La majorité des journalistes malgaches n’ont, certes, pas les moyens d’informer et de communiquer semblables aux grandes agences de la presse internationale, mais il leur suffirait de chercher -et de bien chercher grâce aux Ntic- pour faire comprendre aux citoyens malgaches et ceux du monde entier que les U.S.A., non seulement ne respectent pas les autres, mais ne se respectent pas eux-mêmes. Trop imbus du fait qu’ils se croient les « gendarmes du monde ». Lorsque le temps me le permettra, je traduirai le dossier suivant en malgache. Il faudra bien, un jour, que la presse écrite malgache parle vraiment des réalités américaines, concernant ces fameux droits de l’homme. Et non pas mettre toujours à la « Une », des déclarations « wongiennes » (du nom d’Eric Wong, le dernier factotum verbal de l’administration Obama à Madagascar) qui diabolisent tout un peuple mal informé, sinon désinformé délibérément.
Jeannot Ramambazafy
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Andranik Migranyan
Les prétentions de Washington au rôle de leader mondial du respect des droits de l’homme et des valeurs démocratiques sont dénuées de fondement, car les Etats-Unis sont loin de donner l'exemple dans ce domaine, selon un rapport du ministère russe des Affaires étrangères sur la situation des droits de l’homme aux Etats-Unis. Les experts du ministère se sont basés sur les renseignements vérifiés émanant de sources internationales et nationales fiables, selon Andranik Migranyan, directeur du bureau new-yorkais de l’Institut de la démocratie et de la coopération : « L’Amérique est un pays de grandes traditions démocratiques. Mais un regard attentif sur l'organisation de la vie publique amènera à la constatation qu’il existe énormément de problèmes interdisant aux Etats-Unis de se positionner en modèle ou en gourou enseignant la meilleure façon de respecter les droits de l’homme ».
« La raison pour laquelle les Etats-Unis n’autorisent pas les observateurs à assister au déroulement du scrutin, est la possibilité de fraudes. Il ya tant de gens qui ne veulent pas ou ne peuvent pas voter. De surcroît le système d’«octroi du droit de vote » est en train de revenir dans certains Etats américains. Des barrières artificielles se créent pour évincer des électeurs potentiels que sont les travailleurs et les personnes vivant au-dessous du minimum vital ». Cheri Honkala, candidate du Parti des verts à la vice-présidence des Etats-Unis dans La Voix de la Russie.
Alexeï Pouchkov
"Jusqu’ici la Russie n'avait rien à redire des processus démocratiques aux Etats-Unis. Mais aujourd’hui il est temps de changer les choses", a déclaré Alexeï Pouchkov, président du comité des affaires internationales de la Douma.
Ainsi, avant l’élection présidentielle américaine du 6 novembre 2012, les parlementaires russes ont adopté une série de recommandations à l’intention des pouvoirs exécutif et législatif américains. Les Etats-Unis devraient non seulement montrer aux autres comment respecter les droits de l’homme, mais aussi et surtout commencer par les respecter eux-mêmes.
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MOSCOU, 19 octobre 2012 - Les mauvais traitements infligés aux enfants, les ingérences dans la vie privée, les violences policières, les prisons secrètes et les restrictions de la liberté d'expression constituent les principaux problèmes en matière de respect des droits de l'Homme aux Etats-Unis, indique un rapport du ministère russe des Affaires étrangères présenté à la Douma (chambre basse du parlement russe).
Il s'agit du deuxième rapport de ce genre préparé par le ministère. Le premier, publié en 2011, était consacré à la situation des droits de l'Homme aux Etats-Unis et dans les républiques Baltes.
Le document rédigé cette année constitue une réaction aux critiques adressées à Moscou par les gouvernements des pays occidentaux et les organisations internationales de protection des droits de l'Homme. Le rapport traite uniquement des problèmes qui se posent dans ce domaine aux Etats-Unis.
Selon une source au sein du parlement russe, des centaines de milliers d'enfants font l'objet de mauvais traitements aux Etats-Unis, ce qui entraîne la mort d'un grand nombre d'entre eux (1.600 personnes en 2010). Le rapport indique que la punition corporelle est officiellement autorisée dans 19 Etats et que dans certains établissements d'enseignement, les élèves sont "soignés" au moyen de décharges électriques.
"Les Etats-Unis demeurent le pays qui compte le plus grand nombre de détenus au monde: 2,2 millions de personnes. Le problème des prisons secrètes de la CIA n'est toujours pas réglé. Elles sont situées en Pologne, en Afghanistan, en Irak, en Thaïlande, au Maroc, à Djibouti, en Roumanie et en Lituanie", a affirmé l'interlocuteur de l'agence, citant le rapport de la diplomatie russe.
"Entre 2004 et 2007, le nombre de messages électroniques interceptés par les services spéciaux américains a augmenté de 3.000%", lit-on dans le rapport.
Les diplomates russes ont également dénoncé les mesures rigoureuses adoptées par la police à l'encontre des journalistes couvrant les actions de protestation dans les villes américaines.
RIA Novosti
Après 10 ans de débats publics acharnés et de violentes querelles partisanes, les Etats-Unis sont tombés dans un compromis qui fait l’unanimité sur le sujet de la torture et qui repose sur deux piliers injustifiables : l’impunité dans le pays et l’externalisation (rendition en Anglais - NdT) des suspects à l’étranger.
Le président Obama a fermé les "sites noirs" de la CIA, ces prisons secrètes où les agents étasuniens se salissaient les mains en pratiquant le supplice de l’eau et en tapant les gens contre les murs. Mais grâce à l’externalisation - le transfert des suspects de terrorisme dans les prisons de pays qui torturent- et à des pratiques apparentées, son administration a transféré les violations des droits humains à l’Afghanistan, la Somalie, etc. C’est ainsi que les Etats-Unis évitent d’être stigmatisés comme tortionnaires tout en tolérant tacitement ces mêmes abus et en bénéficiant des renseignements qui peuvent être obtenus grâce à eux.
Cette "solution" au problème de la torture répond peut-être aux besoins d’un pays très divisé sur la politique à suivre. Elle ne peut pas, cependant, satisfaire longtemps une communauté internationale déterminée à poursuivre les violations des droits humains en vertu d’une juridiction universelle. Elle court aussi le risque d’un autre scandale sordide de torture qui entachera encore plus la réputation des Etats-Unis aux yeux de ses alliés dans le monde.
La mise au point d’une nouvelle forme de torture
La propension de l’Amérique moderne à utiliser la torture ne date évidemment pas du 12 septembre 2001. Elle remonte au début de la Guerre Froide et s’explique par une approche des droits de l’homme truffée de contradictions. Officiellement Washington est contre la torture et a conduit le monde à signer la Déclaration Universelle des Droits de l’Homme des Nations-Unies en 1948 et la Convention de Genève en 1949. Mais en même temps, la CIA s’est mise en secret à développer de nouvelles techniques ingénieuses de torture en violation des mêmes conventions internationales.
De 1950 à 1962, la CIA a mené des recherches secrètes pour percer le code de la conscience humaine, un véritable projet Manhattan de l’esprit qui a abouti à deux découvertes fondamentales pour une nouvelle forme de torture psychologique. Au début des années 1950, pendant sa collaboration avec la CIA, le fameux psychologue canadien, le docteur Donald Hebb a découvert qu’en utilisant des lunettes goggles, des gants et des cache-oreilles, il pouvait mettre les étudiants volontaires dans un état proche de la psychose en les privant de stimulation sensorielle. Au même moment, deux éminents physiciens du centre médical de l’Université Cornell qui collaboraient aussi avec l’Agence, ont découvert la technique de torture la plus effroyable utilisée par le KGB, la police secrète soviétique ; elle consistait à forcer les victimes à rester debout pendant des journées de suite de sorte que leurs jambes enflaient douloureusement et qu’ils se mettaient à avoir des hallucinations.
En 1963, après une décennie de recherches pour contrôler l’esprit, la CIA a codifié ces découvertes dans un petit manuel secret d’instructions, le manuel d’interrogatoire des services secrets KUBARK. Il est devenu la base d’une nouvelle méthode de torture psychologique qui s’est répandue dans le monde entier et dans la communauté des services secrets étasuniens. Pour éviter d’être impliquée directement dans la torture, la CIA a formé d’autres agences pour qu’elles fassent le sale travail dans des prisons du Tiers Monde comme les fameuses "cages à tigre" du Sud Vietnam.
La guerre de Corée a ajouté une dimension défensive aux recherches sur le contrôle de l’esprit. Après que la terrible torture psychologique infligée par les Nord-Coréens aux prisonniers de guerre étasuniens ait conduit ces derniers à accuser leur propre pays de crimes de guerre, le président Dwight Eisenhower a ordonné que tous les hommes en service susceptibles d’être capturés reçoivent un entraînement à la résistance que l’armée de l’air a vite surnommé SERE (survivre, s’évader, résister et s’échapper)
Après la fin de la Guerre Froide en 1990, Washington a recommencé à promouvoir les droits de l’homme et a ratifié la Convention de l’ONU contre la Torture en 1994 qui interdisait d’infliger "d’extrêmes" souffrances psychologiques et physiques. La CIA a arrêté les formations à la torture qu’elle donnait dans le Tiers Monde, et le Département de la Défense a fait rentrer les manuels de contre-insurrection qui contenaient les instructions pour l’utilisation des violentes techniques d’interrogatoire. En surface, donc, Washington avait résolu la contradiction entre sa position de principe contre la torture et sa pratique de la torture.
Mais quand le président Bill Clinton a envoyé la Convention de l’ONU au Congrès pour qu’elle soit ratifiée en 1994, il a ajouté un texte (rédigé 6 ans auparavant par l’administration Reagan) qui contenait des "réserves" diplomatiques. De fait, ce texte entérinait l’interdiction des abus physiques mais pas celle de la torture psychologique.
Un an plus tard, quand l’administration Clinton a lancé sa campagne secrète contre al-Qaeda, la CIA a évité d’être directement impliquée dans les violations des droits humains en envoyant 70 suspects de terrorisme dans des pays alliés pour qu’ils y soient torturés physiquement. Cette pratique appelée "externalisation extraordinaire" (extraordinay rendition en Anglais - NdT) avait supposément été bannie par la Convention de l’ONU et par conséquent une nouvelle contradiction entre les principes droits-de-l’hommistes de Washington et ses actions a été enterrée à la façon d’une mine politique qui a explosé avec une force phénoménale 10 ans plus tard avec le scandale d’Abu Ghraib.
Normaliser la torture
Le 11 septembre 2001, juste après sa première déclaration à une nation en état de choc, le président George W. Bush a donné au personnel de la Maison Blanche un grand nombre d’ordres secrets pour l’utilisation de méthodes d’interrogatoires musclées, et il a ajouté : "Tant pis pour ce que les hommes de loi internationaux diront, on va botter quelques culs."
Peu après la CIA a commencé à ouvrir des "sites noirs" qui se sont répandus, au cours des années suivantes, de la Thaïlande à la Pologne. Elle a aussi loué une flotte d’avions pour externaliser des détenus soupçonnés de terrorisme vers des pays alliés et a remis à l’honneur les tortures psychologiques abandonnées à la fin de la Guerre Froide. En fait, l’Agence a loué les services d’anciens psychologues de l’armée de l’air pour inverser les techniques d’entraînement SERE en les faisant passer de défensives à offensives, créant ainsi les tortures psychologiques qui ont fait depuis leur chemin dans le monde entier sous l’euphémisme de "techniques avancées d’interrogatoire".
Parallèlement, à la fin de 2002, le secrétaire à la Défense, Donald Rumsfeld, a nommé le général Geoffrey Miller à la tête de la prison de Guantanamo à Cuba et lui a donné des pouvoirs étendus pour mettre au point une attaque en trois étapes sur les récepteurs sensoriels, l’identité culturelle et la psyché individuelle de ses nouveaux prisonniers. Suite à la visite du général Miller à la prison d’Abu Ghraib en septembre 2003, le commandant étasunien d’Irak a donné l’ordre d’utiliser la torture psychologique dans les prisons étasuniennes de ce pays, y compris la désorientation sensorielle, la douleur auto-infligée et une innovation récente, l’humiliation culturelle par le contact avec des chiens (qui selon les Américains est psychologiquement intolérable pour les Arabes). Ce n’est pas par hasard que, sur une photo fameuse, la soldate anglaise Lynndie, gardienne militaire de la prison d’Abu Ghraib, promène un détenu iraquien nu au bout d’une laisse.
Deux mois après que CBS News ait diffusé ces fameuses photos d’Abu Ghraib en avril 2004, 35% des Etasuniens continuaient à penser que la torture était acceptable, selon un sondage. Pourquoi une telle tolérance envers la torture ?
Une explication partielle pourrait être que dans les années qui ont suivi le 11 septembre, les médias-système ont multiplié sur les écrans grands et petits des Etats-Unis les images fascinantes d’abus. Au milieu de ce torrent de simulations de torture, deux icônes médiatiques ont contribué à normaliser les abus dans l’esprit de beaucoup d’Américains - la fiction "du scénario de la bombe à retardement qui fait tic-tac" et Jack Bauer, l’agent du contre-terrorisme, héros de "24h chrono", la série télévisée de la Fox.
Dans les mois qui ont suivi le 9 septembre, le professeur de Harvard, Alan Dershowitz, a fait campagne sur tous les médias en disant que l’usage de la torture serait nécessaire au cas où des agents des services secrets étasuniens découvriraient qu’un terroriste avait posé une bombe atomique à retardement dans le Square du New York’s Times. Bien que ce scénario soit une fiction dont la seule base est un nébuleux article philosophique académique publié en 1973, l’image de ces bombes à retardement a vite envahi les médias et elles sont devenues une réalité pour beaucoup d’Etasuniens - surtout grâce à "24h chrono" dont chaque épisode commençait par une énorme pendule au tic-tac menaçant.
Pendant les 5 premières saisons de la série, les spectateurs ont assisté à 67 scènes de torture où on voyait l’agent Jack Bauer recourir à la torture d’une manière qui paraissait ponctuelle, efficace et souvent séduisante. Lorsque la série prit fin en mai 2010, la simple mention de l’agent Bauer était devenue un argument convainquant en faveur de la torture et tout le monde s’en servait, du juge de la Cour Suprême, Antonin Scalia, à l’ancien président Bill Clinton.
Pendant qu’il était en campagne pour sa femme Hillary, Clinton, le président démocrate de 2008, a cité "24h chrono" pour justifier le fait que les agents de la CIA violent la loi pour torturer en cas d’extrême urgence. "Quand Bauer y va tout seul et est prêt à en supporter les conséquences," a dit Clinton à Meet the Press, "on dirait que ça marche toujours mieux."
Impunité en Amérique
Une telle normalisation des "techniques avancées d’interrogatoire" a généré un soutien populaire à l’impunité de ceux qui se rendent coupables de crimes de torture. Pendant les deux premières années du mandat du président Obama, l’ancien vice-président, Dick Cheney, et sa fille Liz sont apparus des dizaines de fois à la TV pour accuser son administration de mettre en danger la sécurité des Etats-Unis en enquêtant sur les agents de la CIA qui avaient utilisé ces techniques d’interrogatoires du temps de Bush.
Ironiquement, l’assassinat par Obama d’Osama bin Laden en mai 2011 a donné aux néoconservateurs la possibilité d’augmenter encore l’impunité dans le pays. Comme une sorte de chœur a capella, les anciens officiels de l’administration Bush sont venus à la télévision pour affirmer sans la moindre preuve que la torture avait permis aux Navy SEALs de trouver Bin Laden. Dans les semaines qui ont suivi le procureur général Eric Holder a annoncé que les enquêtes sur les violents interrogatoires de la CIA étaient closes et qu’il ne serai plus possible de traduire les tortionnaires de la CIA en justice. (Il est frappant, n’est-ce pas, que le seul cas de "torture" qui ait été amené devant la justice par l’administration soit celui d’un ancien agent de la CIA, John Kiriakou, qui avait révélé le nom de quelques tortionnaires.)
A partir du 10ième anniversaire du 11 septembre, le pays a fait un pas de plus vers l’impunité totale en réécrivant l’histoire du tout au tout. Dans un mémoire publié le 30 août 2011, Dick Cheney a affirmé que grâce aux "techniques avancées d’interrogatoire" Abu Zubaydah, un terroriste endurci chef d’al-Qaeda, s’était transformé en "un puits d’informations qui avaient sauvé des milliers de vie."
Deux semaines plus tard, le 12 septembre 2011, l’ancien agent du contre-terrorisme du FBI, Ali Soufan, a fait paraître ses propres mémoires où il déclare avoir été le premier à interroger Abu Zubaydah en 2002 en utilisant non la torture mais des techniques empathiques qui ont permis d’obtenir rapidement "d’importants renseignements précis" sur "le rôle de KSM [Khalid Sheikh Mohammed] en tant que concepteur des attaques du 11 septembre."
Ces premiers succès du FBI ont mis en colère le directeur de la CIA, George Tenet, qui a alors envoyé, pour interroger Zubaydah, ses propres interrogateurs de Washington sous la direction du docteur James Mitchell, l’ancien psychologue de SERE, qui avait mis au point les cruelles "techniques avancées". L’équipe de la CIA a augmenté progressivement "les moyens de pression", passant du "premier niveau de privation de sommeil" à la nudité, la privation de sons et l’enfermement dans une boîte (de la taille d’un cercueil ndt), mais les méthodes extrêmes du Dr. Mitchell n’ont permis d’obtenir "aucun renseignement".
Cependant, à chaque étape de cette escalade d’abus, on faisait venir Ali Soufan qui interrogeait Zubaydah calmement en Arabique et c’est lui qui a réussi a lui faire dire tout ce qu’il savait. Le résultat de ce test scientifique crevait les yeux : l’empathie du FBI était constamment efficace tandis que la cruauté de la CIA était contreproductive.
Mais cette vérité fondamentale encore fragile a été occultée par la censure et la casuistique néoconservatrice de la CIA. Dans son récit de deuxième main, Cheney fait l’impasse sur la présence du FBI. De plus la CIA a exigé d’Ali Soufan qu’il supprime 181 pages de ses mémoires ce qui a réduit les chapitres où il parle de son expérience en tant qu’interrogateur a un brouillard de lignes noircies que personne ne peut comprendre.
La tentative de l’Agence de réécrire le passé continue jusqu’à aujourd’hui. En avril dernier, Jose Rodriguez, un ancien chef des Services Clandestins de la CIA a publié des mémoires, qui elles n’ont pas été censurées, sous le titre provocateur : "Des mesures difficiles : Comment les actions agressives de la CIA après le 11 septembre ont sauvé des vies étasuniennes". Dans un interview télévisé pour la promotion de son livre, il a affirmé c’était de la "connerie" de dire les méthodes empathiques du FBI avaient été couronnées de succès.
Comme l’histoire a été réécrite pour que les Etasuniens croient que les "interrogatoires avancés" de la CIA ont été fructueux, ceux qui ont perpétré ces tortures n’ont pas été inquiétés et le processus d’impunité et d’immunité a été établi pour le futur.
L’externalisation de la torture sous Obama
En plus des pressions des Républicains, la vision agressive du président Obama sur la sécurité nationale a contribué à maintenir une indéniable continuité avec beaucoup d’orientations politiques controversées de ses prédécesseurs. Il n’a pas seulement maintenu les commissions militaires controversées de Guantanamo et combattu les tribunaux pour bloquer les poursuites contre des tortionnaires mais il a surtout permis à la CIA de continuer ses vols d’externalisation.
Pendant la campagne présidentielle de 2008, Obama a, plus que tout autre candidat, exprimé son opposition absolue à l’implication directe et indirecte des Etats-Unis dans la torture. "Nous devons être clairs et sans équivoque. Nous ne pratiquons pas la torture. Point," a-t-il dit et il a ajouté : "Ce sera ma position en tant que président. Et c’est la même chose pour l’externalisation de la torture".
Le jour qui a suivi son intronisation de janvier 2009, Obama a publié un arrêté spectaculaire qui mettait fin aux pratiques coercitives de la CIA mais on s’est aperçu ensuite qu’il comportait une importante exception en préservant le rôle de l’Agence dans les externalisations extraordinaires. Au milieu de vibrants engagements à respecter les Conventions de Genève et "à traiter avec humanité les individus détenus aux Etats-Unis" le président avait donné l’ordre clair et sans équivoque à "la CIA de fermer aussi vite que possible tous les centres de détention qu’elle dirigeait et de ne plus ouvrir de tels centres de détentions dans le futur." Mais quand le conseiller de la CIA a objecté que cette interdiction totale "nous enlèverait aussi le bizness des externalisations," Obama a ajouté une note courte mais lourde de conséquence : "Les termes "centres de détention" et centre de détention" dans... cet ordre ne s’appliquent pas aux centres utilisés pour détenir les gens sur une courte période ou sur une base transitoire". Le flou légal de cette définition a permis à la CIA de continuer ses vols de suspects de terrorisme externalisés dans des pays alliés pour y être éventuellement torturés.
De plus, en février 2009, Leon Panetta, le nouveau directeur de la CIA nommé par Obama, a annoncé que l’Agence continuerait à pratiquer "les externalisations en remettant un individu à la juridiction d’une autre pays pour que ce pays puisse exercer son droit... de le poursuivre selon ses propres lois. Je pense," a-t-il ajouté, foulant ainsi aux pieds les strictes conditions de cette pratique définies par la convention contre la torture de l’ONU, "que c’est un usage approprié de l’externalisation."
La CIA a étendu ses opérations secrètes en Somalie sous Obama et les externalisations de suspects de terrorisme de l’Afrique de l’est voisine ont continué exactement comme du temps de Bush. En juillet 2009 par exemple, la police du Kenya a arrêté un suspect d’al-Qaeda, Ahmed Abdullahi Hassan, dans un bidon-ville de Nairobi et l’a conduit à l’aéroport de la ville pour le mettre sur un vol de la CIA pour Mogadishu. Là , il a rejoint des dizaines de prisonniers arrachés aux rues kenyanes dans "le trou" - une prison souterraine insalubre dissimulée dans les sous-sols dénués de fenêtres de l’Agence Nationale de Sécurité somalienne. Des gardiens somaliens (payés par les Etats-Unis) gardaient la prison mais les agents de la CIA, selon Jeremy Scahill de The Nation, pouvaient interroger les prisonniers quand ils voulaient.
Obama a aussi permis la poursuite d’une pratique adoptée après le scandale d’Abu Ghraib qui consiste à sous-traiter l’incarcération des prisonniers aux alliés locaux en Afghanistan et en Irak sans se soucier des violations de droits humains qu’ils commettent. Bien que l’armée étasunienne ait reçu 1.365 rapports sur la torture de détenus par les forces iraquiennes entre mai 2004 et décembre 2009, une période qui couvre aussi toute la première année du mandat d’Obama, les officiers étasuniens ont refusé de faire quoi que ce soit malgré le caractère souvent extrême des abus rapportés.
Simultanément, les alliés afghans de Washington se sont mis à torturer de plus en plus après que le scandale d’Abu Ghraib ait amené les officiels étasuniens à déléguer plus d’interrogatoires aux autorités locales. L’ONU, après avoir entendu 324 personnes détenues par le Directoire National de Sécurité Afghan (DNS) en 2011, est arrivée à la conclusion que "la torture est pratiquée systématiquement dans un grand nombre de prisons de la DNS en Afghanistan." A la prison du Directoire de Kandahar, un interrogateur a dit à un prisonnier avant de commencer à le torturer : "Vous devriez avouer tout de suite ce que vous avez fait quand vous étiez un Taliban ; même les pierres avouent ici".
De tels rapports ont conduit les forces canadiennes et anglaises à réduire les transferts de prisonniers, mais l’armée étasunienne continue à remettre les prisonniers aux autorités afghanes -une politique qui, selon le New York Times, "soulève de sérieuses questions sur la complicité éventuelle d’officiels étasuniens".
Comment éviter l’engorgement de l’appareil de justice ou les drones
Après 10 ans d’intense débat public sur la torture, ces deux dernières années, les Etats-Unis sont arrivés à un compromis politique problématique sur la torture : impunité dans le pays, externalisation à l’étranger.
Cette façon de résoudre le problème ne facilitera pas la tâche des futurs dirigeants étasuniens destinés à prendre la tête d’une communauté internationale déterminée à mettre fin au fléau de la torture. L’Italie a poursuivi en justice deux douzaines d’agents de la CIA pour avoir externalisé des suspects en 2009, la Pologne vient de condamner son ancien chef de la sécurité pour avoir aidé à mettre en place un "site noir" de la CIA, et une enquête est en cours en Angleterre concernant des officiels des services secrets soupçonnés d’avoir aidé à torturer des prisonniers de Guantanamo : tout cela laisse penser que les Etats-Unis vont subir de plus en plus de pressions pour les amener à respecter les normes internationales des droits humains.
En attendant, assuré de l’impunité à l’intérieur du pays comme à l’extérieur, Washington a glissé sur la pente dangereuse de la torture pour se rendre compte, exactement comme les Français en Algérie dans les années 1950, qu’au fond on sombre dans le naufrage moral des exécutions extrajudiciaires. La torture systématique par les Français de milliers d’Algériens pendant la Bataille d’Alger en 1957 a aussi engendré plus de 3000 "exécutions sommaires" pour éviter que "l’appareil judiciaire ne soit engorgé", comme l’a expliqué un général français.
Tout aussi sinistrement, Washington a réagi aux scandales de torture de l’ère Bush en optant, à la place d’arrêter les gens, pour des assassinats aériens qui passent inaperçus. De 2005 à 2012, le nombre des morts causés par des drones étasuniens au Pakistan est passé de zéro à 2.400 (et continue d’augmenter) - un chiffre qui se rapproche d’une manière choquante des 3.000 assassinats français en Algérie. De plus, on sait maintenant que le président lui-même ordonne des assassinats ciblés par des drones au Pakistan, au Yémen et en Somalie, à partir d’une "liste de personnes à tuer" secrète. Dans le même temps, son administration n’a gardé qu’un suspect de terrorisme sous sa garde et n’a pas envoyé un seul prisonnier de plus à Guantanamo, évitant de la sorte l’engorgement de l’appareil judiciaire étasunien.
En l’absence d’enquêtes sérieuses et de réformes contraignantes, l’assassinat est devenu pour les Etats-Unis la manière normale de faire la guerre sans pour autant se priver du recours à l’externalisation. Soyez-en sûrs, il y aura bientôt un autre scandale dans un autre donjon emblématique de la lugubre procession historique de plus en plus longue qui mène des "cages à tigre" du Sud Vietnam au "puits de sel" d’Afghanistan en passant par le "trou" de Somalie. La prochaine fois, le monde ne sera peut-être pas aussi compréhensif. Et comme les gens n’ont pas oublié les photos de la prison d’Abu Ghraib, la prochaine fois, les dégâts causés à l’autorité morale des Etats-Unis en tant que leader mondial pourraient être plus graves et plus durables encore.
Alfred W. McCoy – Tous ses écrits originaux et ceux d'autres auteurs en anglais ICI
Alfred William McCoy (né en 1945) est professeur d’histoire du Sud-Est asiatique à l’université du Wisconsin à Madison. Il contribue régulièrement à TomDispatch et est l’auteur de : A Question of Torture : CIA Interrogation, From the Cold War to the War on Terror qui a fourni la documentation du documentaire Taxi to the Darkside qui a reçu un Oscar. Son dernier livre : Torture and Impunity : The U.S. Doctrine of Coercive Interrogation (University of Wisconsin, 2012) explore la pratique étasunienne de la torture sur les dix dernières années.
Traduction : Dominique Muselet
Grand dossier préparé et mis en ligne par Jeannot RAMAMBAZAFY - 6 janvier 2013, pour www.madagate.com