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Andry Rajoelina sur les lieux du « Haza lambo » mauricien

Deux mains tendues sculptées face aux deux mains jointes du Président de la République de Madagascar, Andry Rajoelina, qui a honoré un pan d’une Culture commune malgacho-mauricienne

VIDÉO ICI

Aujourd’hui, avec des photos du recueillement du Président Rajoelina, le 12 mars 2019, je m’en vais étoffer votre culture, à propos d’esclaves malgaches dont les descendants font partie de l’actuelle population mauricienne. Vous avez dit « marron » ? En fait, ce mot n’est pas l’adjectif désignant une couleur mais il est dérivé de l’espagnol « cimarron » signifiant « vivant sur les cimes » (cima voulant dire cime).

Mais, issu de la culture Arawak (Arahuaco en espagnol, pour dénommer les Amérindiens des Antilles), ce mot désigne « des animaux domestiques retournant à l’état sauvage ». Ainsi des cochons devenus sangliers. C’est à partir de l’année 1540 que ce mot fut utilisé pour désigner les esclaves fugitifs. Affreuse comparaison s’il en est…

Dépôt de gerbes par le Président Andry Rajoelina, le 12 mars 2019

L’expression malgache « Haza lambo » (littéralement chasse aux sangliers) prend tout son sens dans cette triste et affreuse tranche de l’Histoire mauricienne. En 1725, cette chasse aux esclaves marrons fit l’objet d’une authentique règlementation. Ainsi, à la capture d’un esclave marron, de préférence plutôt mort que vif, certains Blancs, devenus « chasseurs de marrons professionnels », recevaient 30 livres de récompense. Ils parcouraient alors la forêt pour dénicher les lieux ou les marrons avaient choisi de se réfugier. Ainsi du Morne Brabant.

Le guide de service montrant la montagne au Président Rajoelina

En 1731, l’île de France (nom donné à l’île Maurice à l’époque, par un décret royal) comptait 2.5150 esclaves sur les 29760 habitants existant. La majorité des esclaves s’étaient révoltés contre l’esclavage et les esclavagistes et avaient fait front. Mais ce fut la bataille du pot de fer contre le pot de terre… Ces êtres humains considérés comme des animaux avaient été amené de Madagascar et des comptoirs d’esclaves de Kilwa Kisiwani, en Tanzanie, et du Sultanat de Zanzibar.

Le Morne Brabant de nos jours

La plus célèbre de ces « neg marrons » (autre appellation de ces esclaves fugitifs) de Maurice demeure Madame Françoise. Selon la tradition orale, elle aurait été le chef d’un groupe d’esclaves qui préparait la révolte dans les bois, à proximité de Grande Rivière Sud-Est. Un des cours d’eau porte actuellement son nom.

L’image de la « Porte de la Liberté » sculptée dans de la pierre

Avec La Victoire Antigone, dite Marie, elle a joué un rôle prépondérant dans la rébellion des esclaves et a été recherchée par les chasseurs blancs d’esclaves, toujours Noirs évidemment, qui ont été écartelés ou brûlés vifs. Affreux, non ?

Autres noms de chefs de la rébellion des esclaves marrons de l’île Maurice : Beliaca, Caëtane, Coutoupa, Fritz, Pompée, Sans-Souci, Tatamaka et, bien sûr, Diamamouve.

Certains de ces êtres humains pourchassés par d’autres êtres humains comme eux (mais de couleur différente) ont eu l’idée se terrer sur le Morne Brabant. Pourquoi ?

Sculpture en pierre des Grottes

De par sa configuration naturelle, le Morne Brabant était quasi-inaccessible à l’époque, grâce à ses versants abrupts et son épaisse forêt. Là, les esclaves fuyards ont formé des petits peuplements dans des grottes et au sommet du Morne où se trouve une cascade.

Espèce aujourd’hui disparue, en sculpture

Ils se nourrissaient d’espèces d’oiseaux dont plusieurs sont, de nos jours, disparues. Mais vint le moment où les chasseurs ont trouvé la faille pour parvenir à pénétrer sur le Morne. Encerclés de toutes parts, beaucoup d’esclaves marrons ont préféré la mort en se jetant dans le vide pour échapper à la capture qui sera suivie de tortures.

C’est entre les années 1833 et 1838 que l’esclavage est aboli dans les colonies britanniques des West Indies, en Guyane britannique et à l’Ile Maurice. En 1834, a même été créée la Société Française pour l’Abolition de l’Esclavage. En 1839, la British and Foreign Anti-Slavery Society est créée à Londres. La même année le Pape Grégoire XVI condamne officiellement la traite négrière. En 1890 a eu lieu la Conférence de Bruxelles sur l’esclavage en Afrique.

En 1896, c’est l’année de l’abolition de l’esclavage à Madagascar. Le 24 juin 1924, la SND (Société des nations qui a précédé l’ONU) créé une Commission temporaire de l’esclavage. Le 26 septembre 1926, la SDN adopte la Convention relative à l’esclavage. De son côté, le Bureau international du Travail (BIT) adopte une Convention sur le travail forcé en 1930.

Le 10 décembre 1948, les 58 États Membres qui constituaient alors l'Assemblée générale de l’ONU ont adopté la Déclaration universelle des droits de l'homme à Paris. Le 2 décembre 1949, est signée par 82 états membres de l’ONU, la Convention pour la Répression de la Traite des Êtres humains et de l’exploitation de la prostitution d’autrui. Enfin, 4 septembre 1956 est signée à l’ONU la Convention supplémentaire relative à l’abolition de l’esclavage, de la traite des esclaves et des institutions et pratiques analogues à l’esclavage.

Revenons à l’île Maurice. L’esclavage y ayant été définitivement aboli, un village nommé Trou Chenilles, niché au pied du Morne, y a été fondé pour loger les esclaves devenus libres. Toute leur culture et leurs traditions ont été conservées par leurs descendants.

Signature du livre d’Or de ce haut lieu culturel dédié aux racines malgacho-mauriciennes

La tradition orale autour des marrons a fait de cette montagne du Morne Brabant le symbole de la souffrance des esclaves, de leur lutte pour la liberté et de leur sacrifice, Le Morne constitue ainsi le symbole de la lutte des esclaves pour la liberté, de leur souffrance et de leur sacrifice.

Dossier de Jeannot Ramambazafy, envoyé spécial à l’île Maurice - Également publié dans "La Gazette de la Grande île" du samedi 16 mars 2019

Mis à jour ( Lundi, 25 Mars 2019 22:54 )  
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