En haut, Raharinaivo Andrianatoandro; en bas, Marc Ravalomanana et Andry Rajoelina en 2007
« Depuis mon départ de la Présidence du Congrès de la Transition en décembre 2011, je me suis fait volontairement discret pour ne pas gêner ni porter de jugement inopportun à cette nouvelle étape, et peut-être, la fin de la Transition. Permettez-moi aujourd’hui de dévoiler ce que je pense de cette rencontre entre MM. Marc Ravalomanana et Andry Rajoelina.
La question qui me vient tout de suite à l'esprit, c’est quelle est la raison de cette rencontre Quel est son objectif Il faut se souvenir que nous avons combattu à Ambohijatovo contre la prise de pouvoir de manière illégale. De là est né le mouvement légaliste. Aujourd'hui, la Feuille de route initiée et cautionnée par la Communauté Internationale, a été signée par les belligérants (ceux qui ont pris le pouvoir et ceux qui en ont été dépossédés). Cette Feuille de route a été ratifiée par le Parlement, elle a donc force de loi. Dès lors que va-t-on encore négocier Qu'est ce qui va ressortir selon moi de cette rencontre ?
Je suis assez dubitatif devant la démarche de la Communauté Internationale. Au départ, elle a considéré qu’il y avait deux protagonistes, puis quatre, et enfin une vingtaine avec la Feuille de route. Maintenant, on revient à deux qui doivent décider du sort de Madagascar. Madagascar serait-il un pays d’expérimentation de solutions politiques non éprouvées, ou pire, y-aurait-il un excès de zèle dans la volonté de démocratisation de la résolution de la crise Je n’ose même pas y penser. Mais jusqu’où peut-on faire confiance à un ancien et actuel chef d’État qui ont occulté leurs devoirs et obligations liés à leur qualité et fonction au profit de considérations autres que patriotiques
En tout cas, j’espère qu’il en sortira une proposition de paix durable pour le pays. Quand on négocie, c’est pour la paix, et on abandonne toute velléité d’affrontement. J’avais d’ailleurs évoqué, il y a un an, les conditions de réussite d’une telle rencontre. Je suis soulagé d’apprendre qu’après trois ans et demi de crise, l’un des protagonistes semble adhérer à cette démarche, démarche que moi-même et mon équipe avons initiée depuis déjà deux ans.
Cette réunion semble être la suite logique des manœuvres, malsaines et incessantes, de déstabilisation du pouvoir en place par l’ancien Président. Est-ce par désir de vengeance, voire de haine qu’il a mené ces actions À tout cela s’ajoutent les défaillances notoires de la HAT dans la conduite des affaires de l’État. Le Gouvernement outrepasse les pouvoirs qui lui ont été conférés par la Feuille de route. Il engage ainsi la Nation sur des contrats choisis et passés de manière totalement opaque, aux résultats incertains, amenant la population à supputer l’existence d’un caractère «mafieux» de ces engagements. Face à cela, la population ne sait plus à quel saint se vouer (« very fanahy mbola velona »).
Afin qu’il n’y ait aucun doute sur le déroulement de cette rencontre entre les deux protagonistes, il est nécessaire qu’un panel d’observateurs malgaches soigneusement sélectionnés y assiste à titre de témoins en posture de «Statue de Commandeur».
À l’époque j’avais dit «Ni Rajoelina, Ni Ravalomanana» ; l’évènement à venir ne me donnera-t-il pas tort. Dire ni Ravalomanana ni Rajoelina ne veut pas forcément dire qu'on est contre ou pour l'un d'entre eux. Mais c'est la logique de la sortie de crise. Dites-vous bien que si l'un d'entre eux se présente aux présidentielles et que l'autre ne peut pas, cela ramènerait forcément et indubitablement à des contestations. Deuxième hypothèse, si les deux se présentent en tant que candidats, êtes-vous sûr que le vaincu acceptera le verdict des urnes. Alors, pour éviter que l’on ne revienne dans une crise cyclique, il serait peut-être sage et prudent d'envisager que ni l'un ni l'autre ne se présentent. Je parais peut-être très dur dans mes propos, mais il vaut sûrement mieux pour eux deux subir mon juste courroux plutôt que la vindicte populaire ».
Raharinaivo Andrianatoandro
Mercredi 6 juin 2012