais à venir.
Par ailleurs, un article de la Constitution sénégalaise m’a fait tiquer :
Article 2 :
La capitale de la République du Sénégal est Dakar. Elle peut être transférée en tout autre lieu du territoire national.
Il est fort possible que le(s) candidat(s) d’opposition en feront un outil politique pas très catholique… Souvenons-nous des fameux états fédérés décrétés par l’amiral Didier Ratsiraka en 2002. Rappelons que Me Abdoulaye Wade a été élu en 2000 et réélu en 2007. Mais il est dit que le pouvoir absolu corrompt absolument. Non, vraiment, 50 ans après, René Dumont a encore et toujours raison: l’Afrique noire est mal partie. Et ce très mauvais exemple de Me Wade va être suivi par d’autres présidents décidés à se maintenir dans un pouvoir à vie.
Le Président Andry Rajoelina et le Président Abdoulaye Wade, à Dakar le 28 mai 2009. A cette époque, Me Wade était considéré comme un modèle de démocrate en Afrique noire
En 2002, lors du Sommet pour le développement durable à Johannesburg, j’ai eu l’occasion de serrer la main à Me Wade. Une personnalité forte et un peu décalée des autres fils de la FrançAfrique, présents à ce moment… Mais 10 ans après, il choisira donc le pouvoir… durable. A l’époque, Jacques Chirac ignorait complètement qui était Marc Ravalomanana.
En voulant s’accrocher ainsi au pouvoir, quelles sont les chances de la jeunesse africaine, sénégalaise dans le cas présent, de participer au devenir de sa nation respective ? C’est de l’infantilisation pure et simple. Alternance et passage de témoin ne seront que des slogans pour les politiciens africains qui, au déclin de leur vie, persistent à faire la dernière connerie à ne pas faire. Celle qui sera fatale pour les générations à venir elles-mêmes. Encore un « raiamandreny » (en malgache : aîné, sage par expérience) qui n’aura pas su se respecter en tant que tel. L'essentiel étant de savoir s'effacer au bon moment. Alors, Bonne année ?...
Jeannot RAMAMBAZAFY – 3 janvier 2012