Issa Sanogo, Coordonnateur résident du Système des Nations Unies à Madagascar, lors de son discours de ce 25 novembre 2020
« Brisons le silence, stop à la violence ! ». C’est le thème choisi par les Nations Unies pour célébrer la Journée internationale pour l’élimination des violences à l’égard des femmes, le 25 novembre 2020.
Cette consigne a été reprise par Issa Sanogo, Coordonnateur résident du Système des Nations Unies à Madagascar, lors de son discours sur le parvis de l’Hôtel de Ville d’Antananarivo.
Ce, dans le cadre du lancement des 16 jours d’activisme pour renforcer cette lutte ardue contre la violence sous toutes ses formes à l’égard des femmes et des filles, mais également à l’égard des enfants, des hommes, des homosexuels et des transgenres.
Voici la transcription, à l’écoute, du discours intégral de Monsieur Sanogo.
" Madame la Ministre de la Population, de la Protection sociale et de la Promotion de la Femme,
Monsieur le Ministre-Conseiller de l‘Ambassade royale de Norvège,
Mesdames et Messieurs les Parlementaires,
Monsieur le Maire adjoint d’Antananarivo,
Mesdames et Messieurs les Représentants de la Présidence et de la Première Dame,
Mesdames et Messieurs les Chefs de district,
Mesdames et Messieurs les Chefs de Fokontany,
Chers frères du Système des Nations Unies,
Mesdames et Messieurs en vos rangs respectifs.
C’est avec un grand honneur que je prends la parole en cette Journée internationale pour l’élimination de la violence à l’égard des Femmes, au nom du Système des Nations Unies à Madagascar.
Les Violences Basées sur le Genre constituent une des violations majeures des droits humains. Le temps est venu de briser le silence. Malgré l’adoption de la Convention sur l’élimination de toutes les formes de discrimination à l’égard des Femmes, par l’Assemblée générale des Nations Unies, en 1979, la violence à l’égard des Femmes et les filles reste un problème omniprésent dans le monde.
Madagascar fait partie des pays où la problématique de la violence basée sur le genre reste flagrante. Les données de l’enquête par grappes à indicateurs multiples (Note du transcripteur : Multiple Indicators Cluster Survey ou MICS) de 2018 sont, malheureusement la preuve. En effet, presque 38% des femmes âgées de 15 à 49 ans sont victimes de violences physiques ou sexuelles. Environ 41% des femmes âgées de 15 à 49 ans, en union ou en rupture d’union, subissent des violences émotionnelles, physiques ou sexuelles de la part de leur partenaire intime.
Malheureusement, les femmes elles-mêmes acceptent davantage la violence à l’égard des femmes que les hommes. Et les chiffres parlent : 41% des femmes contre 29% des hommes. Environ 32% des femmes sont victimes de violences physiques depuis l’âge de 15 ans, et 14% des femmes âgées de 15 à 49 ans sont victimes de violences sexuelles au cours de leur vie. Environ 1 femme sur 8 est victime de violences physiques perpétrées par son mari ou partenaire actuel ou précédent.
Malheureusement, la pandémie à Covid-19 et le confinement ont aggravé la situation et la hausse des violences conjugales et familiales. Une enquête de perception sur les violences basées sur le genre, effectuée en avril 2020, indique que 46% des répondantes ont annoncé que cette pandémie a provoqué un comportement agressif au niveau des membres de la famille.
Mesdames et Messieurs,
Cette situation n’est pas acceptable. Assez pour toutes les formes de violence contre les femmes et les filles ! La prévention de la violence basée sur le genre est un moyen pour atteindre les Objectifs de Développement Durable. A 10 ans de l’échéance de ces Objectifs, nous devons accélérer les efforts afin d’éradiquer ce fléau une bonne fois pour toute et offrir aux femmes, aux enfants et aux hommes, l’opportunité de jouir pleinement de leurs droits. C’est pourquoi nous disons non à la violence.
Mesdames et Messieurs,
Comme l’a mentionné le Secrétaire général de l’ONU, je cite : « Ces atteintes, qui comptent parmi les violations des droits de la personne les plus odieuses, les plus persistantes et les plus généralisées au monde, touchent une femme sur trois. Il s’agit donc d’une femme de votre entourage ou de votre famille, d’une collègue ou d’une amie, voire de vous-même. La violence sexuelle contre les femmes et les filles prend ses racines dans des siècles de domination masculine.  N’oublions pas que, fondamentalement, les inégalités entre les genres qui sous-tendent la culture du viol sont un déséquilibre des pouvoirs », fin de citation.
C’est pourquoi, je suis particulièrement admiratif des engagements au plus haut niveau du gouvernement de Madagascar au cours de ces dernières années, et particulièrement pendant cette période difficile de la pandémie à Covid-19. Notamment, à travers la promulgation de la loi sur la lutte contre les violences basées sur le genre ; la mise en place de la ligne verte 813 pour les dénonciations, les signalements et les orientations pour la prise en charge ; la mise en place de la chaîne pénale anti-violences basées sur le genre et l’engagement aux sanctions les plus sévères pour les auteurs de violences.
Les sensibilisations sur la prévention et la connaissance des droits et la validation imminente du Plan national de mise en œuvre de la Résolution 13/25 par mes pairs du Conseil de Sécurité de l’ONU. Il est aussi important de relever que 40% des 174 recommandations acceptées par l’État malgache lors de l’examen périodique universel en novembre 2019, portent sur la lutte contre les discriminations et les violences basées sur le genre.
Mesdames et Messieurs,
Si ces statistiques démontrent l’immensité du travail à faire pour réaliser l’égalité des genres et l’autonomisation des femmes, il n’en demeure pas moins vrai qu’elles traduisent l’engagement exemplaire de l’État malgache à renforcer son système national de protection contre toutes les formes de discrimination à l’égard des femmes et des filles afin que personne ne soit laissé de côté. Un des freins pour l’élimination de ce fléau exécrable que constituent les violences basées sur le genre, est le niveau de tolérance au niveau de la société et, notamment, les règlements à l’amiable de ce genre de violences.
Nous avons souvent tendance, au niveau des communautés, à réduire au silence les plaintes des victimes en les encourageant à revenir au sein de leur foyer ou auprès de leur bourreau sans en dresser en profondeur les problèmes qui engendrent les cas de violence. Ceci rime avec la complicité qui est sanctionnée au même titre que les violences.
Mesdames et Messieurs,
Au nom des Nations Unies, je tiens à remercier toutes les parties prenantes qui ne ménagent aucun effort pour lutter contre toutes les formes de violences et, particulièrement, Madame Mialy Rajoelina, Première Dame de Madagascar et Championne de la lutte contre les violences basées sur le genre. Je tiens également à réaffirmer notre engagement, en tant que Système des Nations Unies, et notre détermination à continuer à travailler avec le gouvernement et tous les acteurs compétents y compris la Communauté pour le bien-être des populations et pour le développement durable de Madagascar.
Continuons notre lutte pour que nos Mères, nos Sœurs et nos Filles soient à l’abri de toutes formes de violence et de discrimination. Nous faisons tous partie de la génération Égalité. Nous avons le droit de laisser à la génération future un monde exempt de toutes formes de violence et de discrimination à l’égard des Femmes et des Filles. Nous répétons, pour terminer : brisons le silence, stop à la violence !
Misaotra, Tompoko,
Merci beaucoup "./.
Transcription : Jeannot Ramambazafy
Photos : Andry Rakotonirainy