Que faire de pseudos bilans pour démontrer un semblant de savoir puisé dans les écrits des autres ? Pourquoi vouloir parler de choses qui ne sont plus, si ce n’est pour démontrer un masochisme caché, lui-même faisant office d’un arbre cachant toute une forêt de regrets ? Regrets de ne pas avoir agi (en bien ou en mal) au moment où il faut ; regrets d’avoir laissé passer des tas d’occasion de se taire lorsqu’il le fallait ; regrets de n’avoir pu accompagner un membre de la famille, un(e) ami(e) ou une simple connaissance à sa dernière demeure ; regrets de n’avoir pu accomplir tant de choses parce que ceci, parce que cela.
A défaut d’avoir agi, la majorité des « faiseurs d’opinion » plonge dans la mare des fausses certitudes. Moi, je ne connais qu’une vérité absolue : 1954-2011. J’aurai 57 ans cette année et l’heure de la mort approche. A quoi çà va me servir d’étaler au grand public des trucs pour tenter d’améliorer quoi que ce soit ici-bas ? Enfance, jeunesse, vieillesse (que beaucoup n’atteindront pas par les temps de stress qui courent). Alors ? Je me tourne vers l’avenir en laissant de bons souvenirs à celles et ceux qui me remplaceront. Celles et ceux qui sont désorienté(e)s, qui ont perdu tout repère parce qu’ils sont devenus des déracinés. Parce qu’ils ont délaissé leur propre identité culturelle au profit d’une acculturation dénommée « mondialisation. Or, en 2050, les terriens ne seront plus que des numéros, pas toujours drôles.
Moi, je ne serai plus de ce monde, c’est aussi une certitude que beaucoup tentent d’écarter de leur quotidien. En fait, c’est l’avenir lui-même qui demeure incertain. Mais ne l'a-t-il pas toujours été ? Même madame Soleil ou Elisabeth Tessier n’oseront jamais vous prédire à la seconde près, l’heure de votre mort et la manière par laquelle vous allez quitter cette planète. Et tout le monde fait semblant de vivre. Voilà la phrase exacte. Certains ont déjà prédit la fin du monde, le 21 décembre 2012 exactement. L’imagination aussi est « high tech ». Auparavant, cette prédiction apocalyptique était annoncée à chaque changement de siècle. De nos jours, c’est tous les ans. Rappelez-vous du grand bug -ou bogue- informatique prévu en l’an 2000. Une tempête dans un verre d’eau.
Tout çà , c’est le fait d’êtres humains, comme vous et moi, qui ont le mal de vivre. Au fait, vous êtes-vous demandé, une seule fois : mais qu’est-ce que je fais sur terre ? Il y en a qui naissent, passent et trépassent sans que personne ne s’en aperçoive. Je me demande franchement alors, pourquoi, dans les forums, les gens utilisent des pseudonymes ? Qui se souviendra d’eux ? Mais en ayant lu ce qu’ils débitent à longueur de journée, mieux vaut, en effet, qu’ils gardent et emportent leur anonymat dans leur tombe. Car c’est là que nous finirons tous. « On a à faire à un fou », s’écrieront les « intelligents ». Hélas, ils ne sont pas plus immortels que vous et moi.
Que reste-t-il dès lors ? La troisième certitude : on peut tuer des gens mais on ne pourra jamais tuer une idée, une idéologie. Ségrégation raciale : Luther King est assassiné en 1968 mais Obama est devenu le premier président noir des USA. Moins de 50 ans après le début de la lutte. Apartheid : Steve Biko est mort en prison en 1977, mais Mandela est devenu le premier président noir de l’Afrique du sud, en moins de 50 ans de luttes acharnées. Seul Madagascar fait exception à la règle. En 50 ans de pseudo-indépendance, les Malgaches sont devenus un peuple porte-faix, un peuple spectateur, un peuple de perdants à force de vouloir tout, tout de suite, sans comprendre que les grandes nations du monde sont passées par des périodes atroces : peste et choléra, inquisition, terreur, pogroms, guerres civiles, grands séismes naturels…
Jusqu’à présent, les 18 millions (sur 20 millions) de Malgaches raisonnent (et résonnent) toujours en colonisés. Après que leurs ancêtres ont fourni les efforts de deux guerres qui ne les a jamais concernés, voilà que leurs descendants contribuent aux efforts financiers des grandes puissances qui entendent garder leur hégémonie sur des peuplades demeurés économiquement primitives. Charles de Gaulle n’a pas eu tort de traiter l’Onu de « grand machin ». Si la Grande île de l’océan Indien était aussi déserte que le Sahel, pensez-vous un seul instant que la fameuse « communauté internationale » se serait « impliquée » dans une crise qui n’aurait été alors qu’interne ?
Toutes les richesses du monde actuel sont concentrées dans, sur, sous et autour de cette île de 590.000 km². Mais qui en sont les vrais propriétaires ? Dans 50 ans, je ne serai plus là . Mais au rythme où vont les choses, ces richesses disparaîtront aussi avec moi. Car vis-à -vis des Blancs, le Noir ne sera jamais qu’un sous-homme que l’on peut manipuler comme une marionnette, moyennant finances, sans souci qu’il se soucie du lendemain. Donnez-leur les moyens de posséder une Hummer ou un Jet privé, ils vendront leur propre pays. Jusqu’à preuve du contraire, le Malgache -où qu’il soit et en règle générale- détient le record du monde du paraître sans être ni devenir. Tous les politiciens malgaches sont bardés de diplômes qui ne servent à rien pour sortir leur pays du sous-développement. Sinon, Madagascar aurait, depuis belle lurette, atteint le niveau de vie des petits dragons asiatiques. Les dirigeants passeront et trépasseront encore et toujours mais vous qui me lisez qu’adviendra-t-il de vous ? Rien, le néant pour la majorité. Pour les autres, en ce nouvel an 2011, je leur souhaite belle… mort ! C’est la même finalité. Voilà qui va encore relancer les débats d’inutiles importances dans les forums. Et c’est là l’authentique paradoxe : tous veulent prouver qu’ils existent. Mais à quoi leur sert l'anonymat dès lors ?!
Ayons le courage de nos actes : bons ou mauvais, c’est tout ce que nous lèguerons à celles et ceux qui nous remplaceront. Tôt ou tard. L’imbécilité, comme le savoir, est aussi héréditaire. A vous de choisir.
Jeannot Ramambazafy – Antananarivo, le 3 janvier 2011
PS : c’est drôle d’écrire cette année. Cela me rappelle la manière d'avoir écrit l’an 1963. J’avais 9 ans et j’ai perdu ma grand-mère maternelle. Ajouté à cela, en pleine classe, au Square Poincaré, on a appris l’assassinat de John Kennedy (le président américain qui a créé les volontaires de la Paix. Après avoir demandé ce que vous pouvez faire pour votre pays et non le contraire). Tout cela m'a frappé. Ma grand-mère est partie, comme Kennedy, mais les volontaires de la Paix existent toujours. Ainsi va le monde. Les idées restent mais l'homme finit toujours par mourir. Si vous connaissez quelqu’un qui est revenu de l’au-delà sain et sauf, faites-en moi part. Je ne parle pas de Jésus de Nazareth.
Dernière précision : j'ai décidé de rédiger ce texte "bizarre" après avoir vu le film "Veronica Guérin" durant le dernier week-end de 2010. Une histoire vraie de journaliste...