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Home Editorial Madagate Affiche Littérature. «Lamba et Poussière». Souvenirs en rime d’Alain-Aimé Rajaonarison

Littérature. «Lamba et Poussière». Souvenirs en rime d’Alain-Aimé Rajaonarison

La culture, c’est réellement ce qui va rester au genre humain lorsque tout sera oublié. Et si les paroles s’envolent, les écrits, eux, resteront à jamais. En voici la preuve, à travers les œuvres d’Alain-Aimé Rajaonarison. Sans commentaires : regardez et lisez !

Jeannot Ramambazafy


Les souvenirs d'Alain-Aimé RAJAONARISON - la vie avec ses amis de différents quartiers d'Antananarivo, les relations entre parents et enfants, les vacances à la campagne chez les grands-parents, la fréquentation du grand marché du Zoma, les déplacements en taxi-brousse à travers l'Île, les dimanches au Temple et à l'Église, le stade de Mahamasina, ses nombreux voyages à l'étranger, et tant d'autres souvenirs - ont marqué profondément sa vie. Cet ouvrage remet en surface ces «trésors» blottis en sa mémoire.

Né à Madagascar, Alain-Aimé RAJAONARISON a rejoint la France pour poursuivre ses études supérieures. Docteur en Histoire, il continue ses recherches à Paris.



Broché - format : 13,5 x 21,5 cm
ISBN : 978-2-343-15754-2 • Publié le 26 novembre 2018 • 100 pages
EAN13 : 9782343157542
EAN PDF : 9782140106224

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Préface.

Avec ce recueil de poèmes, Alain-Aimé nous offre un beau et mystérieux voyage.

Un voyage dont la beauté nous étreint tout de suite, dès le premier mot, le premier vers, la première strophe. Un voyage dont le sens ne se découvrira à nous que lentement, au fil des pages, des images, des évocations. C’est un voyage initiatique que nous offre Alain-Aimé, le long d’un chemin où l’on se plait à flâner, revenir sur ses pas, s’imprégner des atmosphères, méditer sur ce que l’on voit, chercher le sens caché des choses.

Premières pages, premières impressions. La première dimension de la lecture est celle de l’appréhension d’un mystère. Un mystère qui, irrésistiblement, attire et aspire le lecteur ; autour duquel il tourne et retourne sans comprendre de quoi il s’agit tout en sachant que là réside quelque chose d’important. Le lecteur qui s’imprègne alors des mots. Des mots gorgés d’imaginaire comme certains fruits le sont de sucre et de jus, des mots gorgés de parfums, de sons, de paysages, de sensualité, d’émotion, de nostalgie. Souvent, le sens littéral de ces mots échappe à la compréhension immédiate. C’est qu’il s’agit de mots rares ou oubliés. Un peu à la manière des mots mallarméens dont l’un, le fameux et mystérieux « Ptyx » du sonnet en X, est purement et simplement inventé. De l’obscurité, de la rareté, de l’ésotérisme nait la poésie des « Passerelle colligeant », « séide martial », « excavation hadale », « lépidoptère verdoyant », « anatidés sagaies » « pétun ardent » ou autre « hypostase divine ». Mais, plus encore que ces mots empruntés au trésor de la langue française, il y a les mots malgaches. Mots malgaches qui, noms propres ou noms communs, sont omniprésents à travers chacun des poèmes, Ravolahanta, Ikelimalaza, Mandranofotsy, Dadamalala, Andriamparazato, Hozamanga, Faty no hisarahana, et tant d’autres encore. On s’imprègne de leur musicalité, de leur graphie longue et raffinée, on se surprend à finalement les prononcer facilement à force de les côtoyer, eux dont la réputation est d’être imprononçable pour qui n’est pas natif de la Grande île, on se découvre à les déguster en bouche, on se découvre à les aimer.

C’est alors que l’on entre dans la deuxième dimension de la lecture de ces poèmes, celle de l’exotisme. Ces mots qui nous parlent sans qu’on les comprenne vraiment prennent soudain leur sens plein quand on se plonge dans les notes qu’Alain-Aimé a eu la bonne idée d’insérer en bas de chaque page. On découvre alors Madagascar, ses paysages, ses odeurs, ses constructions, ses lieux-dits, ses traditions, ses rituels, ses personnages mythiques, ses habitants. Nous quittons Ambohimangidy pour Ambohijatovo, dans la proximité d’Antanarivo, avant de nous rendre dans le semi-désert de l’Androy puis sur les bords du Lac Anosy. Tandis que le voyage se poursuit, nous nous enivrons du parfum des acacias et dégustons un « anamany » à l’ombre d’une fleur de Madagascar. Nous saluons la belle figure de Jean-Paoly, honorons l’idole Ikelimalaza puis nous livrons à même le sol à une partie de Fanorona.

Mais ce Madagascar que le poète nous donne à voir, et c’est là la troisième dimension de la lecture, est un Madagascar de l’exil. Un Madagascar ancré dans les souvenirs d’enfance et de jeunesse du poète qui a quitté son île et son jeune âge depuis longtemps maintenant. Où que ses pas le conduisent à travers le monde, à Venise, à Vérone, à Paris, à Prague, à Bruxelles, à Heidelberg, à Reykjavik, à Copenhague, à Londres, à New York, à Dehli, à Chiang Mai, à Hanoï, ou encore dans le petit village alpestre de Notre-Dame-de-Bellecombe, l’exil toujours le ramène à sa terre natale et à ses premières années. C’est en cela que ces poèmes sont véritablement universels. Ils nous parlent de cet ailleurs, un ailleurs du temps et de l’espace, qui est en chacun de nous, que nous avons perdu en apparence, mais que nous retrouvons partout et à chaque instant quand notre sensibilité se met en éveil. C’est cet ailleurs que la poésie d’Alain-Aimé fait revivre en nous avec tant de force et de délicatesse. Que l’on soit Malgache, Européen, Américain, Asiatique, Africain ou même, si cela était possible, de la Lune. Par-delà nos différences de langues, de couleurs de peau, de croyances, de classes sociales, la force de cette poésie est de nous rappeler que nous sommes fondamentalement les mêmes. Nous qu’un rire d’enfant vient réveiller en nous celui que nous avons été au même âge, et la silhouette d’une vieille citadelle sur la colline la mémoire confuse de nos ancêtres.

Au terme de ce voyage initiatique, le lecteur sort purifié et revigoré. Il s’est un temps coupé de la frénésie et de la superficialité pour se mettre à l’écoute des correspondances du monde. Il s’est grandi en entendant l’autre résonner en lui-même, en entendant la poésie malgache entrer en symbiose avec la poésie française. Et il s’est ému en reconnaissant, à travers ce premier recueil, la figure d’un grand poète.

Paul Baquiast

Historien et romancier


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EXTRAIT CHOISI PAR L’AUTEUR POUR VOUS LECTEURS DE MADAGATE


Androy[1].

Zébus comme lustres, bastide délicate.

Olympien fantsilohitra[2], panache sans ambages.

Déliés guerriers, contour spartiate.

Balahazo[3] erratique, vovo[4] : un mirage.

Tourbillon de poussière, couvre-chef acuminé,

Fleurs rouges en faction, les pagnes tempèrent,

Vénusté des tresses, masque de beauté.
Lamba[5] en soie, les sobika[6] insèrent.

A l’ombre de Vénus, l’Androy frémit.

Étendue aux épines, hazomanga[7] en transe.

Cochenille[8], apocalypse, sanglots imprécis.

Extase partisane, clameurs et danses.

Sagaies au son de flûtes, frondes en éveil.

Ballets de rémiges, rimotse[9] impatients.

Sahiry[10] en éloge, beko[11] en tenaille.

Déambulation des esprits, passerelle colligeant.

Paris, 18 juillet 2016.



[1] Région semi-désertique située au sud de la Grande Île, dans la Province de Tuléar.

[2] Arbuste du sud de Madagascar, appelé également arbre pieuvre.

[3] « Manioc ».

[4] Un « trou » qu’on creuse dans le sable pour puiser de l’eau. Une pratique courante qui se fait dans la région d’Androy à cause de la rareté de l’eau.

[5] Élément emblématique du costume traditionnel malgache, constituée d’une pièce de coton ou de soie. Le lamba est porté indifféremment par les femmes ou par les hommes.

[6] Grand panier en osier.

[7] Plante offrant un colorant à la soie. Elle est censée éloigner les maladies du bétail, et est également reniflée pour le mal de tête. Aussi, c’est le nom donné par les Sakalava (Population de l’Ouest malgache) à toutes les plantes utilisées dans la cérémonie de la circoncision.

[8] Cochenille dactylopidae, insecte nuisible aux cactus. Pour détruire les cactus qui rendaient difficile la pénétration des troupes françaises dans l’Androy, le Gouverneur Général Marcel Olivier a sollicité Perrier de la Bâthie et Petit pour y introduire ce type de cochenille. Cette opération a ravagé les cactus entraînant une catastrophe écologique et humaine dans les années 1930-1931.

[9] Chant avec des passages de sons gutturaux, d’halètements ou de raclements de gorge.

[10] Chanteurs de beko qui effectuent les chants en psalmodiant. Ce sont des professionnels qui se produisent surtout à l’occasion des funérailles. Ceux-ci sont payés en zébus ou en chèvres.

[11] Tradition musicale de l’Androy, chantée en a cappella.

Mis à jour ( Samedi, 16 Février 2019 08:03 )  
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