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Madagascar : à la manière de Gallieni ou l’histoire est un éternel recommencement

Le général Joseph Simon Gallieni, Gouverneur général de Madagascar,
de 1896 à 1905

Plus que trois jours avant que les « sanctions » de la Communication internationale, toutes entités confondues, ne tombent. Sur qui ? Toujours sur le peuple malagasy au final. Dans cette crise qui date de 2009, un seul homme a raison, qui a été plus entendu qu’écouté. Il était à Madagascar en 2009 et son récent jugement prouve que la Sadc est vraiment le problème de la solution, à travers le GIC-M dirigé par le Mozambicain Joachim Chissano.


Ablassé Ouedraogo

Il s’agit du Burkinabe Ablassé Ouedraogo. Son constat récent est réaliste et raisonnable : « C’est vrai que ces candidatures ne respectent pas toute la légalité, mais la situation des Malgaches est telle que, après quatre ans de crise, il vaut mieux chercher la solution. Et la solution, nous, nous disons qu’avec une pléthore de candidatures – une pléthore parce qu’il y a 41 candidatures – il suffit de responsabiliser les Malgaches, de leur faire confiance, et ils feront le bon choix pour eux-mêmes ».


L’ambassadeur de France, François Goldblatt

La Communauté internationale, à commencer par la France, ne l’entend pas de cette oreille. Elle entend appliquer ce qui se fait de mieux en matière de colonisation et pour casser un système qui va à l’encontre de ses intérêts économiques et financiers. Elle a déjà appliqué la sanction puérile de suspension de visa Schengen, impliquant l’Europe toute entière dans ses visées néocolonialistes. Après des mois de recherches méticuleuses, j’ai réussi à retrouver des documents authentiques et non "épurées" sur la manière de Gallieni de brimer un royaume jadis reconnu par la Communauté internationale de l’époque. Après les avoir lu, vous constaterez que l’histoire est effectivement un éternel recommencement. Le pouvoir de transition actuel avait le temps de prendre des mesures exceptionnelles dans cette période exceptionnelle où la Grande île vit de nos jours, avec ses conséquences néfastes à tous points de vue. Hélas, à force d’écouter les uns et les autres, plus mus par des intérêts personnels que par les intérêts du grand nombre, tout ce qui a été fait n’aura servi à rien à cause des membres d’une classe politique plus soucieux de l’instant présent que de laisser un bel héritage patriotique aux générations futures, après leur mort. C’est l’être et paraître sans devenir. Pour ne pas mourir idiots, les gars, -ceux qui auront 30-40 ans en 2040-, connaissez pourquoi les politiciens de nos jours agissent comme les derniers des imbéciles.

Jeannot Ramambazafy – 28 juillet 2013

************************************


Après la loi d’annexion votée par le Parlement français, le 6 août 1896, le colonel Joseph Gallieni, promu général de brigade, débarque à Madagascar le 15 septembre 1896. Au préalable, Joseph Gallieni avait écrit à Alfred Grandidier : « je ne me préoccupe, ni des textes, ni des règlements. Je vais droit au but général : ramener la paix ; franciser l’île et donner le plus grand appui possible à la colonisation française »...

(…) Quant à l'attitude à prendre vis-à-vis de la reine Ranavalona, le général Gallieni se demanda, dès la première heure, s'il ne conviendrait pas de la déposer et de la remplacer par quelque autre membre de sa famille, moins vaniteux, moins encombrant et plus dévoué. Il s'aperçut très vite qu'elle jouissait encore, dans les campagnes plus peut-être qu'à Tananarive, d'un certain prestige, et qu'il eût été de mauvaise politique de faire disparaître un rouage dont on pouvait tirer quelque parti au profit de l'influence française. Mais il ne s'en appliqua pas moins, par quelques actes significatifs, à montrer à elle-même et aux tiers que les choses ne se passeraient plus désormais comme avant.

Au lieu de lui faire visite, à son entrée en fonction, Gallieni attendit qu'elle prît l'initiative de rendre hommage au représentant de la France; lorsqu'il se rendit ensuite au palais royal, il exigea que le pavillon hova fût enlevé et remplacé pour jamais par le drapeau tricolore; il prescrivit à la reine de ne plus s'intituler désormais que « reine des Hovas » et de ne plus s'occuper que de l'Emyrne; il s'empara, enfin, du grand sceau de l'État, de manière qu'on ne pût plus l'appliquer sur des pièces qui n'auraient pas été visées par l'autorité française. « En résumé, disait-il (Rapport du 10 octobre 1896), la reine est maintenue au pouvoir, mais, tout en continuant à recevoir les honneurs de nature à rehausser encore son prestige aux yeux des Hovas, elle a été dépouillée à notre profit de toutes les prérogatives qui lui permettaient d'avoir une action réelle sur la marche des affaires. Elle doit être désormais un simple instrument entre nos mains et, dans peu de jours, je verrai à écarter d'elle les personnages de sa famille que je sais hostiles à la France, et qui, très certainement, sont en complicité avec les rebelles. L'heure était venue où il ne suffisait plus d'attendre le bon plaisir de l'entourage de la reine et des fonctionnaires hovas pour faire exécuter nos volontés et affirmer notre autorité ».

Déjà, à la suite des premiers faits insurrectionnels, une enquête avait été ouverte par M. Laroche, qui avait abouti à plusieurs condamnations, soit à la mort, soit à l'exil (du fait de l'insurrection, 63 condamnations à mort ont été prononcées, dont 34 par le tribunal malgache, 9 par la cour criminelle et 20 par le conseil de guerre. De ces 63 condamnations, 40 proviennent des procédures achevées ou commencées sous M. Laroche). Mais, atteignant des sous-ordres, ces condamnations étaient pour la plupart demeurées sans effet moral. Le général Gallieni se résigna à frapper à la tête pour s'épargner, par la suite, un trop fréquent recours aux mesures de rigueur.


Rainandriamampandry

Or, deux hommes considérables, Rainandriamampandry, ministre de l'Intérieur, et le prince Ratsimamanga, parent de la reine, depuis longtemps suspects, furent convaincus d'avoir trempé d'une manière active et soutenue dans la rébellion (voir, au Journal Officiel, le rapport du général Gallieni de mars 1899) : traduits devant le conseil de guerre, ils furent condamnés et exécutés le 12 octobre, en même temps que la princesse Ramasindrasana, très connue pour son hostilité et ses intrigues, était exilée, et que le premier ministre choisi par le général Duchesne donnait sa démission sans être remplacé. Rasanjy devint, dès lors le principal auxiliaire malgache de l’administration coloniale française…

« Je dois reconnaître, écrit Gallieni dans son rapport officiel du 12 novembre 1896, que, si la reine ne nous aime pas, ce qui pour moi ne fait aucun doute, elle fait du moins tout ce que je lui prescris sans la moindre objection, s'appliquant à cacher ses préférences pour les Anglais, s'efforçant par tous les moyens de prouver son dévouement à la France et se mettant franchement en avant dès que je lui adresse la plus légère observation. Jusqu'ici, son attitude m'est utile, me permettant de me servir de son influence pour mieux tenir la population. Elle sait d'ailleurs que je n'hésiterais pas à la déposer le jour où elle se permettrait le moindre acte à l'encontre de mes ordres ».

Le 9 janvier 1897, le ministre des Colonies lui avait répondu : « En ce qui concerne la reine, j'estime qu'il ne faut rien faire pour hâter sa dépossession à moins que sa conduite ne donne lieu de notre part à de nouveaux reproches justifiés... Nous avons tout intérêt à jouer jusqu'au dernier moment de son ascendant, si minime soit-il appelé à devenir, tout en soulignant comme vous avez soin de le faire à chaque occasion publique qu'elle n'a désormais qu'un rôle subordonné à notre haute influence ».


Rasanjy, le traître à la nation malagasy

Le 28 janvier 1897, Gallieni insiste : « Les dignitaires malgaches ont constamment invoqué les ordres de la reine afin d'entraîner les populations, ce qui prouve que celle-ci a, dans les campagnes surtout, un prestige considérable qu'elle a conservé en partie. Si, à Tananarive même, ce prestige a diminué beaucoup, il n'en serait pas moins dangereux de songer dès à présent à la déposer... L'importance qui s'attacherait à un tel événement tend à diminuer à mesure que, par l'application de la nouvelle politique, les diverses provinces reçoivent leur autonomie. Le nom de la reine sera vite oublié en dehors de l'Emyrne et lorsque l'organisation nouvelle sera complète; je pense qu'il sera possible de décréter la suppression d'un rouage devenu inutile. De celle-ci (la reine), je ne m'occupe pour ainsi dire plus, si ce n'est pour arrêter ses velléités d'indépendance et pour l'empêcher de faire acte officiel d'autorité jusqu'au jour où, oubliée de ses anciens sujets, elle verra sa souveraineté effectivement réduite à néant et où la royauté tombera d'elle-même, à moins que je ne trouve auparavant l'occasion de la supprimer brusquement. Tel est le but que je poursuis lentement et avec toute prudence, sachant que je me conforme ainsi aux desiderata du département. Déjà je ne considère plus l'ancien gouvernement malgache comme un obstacle sérieux avec lequel je doive compter et mon attitude énergique du début a eu pour premier effet que les indigènes se sont vite habitués à ne tenir compte que des ordres à eux donnés par les autorités françaises; ils reconnaissent, d'ailleurs -et j’ai des renseignements précis à ce sujet, grâce au dévouement de Rasanjy-, les bienfaits d'une administration régulière édictée par nos idées de justice et de libéralité, et j'ai tout lieu de penser que la majorité de la population serait peinée de voir revenir l'ancien état de choses dont le peuple a eu tant à souffrir. Toutefois, je le répète, cette évolution sociale a besoin d'être conduite avec la plus extrême prudence; elle est l'objet de mes préoccupations incessantes, et je ne néglige aucun moyen pour éviter une erreur, dont la moindre serait un désastre au point de vue de la colonisation complète, le but primordial à atteindre ».

Quelques semaines passent, l'idée se précise. Le général Gallieni télégraphie le 17 février 1897: «La pacification est entravée par des menées sourdes qui semblent avoir pris recrudescence. L'opposition et la résistance se font sentir du côté de la reine et de la caste noble, tandis que les anciens esclaves et la caste bourgeoise se rapprochent de nous ».

Puis le 20 février encore : « Il me paraît impossible de conserver pendant longtemps l'institution de la royauté, qui est gênante pour l'application du programme de colonisation et qui est exploitée par les ennemis de la domination française. La reine est toujours à la tête de la caste noble et privilégiée, qui est irréconciliable ».


Ranavalona III (Razafindrahety), la dernière reine de Madagascar,
mise en exil le 28 février 1897

Et enfin, le 27 février : « Devant l'inertie de la reine, l'hostilité sourde de certains étrangers et de la caste noble, et la persistance des chefs de bande, selon toute probabilité, à se servir du nom de la reine pour entretenir la méfiance contre nous et préparer de nouveaux troubles au printemps, je me décide à abolir immédiatement la royauté dans l'Emyrne ; en conséquence, j'invite aujourd'hui la reine à résigner ses fonctions : elle quittera Tananarive demain pour Tamatave, où elle s'embarquera pour la Réunion. Les difficultés que rencontrent les communications urgentes m'ont empêché de demander votre assentiment préalable».

Voilà comment débutent les décisions et actes unilatéraux… Sinon, le fait accompli dans toute sa splendeur.

Ces difficultés étaient telles, en effet, que le télégramme précité du 20 février n'était parvenu à Paris que le 1er mars, et que la réponse du gouvernement -où l'on indiquait que la déposition de Ranavalona semblait encore prématurée, à moins de chefs d'inculpation très précis-, partie de Paris le 2 mars, ne joignit que le 19 le général Gallieni, c'est-à-dire près d'un mois après les événements accomplis. A la fin de mars arriva à Paris le rapport de quinzaine du général Gallieni, en date du 26 février, qui expliquait les circonstances auxquelles il avait obéi. Il s'exprimait ainsi :

« Comme je vous l'ai déjà dit, cette attitude se manifeste surtout chez les castes nobles, élèves des missions britanniques, et même au palais, où, malgré ses protestations de fidélité, la reine Ranavalona semble consentir difficilement au rôle nouveau qui lui est imposé. Les chefs des bandes insurgées qui luttent toujours contre nous, ainsi que les représentants des familles andrianes (nobles) affectent de n'agir qu'au nom de la reine, tandis que les anciens esclaves et la plus grande partie de la bourgeoisie, sur lesquels il est de bonne politique de nous appuyer, ne se rallieront complètement à nous que lorsque aura disparu ce dernier vestige de l'ancienne domination hova. Quelques individus même de ces castes ont exprimé à nos commandants de cercle et à moi-même leur appréhension à ce sujet et leur désir de voir annuler le pouvoir de l'ancienne famille royale. Malgré tout, j'aurais persisté à conserver Ranavalona comme souveraine de l'Emyrne. Mais, je vois qu'elle ne peut se soumettre encore à sa nouvelle situation, et en vue de nouveaux troubles à prévoir pour le printemps, je vais me décider à la déposer, afin d'en finir avec cette situation, qui ne saurait durer plus longtemps sans gêner considérablement notre œuvre de colonisation ».

Dans une lettre privée de même date au directeur des affaires d'Afrique, le général ajoutait : «Tant que la reine Ranavalo subsistera, personne, parmi les Malgaches, ne croira encore au nouvel état de choses. Au premier incident grave, on se soulèvera encore en son nom. De plus, malgré mes avertissements le Palais est toujours un foyer d'intrigues. Les Malgaches, aussi bien les hovas que les autres peuplades de l'île, ne peuvent comprendre cette juxtaposition de nos deux intérêts».

Mais, tout entier à sa tâche locale, le général Gallieni ne s'était pas avisé du retentissement qu'aurait en France et en Europe la déposition de la reine Ranavalona, et de la position bizarre où se trouverait le gouvernement. Pour expliquer cette initiative, on n'avait entre les mains que le télégramme excessivement sommaire du 27 février et les rapports antérieurs, lesquels concluaient à l'ajournement de la mesure. Questionné le 18 mars au Sénat par M. Trarieux, le ministre ne put que manifester sa confiance générale dans le commandant en chef et les raisons de cette confiance, sans se prononcer expressément sur le coup d'État lui-même, dont il ignorait encore les détails. Interpellé le 3 avril à la Chambre par M. Pourquery de Boisserin, mais déjà en possession alors de rapports plus précis, il put déclarer « regretter que les circonstances eussent forcé le général Gallieni à prendre cette décision sans avoir pu recevoir l'adhésion préalable du gouvernement, parce qu'il aurait tenu à honneur, quant à lui, de joindre sa responsabilité à celle du général ». Sur quoi la Chambre vota à l'unanimité un ordre du jour « approuvant la politique suivie à Madagascar et adressant à l'armée ses patriotiques félicitations » et, quelques jours plus tard, le général Gallieni reçut le titre de gouverneur, au lieu de celui de résident, qui n'avait plus de sens. Il sera Gouverneur général de Madagascar jusqu’en 1905. Il décéda le 27 mai 1916, à Versailles, à l’âge de 67 ans.

Ainsi se trouva réglée, pour le plus grand bien de la France et de sa nouvelle colonie, la question politique de l'organisation du pouvoir dans la grande île (L'année suivante, la reine Ranavalona fut transportée avec sa suite en Algérie). Mais, en dépit de l'unanimité du vote de la Chambre, cette solution laissa d'assez durables rancœurs au sein d'un certain parti, dont M. Trarieux s'était fait l'interprète discret au Sénat, et qui affectait de voir dans l'exil de la reine l'action de préoccupations confessionnelles parfaitement étrangères et au gouvernement et au général Gallieni. L'on touche ici à un des problèmes les plus délicats qui se soient posés au moment de la colonisation de Madagascar.

La question religieuse à Madagascar était en réalité une question politique, et une question politique des plus complexes, parce qu'elle était à proprement parler internationale. Le fait brutal, éclatant, inquiétant, était celui-ci : parmi les protestants, il n'y avait ni un Français ni un ami de la France. Anglais était l'argent, anglais le personnel, anglais l'enseignement. Au contraire, par la force des choses, bien avant qu'il eût été question pour les Français d'occuper l'île, tous les éléments de leurs actions s'étaient groupés autour des catholiques, et l'on peut dire qu'aux yeux des indigènes, chacune des deux religions s'identifiait avec l'une des deux nations.

Le rôle de la London Missionary Society notamment était si peu limité aux questions confessionnelles qu'en 1885, après la première expédition française, elle avait offert aux Malgaches de leur faire les avances nécessaires au paiement de l'indemnité de guerre et de se charger de tous leurs services de perception d'impôts pour récupérer son argent. Une énergique intervention de la France avait été nécessaire pour empêcher cette combinaison d'aboutir.

« Pasteurs, curés, jésuites, jouent ici le rôle le plus fâcheux et le plus ridicule qu'on puisse imaginer, lit-on dans une lettre privée datée d’avril 1897. Si les missions ont obtenu des résultats sérieux au point de vue de l'enseignement, il n'en est pas de même au point de vue religieux, quoi qu'elles puissent prétendre. Le Malgache n'a pas de convictions religieuses; il l’est simplement au fond de son être. Il change de religion avec une facilité remarquable, au gré du dernier qui lui parle, d'une simple fantaisie même. Cela n'a pas d'importance pour lui. Je gage que, sur un ordre du résident général, tous les Hovas de l'Emyrne se feraient catholiques le lundi, pour se refaire protestants le jeudi de la même semaine si cela leur était prescrit ».


La reine Ranavalona I (Rasoherina). C'est elle qui, déjà, avait envoyé des ambassadeurs malgaches à Paris et à Londres. Avec les Etats-Unis, elle avait signé un accord de commerce qui limitait les importations d'armes et les exportations de bétail. Et la reine Ranavalona I avait même signé un traité de paix avec l'empereur Napoléon III

Cette appréciation quelque peu sceptique ne se comprend que trop aisément pour qui connaît les origines et les procédés de règne des missions chrétiennes à Madagascar. Après un premier essai pour s'implanter dans l'île, de 1820 à 1835, les protestants anglais en furent chassés alors par Ranavalona I et n'y revinrent qu'en 1861, mais pour se heurter cette fois aux jésuites, fort en faveur auprès de Radama II. Ce dernier ayant été assassiné pour l'excès de ses sympathies françaises, ils s'insinuèrent peu à peu à la Cour.

La reine Ranavalona II (Ramoma)

Jusqu'au moment où, en 1868, Ranavalona II s'étant faite protestante, fut naturellement suivie dans sa conversion par un grand nombre de ses sujets, et accorda cette marque insigne de protection à sa nouvelle religion, qu'elle interdit expressément à tout enfant inscrit dans une école d'en jamais changer dans l'avenir. Cette loi, fondement de la liberté religieuse à la mode malgache, subsistait encore au moment de la prise de possession de Madagascar par la France.

Et l’on s'agitait fort autour de la reine Ranavalona III, dont la profession religieuse semblait aux uns ou aux autres avoir une importance exceptionnelle. On avait été obligé d'éloigner d'elle, sauf pour les cérémonies publiques du culte, ses pasteurs officiels malgaches qui, anciens élèves de la London Missionary Society, l'entretenaient dans un pitoyable état d'esprit à l'égard de la France ; le premier pasteur français qui remplit des fonctions régulières au palais mettait trop souvent la préoccupation religieuse au-dessus du devoir national immédiat, et gémissait avec elle sur la diminutio capitis (Mort civile ou privation des droits de cité, de famille ou de la liberté) infligée aux missions anglaises. Le chef de la mission jésuite, l’évêque Jean-Baptiste Cazet, crut le moment opportun pour tenter un effort suprême à l'effet de conquérir à sa foi la reine Ranavalona. On dut tout d'abord réprimer son ardeur et le prier de laisser celle-ci en paix. Mais bientôt ce fut contre Ranavalona elle-même qu'il fallut lutter. Comme la plupart de ses sujets, elle se demandait si elle ne se concilierait pas les bonnes grâces de la France en revenant à la religion catholique qu'elle avait autrefois pratiquée : par deux fois elle interrogea le général Gallieni (lettre privée de ce dernier du 25 janvier 1897) pour savoir s'il ne conviendrait point qu'elle se convertît; par deux fois il lui fut répondu que la France restait profondément indifférente à cette question; dans une circonstance même, on dut lui interdire de sortir de son palais pour aller aux vêpres.

Le gouvernement français ne cessait pas d'encourager le général Gallieni dans sa résistance aux fantaisies royales et aux compétitions des divers missionnaires :

« J'estime, écrivait le ministre le 9 janvier 1897, que la conversion de la reine au catholicisme serait plus nuisible qu'utile en tout état de cause ».

Dans une lettre privée en date du 27 février 1898, Gallieni écrit : « A Madagascar, le Hova policé, intelligent et avide de se hausser au niveau de l’Européen, qu'il jalouse d'ailleurs, ne peut être traité comme le sauvage Sakalave, qui n'a connu jusqu'à ce jour que le pillage et la chasse aux esclaves ».

Voilà une large tranche de l’Histoire de Madagascar jamais enseignée pas plus avant qu’après les évènements du 13 mai 1972, et surtout pas de nos jours. A quoi pourrait-elle servir, vous demanderez-vous ? Sûrement à rien pour nous qui vivons actuellement, mais elle pourrait être très utile à la jeunesse malagasy des années 2030. Lorsque la classe politique de la Grande île sera débarrassée de ses habitudes d’intrigues et d’actions au profit de ses intérêts personnels. Et surtout du culte de la personnalité.

Pour ce qui est de la situation actuelle, si impossible n’est pas français, il pourrait bien être Malagasy car vox populi vox dei (la voix du peuple est la voix de Dieu)…

Un grand dossier de Jeannot RAMAMBAZAFY – 28 juillet 2013

Mis à jour ( Lundi, 29 Juillet 2013 15:53 )  
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