« Ny Malagasy tsy miady amam-paty ».Telle est la traduction de ce titre appliqué à la lettre à Madagascar. Mais pour les esprits cartésiens, cela signifie que les habitants de la Grande île de l’océan Indien sont des hypocrites. Et c’est dans ce contexte que la fameuse « reconnaissance internationale » ne repose, en fait, que sur la méconnaissance internationale de l’identité culturelle malgache.
Les Malgaches ne seront jamais totalement des Africains, ni des Arabes, ni des asiatiques, les trois peuples qui sont à l’origine des 18 ethnies que compose la Nation malgache. Et c’est cette diversité qui empêchera toute velléité de guerre civile tant recherchée par certains dictateurs déchus, et relayée par des insensés trop sensibles aux choses matérielles promises. Mais la mort, cette incontournable finalité de tout être humain, sera omniprésente pour leur rappeler leur trop-plein d’orgueil et de vanité.
Bon, revenons à feu Pascal Rakotomavo (76 ans). Les principaux ennemis politiques, d'hier et d'aujourd'hui encore, étaient donc tous présents ou représentés, pour rendre un ultime hommage à cet ancien Premier ministre qui n’a jamais fait beaucoup trop de vagues dans la gestion des affaires nationales. Au moment où il avait été nommé « gouverneur » de la province d’Antananarivo (évènements de 2002), il a préféré se retirer, laissant la place à un militaire, Léon Claude Raveloarison, le sosie de Kojak et Yul Brynner...
Ce 17 décembre 2010 -de la chapelle orioniste d'Antsofinondry, Avaradrano au tombeau d’Ambohitsimeloka, Ambohidratrimo-, se sont côtoyés les personnalités suivantes : Le Président de la transition Andry Rajoelina et son épouse Mialy, les anciens Premiers ministres Désiré Rakotoarijaona (1977-1988), Victor Ramahatra (1988-1991), Charles Rabemananjara (2007-2009) tous des militaires, Emmanuel Rakotovahiny (1995-1996), Norbert Lala Ratsirahonana (1996). L’inclusivité (politique) était totale, selon les vœux de Jean Ping…
Tout çà pour vous dire, encore une fois, que 2011 signifie qu’il nous reste une année en moins de notre passage terrestre. Mais tant qu’on est vivant, l’orgueil humain prendra toujours le dessus, jusqu’au moment où il faudra quitter, qu’on le veuille ou non, cette vallée de larmes. Evidemment, si vous vous sentez immortels, cet article ne vous concerne pas. Mais n’oubliez pas : les mauvais augures prévoient déjà la fin du monde en 2012. Pure vue d’esprit mais nous y passerons tous. Il est temps d’inventer les souhaits de bonne mort. Pour un Malgache digne de ce nom, c’est d’être enterré dans son tombeau familial qui reste un souhait. Même que beaucoup de compatriotes épargnent pour construire cette villa de pierres dénommée : "Ma dernière demeure".
Ampy Augustin Portos (71 ans comme l’Amiral), ancien ministre de la Justice (1975-1976), de l’Intérieur (1976-1991) et ancien sénateur (1997-2002), décédé le 4 décembre 2010, a tout de même été enterré sur son île natale de Nosy Be. C’était le 16 décembre dernier, après une cérémonie religieuse en l’église catholique Ekar Saints Pierre et Paul. Mais de son vivant, Monsieur « Ô ry vahoaka » -titre d’une émission à la radio nationale dans les années 1980- aura passé les sept dernières années de sa vie loin de sa famille, à Maputo. Pourquoi ? A cause de la politique revancharde de Marc Ravalomanana. A cause de ce dernier aussi, Didier Ratsiraka n’a pas pu assister aux obsèques de son neveu Manou (pilote de rallye) et de son frère aîné Etienne. C’est dur çà pour des Malgaches. Idem pour Tantely Andrianarivo (ancien Premier ministre) qui n’a pas pu enterrer son propre père. Tout ce monde d’encore vivants fait-il semblant de l’oublier ? Et effectivement, dans ce cas de figure, il est facile de mourir mais il est extrêmement difficile de vivre.
Pascal Joseph Rakotomavo, son foulard de soie et son blazer croisé légendaires
Pour la famille de ces récents disparus, pour nous tous aussi, voici un poème de circonstance à apprendre par cœur :
Il plane sur la ville, un joyeux air de Noël
Une odeur de marron, de pain d’épice au miel
Les rues ont mis leurs plus belles parures
Emeraude, diamants, rubis, saphirs et dorures
Pourtant, cette magie n’a aucun effet sur moi
Une main glacée sur le cœur, je meurs de froid
Et cette douleur, à l’approche des fêtes qui grandit
Tu ne seras pas là avec nous, mon frère et ami
Je résiste comme je peux mais pour combien de temps ?
Je ne supporte plus tout ce bonheur, ces rires et chants
Alors que moi, mon cœur pleure un être si cher et aimé
Je reste impuissant face à ce chagrin pourtant programmé
Tant pis ! Si quand je sors la tête de l’eau avec courage
D’autres insensibles me l’enfoncent avec force et rage
Ces gens oublient qu’un jour ou même un soir
Ils seront à ma place dans ce terrible désespoir
(Slivania)
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Moralité ? Il n’y a pas de moralité. Il ne reste que de la mortalité devant laquelle nous sommes tous égaux. Mais qui vous enterrera ? Bref, les Malgaches ne se disputent jamais avec les morts sinon vous n'êtes pas des Malgaches. Il n'existe aucune excuse, aucun faux-fuyant.
Jeannot RAMAMBAZAFY - 18 décembre 2010
Photos : Michaël RAKOTO RAMAMBASON